Opération Gideon: comment a été financée la tentative de coup d’État d’un ancien garde du corps de Trump contre Maduro?

Jordan Goudreau, ancien des forces spéciales américaines, avoue avoir piloté une tentative de coup d’État contre Nicolas Maduro, Président du Venezuela, en lien avec son opposant, Juan Guaido. Décryptage de Maurice Lemoine, journaliste spécialiste de l’Amérique latine et ancien rédacteur en chef du Monde diplomatique, au micro de Rachel Marsden.
Sputnik

Imaginez un spécialiste en sécurité privée, photographié en train de protéger un chef d’État lors d’un rassemblement politique, être plus tard accusé par un autre chef d’État d’avoir tenté de le renverser. Film d’espionnage? Non, c’est bien aujourd’hui le cas.

 Jordan Goudreau, ancien membre des forces spéciales américaines, passé également par les forces canadiennes, a été pris en photo avec l’équipe de sécurité de Donald Trump lors de ses rassemblements. Actuellement dirigeant de Silvercorp USA, une société de sécurité privée, il est accusé par la justice vénézuélienne d’avoir monté une tentative de coup d’État contre le Président Nicolas Maduro, en lien avec l’opposition vénézuélienne. Le putsch a été déjoué et des mercenaires américains et locaux sont aujourd’hui détenus au Venezuela, accusés de terrorisme et de complot.
 
Jordan Goudreau est pour sa part à l’abri aux États-Unis, mais il est recherché par le Venezuela. Un contrat, un enregistrement et des contacts entre le mercenaire et la garde rapprochée de Trump soulèvent de nombreuses questions au sujet de cette affaire hallucinante. Maurice Lemoine, journaliste spécialiste de l’Amérique latine et ancien rédacteur en chef du Monde diplomatique, explique comment cette tentative de renversement du Président vénézuélien a été mise en échec: 

«La situation au Venezuela, c’est certes que Nicolas Maduro n’est pas apprécié par tous les Vénézuéliens, mais il a une base sociale extrêmement forte, qui est très organisée en ce moment et qui surveille. Ce sont des pêcheurs de la région qui ont alerté l’armée, qui ont alerté la marine vénézuélienne et qui ont aussi aidé à capturer ces mercenaires.»

Maurice Lemoine souligne le montant élevé de l’opération:

«Le coût total estimé du projet est de 213 millions de dollars pendant un an et demi, environ. C’est-à-dire que c’est une opération qui a été prévue sur le long terme et qui était non seulement destinée à éliminer Nicolas Maduro et un certain nombre de ses proches, mais à éliminer réellement le régime.» 

D’où aurait pu venir un financement aussi important? L’ancien rédacteur en chef du Monde diplomatique réagit: 

«D’où vient l’argent? C’est là que la connexion peut se faire avec l’Administration des États-Unis, parce qu’en réalité, un certain nombre de biens vénézuéliens ont été confisqués par le gouvernement américain, en particulier une filiale du groupe PDVSA qui, aux États-Unis, s’appelle Citgo. Elle a été confisquée avec un certain nombre d’avoirs du gouvernement vénézuélien.
Mais cet argent, ce n’est pas Guaido qui le gère, c’est le Trésor américain. De sorte que si les sommes destinées à ce contrat sont payées par Guaido, en réalité, elles sont payées par le Trésor américain. Là, on a une implication directe entre l’Administration Trump et le paiement d’une somme, parce que je ne vois pas d’où Guaido et son équipe pourraient sortir 212 millions de dollars.» 

«Juan Guaido appelle à des sanctions internationales contre son propre pays»
Impliqué dans une opération qualifiée de «terroriste» par Maduro, où est donc Guaido aujourd’hui? Le journaliste explique:

«Juan Guaido est au Venezuela. Pourquoi n’est-il pas arrêté? Je crois que le gouvernement vénézuélien joue en finesse. Il sait très bien que s’il arrête Juan Guaido, il le transformerait en martyr et que la soi-disant communauté internationale va monter au créneau en l’accusant d’emprisonner ses opposants. Et, d’un deuxième point de vue, il semblerait que les services de renseignements vénézuéliens, aidés par les Cubains, ont tellement infiltré les réseaux de Juan Guaido qu’ils n’ont pas intérêt à le voir disparaître.»
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