Sur les commandes de matériel médical, «l’Allemagne fait un peu de protectionnisme»

L’explosion de la demande en matériel médical mobilise les équipes techniques des hôpitaux, «en deuxième ligne» face au Covid-19, mais indispensables pour les soins. Éric*, technicien au sein d’un l’hôpital public dans l’Oise, haut lieu de la contamination, témoigne au micro de Sputnik de ses difficultés et de ses réussites.
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«Il faut être honnête: même si tous [les hôpitaux et services fermés auparavant, ndlr] étaient encore ouverts, on aurait peut-être un peu moins souffert, mais ça aurait été quand même compliqué de répondre à cette crise sanitaire sans précédent», estime Éric*, technicien au sein d’un hôpital public de la région parisienne, au micro de Sputnik.

De nombreux industriels se joignent à l’effort pour lutter contre la pandémie de coronavirus, en produisant le matériel médical et les protections nécessaires aux soignants. Même si la reconversion des certains ou l’impression 3D pallie le plus urgent, les hôpitaux comptent surtout sur les producteurs spécialisés.

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Éric* travaille depuis près de 30 ans au sein d’une petite équipe de techniciens qui s’occupe de tous les dispositifs médicaux d’un établissement public de région parisienne, lequel compte 2.000 employés, hors médecins. Dès le début de la crise, son service a été sollicité «pour presque doubler la capacité d’accueil du service de réanimation».

Jusqu'à 14 appareils pour l’assistance technique d’un patient 

Bien que tout le monde sache désormais que les contaminés au coronavirus risquent d’avoir besoin de respirateurs artificiels, «parce que le respirateur, c’est la base même du service de réanimation quand on est obligé d’intuber les gens», on ne réalise pas forcément que l’assistance technique d’un patient «représente entre 6 et 14 appareils –des appareils qui permettent de perfuser, des pousse-seringues, des pompes à perfusion– sans compter des appareils de monitorage multiparamétriques». Au moment d’augmenter le nombre de lits en réanimation, le service a utilisé toutes les capacités.

Mais «les respirateurs d’anesthésie sur lesquels on a mis certains patients ne sont pas assez performants quand on ventile des gens pendant plusieurs semaines dessus. Le réglage n’est pas aussi fin que celui d’un respi de réanimation», détaille le technicien.  

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Il a fallu s’organiser et pour pallier les insuffisances de qualité et le service technique a réussi à trouver un fournisseur «qui a du matériel de bonne qualité et que l’on connaît». Les respirateurs manquants ont étés commandés et «on ne doit pas tarder à les avoir». Une attente éprouvante au moment où l’hôpital épuise ses réserves.

«On est en attente, parce que les industriels n’arrivent pas à suivre. Les respirateurs viennent d’Allemagne et l’Allemagne fait un peu de protectionnisme. Heureusement “nos” respirateurs sont en stock quelque part en France», précise Éric*.

Ce n’est pas le cas de pousse-seringues, qui sont fabriquées à côté de Grenoble, mais «le souci est que leur siège est dans un autre pays européen».

Entre la solidarité et l’équité

Face à une crise mondiale, «ils ont décidé que c’est le siège lui-même qui dispatchait le matériel et non la [représentation en, ndlr] France». Ainsi, un hôpital français n’est-il pas prioritaire par rapport aux autres sur le matériel fabriqué sur le territoire national: «on ne maîtrise pas ça, on commande et on attend que ça arrive», confirme Éric*.

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Et, sans surprise, on retombe sur les maux chroniques de l’hôpital public.

«Cela ne nous met pas en difficulté plus que ça, parce qu’au-delà des problèmes du moment, l’hôpital public en France souffre depuis longtemps. Il y a des services de réa qui ont fermé dans certains hôpitaux, il y a des hôpitaux qui ont été fermés, il y a des lits qui ont été supprimés, certains pour des raisons purement financières», détaille le technicien.

Les difficultés pour trouver du matériel supplémentaire n’ont pas empêché, ce «service assez structuré, avec une équipe volontaire» de faire front durant les quatre premières semaines de la crise, où «personne n’a compté ses heures» et est resté «mobilisé».

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Et la mobilisation a été fortement nécessaire, puisque «ça a démarré très fort vers le 26, 27 février» dans l’Oise, où se trouve l’hôpital. Dans l’un des départements les plus touchés en France, avec les «cas les plus graves, les premiers décès», la fermeture complète de certains services a été rapidement ordonnée. Notamment l’hôpital du Sud de l’Oise, à Creil, a dû fermer «parce qu’ils ont mis tout le personnel en quarantaine et fait la désinfection complète des services». Les autres hôpitaux ont étés amenés à s’organiser en conséquence.

«Avant la crise, on avait jusqu’à douze lits de “réanimation lourde”, mais on avait aussi six lits que l’on appelle des “lits de soins de suite”. Pour eux, on a eu la chance de commander et d’avoir tout de suite les six respirateurs. Nous sommes passés de 12 à 18 lits de réa», se félicite Éric*.

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La demande augmentant, l’hôpital a ouvert une nouvelle unité de réanimation dans l’espace de réveil du bloc opératoire, composé de 8 ou 9 salles. Pour cette grande salle de réveil, équipée en monitorage, les techniciens ont récupéré les quatre respirateurs de réa de secours dont ils disposaient. C’est seulement en dernier lieu, «quand tous les blocs opératoires ont stoppé en urgence», qu’ils ont ajouté les respirateurs d’anesthésie.

Ainsi, en un mois, le service réanimation de cet hôpital public est-il passé de 12 à 28 lits avec assistance respiratoire. Bonne performance d’une équipe technique «en deuxième ligne de front» face au Covid-19, mais indispensable à chaque instant.

*Le prénom a été changé à la demande de l’intéressé

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