La pandémie de Covid-19 a déjà de multiples conséquences qui ont touché quasiment tous les domaines de production. Il y a quelques jours, la Russie a suspendu l’exportation de céréales pour deux mois au moins, en imposant un quota de sept millions de tonnes qui a déjà été atteint.
Mais le secteur bio russe se porte très bien, confirme Andreï Akoulinine, chef de l’Organic certification, la plus importante entreprise de conseil en Russie dans le domaine des standards biologiques internationaux, qui affirme qu’«il n’y a pas vraiment de conséquences».
«Les cultures les plus demandées sur le marché international depuis cinq ans, celles qui ne peuvent pas être cultivées sur les terrains limités en Europe, c’est le pois, le lin, le colza. Ces espèces cultivées ne font pas partie des quotas imposés par le gouvernement russe. Parce que ce qui est le plus demandé sur le marché international bio n’a pas d’importance pour le marché interne russe, donc la Russie ne voit pas de danger dans l’exportation de ces cultures bio.»
Les entrepôts vides de cultures biologiques en Europe
La Russie, depuis quelques années, est en train de se faire une place sur le marché bio mais elle n’est pas un des principaux acteurs. Avant la pandémie, la Russie se fixait un objectif de 260 millions d’euros d’exportations d’ici 2025. La situation actuelle et la crise économique inévitable vont sans doute modifier les plans des Russes, mais pour le moment la situation est stable. Ce qui n’est pas le cas pour l’Europe, qui pourrait se trouver en manque, si ses exportateurs les plus importants, la Turquie et l’Ukraine, suspendaient leurs livraisons vers l’UE.
«Les derniers chiffres datent de 2018 et à cette époque l’Union européenne a importé sur son territoire 1.300.000 tonnes de cultures biologiques, principalement depuis la Turquie et l’Ukraine, la part de la Russie est de 34.000 tonnes, ce qui fait moins de 1%. Donc les entrepôts vides des cultures biologiques en Europe ce n’est pas à cause de la Russie, pour le moment aucun contrat n’a été résilié en raison de la pandémie, ils sont tous en train d’être exécutés.»
Le danger principal pour le secteur bio n’est pas la pandémie
Au début du confinement, les entreprises agricoles russes n’ont pas arrêté de travailler. À ce jour, la production continue et l’exportation bio n’est pas suspendue mais, si la pandémie n’affecte pas directement ce secteur, il y a d’autres facteurs qui pourraient transformer la situation en catastrophe, avoue Andreï Akoulinine.
«Le volume de production en Russie cette année dépendra surtout de la sécheresse attendue. Actuellement, dans la région de Tomsk par exemple, nous vivions des records de température pour le mois d’avril. À ce jour, le danger principal pour les producteurs bio en Russie est la faible récolte à cause de la terre sèche à l’étape des semis et non pas la pandémie. Pour les exportateurs bio, à condition d’une bonne récolte, cette année sera encore meilleure que la précédente.»
Le rouble faible rend les exportations plus intéressantes
La Russie compte 40 millions d’hectares de terres adaptées à l’agriculture biologique, contre 60 millions dans le reste du monde, ce qui donne un bel espoir pour l’avenir bio du pays, mais les Russes ne sont qu’au début de ce chemin de rendre toutes ces ressources rentables et développées.
Actuellement, avec près de 34.000 tonnes de cultures biologiques exportées, la Russie joue beaucoup sur la faiblesse du rouble, ce qui rend l’exportation vers l’UE intéressante. Si cela change, les conséquences seraient dévastatrices pour la Russie, souligne le chef d’Organic certification.
«Pour les exportateurs bio russes, le plus important est un rouble faible par rapport aux autres devises. Si jamais le rouble augmente, cela pourrait être un coup dur pour l’agriculture russe. Dans ce cas, nos céréales de la mer Noire vont rester à l’intérieur du pays, car exporter ne sera plus rentable pour la Russie.»