«Lomé la belle» est-elle toujours la capitale de la «Suisse de l’Afrique»? La plus importante ville du Togo, ce petit pays décrivant sur le puzzle ouest-africain une forme longiligne presque aussi populaire que la botte italienne, est toujours un havre de quiétude, nonobstant les vents contraires qui soufflent depuis le nord, et les soubresauts qui perturbent la vie publique depuis le départ du «Vieux», le père de l’actuel président Faure Gnassingbé.
«Si vous venez à Lomé, vous verrez le vent traîner des déchets plastiques. Cela finit par intégrer la terre, endommager notre environnement et notre santé. Emportés par les eaux, ces détritus tuent les poissons», regrette Felix Akizou Tagba au micro de Sputnik.
Ce jeune Togolais de 28 ans est à l’origine d’une idée originale: l’écojogging, un jogging respectueux de l’environnement. Mieux, un jogging militant. Le concept est simple: courir partout dans Lomé et ramasser sur son parcours les déchets en plastique.
Tous les samedis, un petit groupe de personnes se retrouve autour du jeune homme. Après un petit speech de quelques minutes, le temps d’expliquer le concept, il distribue des gants, des mini-sacs poubelles à accrocher à son cou, le tout en montrant les bons gestes à observer sur le front, face à l’ennemi.
Et quand le top départ est donné, c’est toujours avec des yeux amusés et admiratifs que les Loméens observent ces biocoureurs à l’œuvre.
«Je crois que c'est une bonne initiative de courir et de ramasser en même temps les sachets. C'est sans doute un bon message qui invite à être plus soucieux de la propreté de la ville», a indiqué Messan Alex, un passant, à Sputnik.
Ce jour-là, cap sur la grande plage de Lomé. Les consignes étaient claires. Tout au long du parcours qui ne dépasse pas le kilomètre, les écojoggeurs doivent scruter le sable fin de la plage à l’affût du moindre sachet en plastique, noir ou transparent, emballage éphémère abandonné sur place par quelque promeneur.
«C’est aussi l’occasion de sensibiliser! À la plage, où des paniers sont déjà disposés pour recueillir ces détritus, nous invitons tous ceux que nous croisons à éviter de jeter les déchets en plastique dans le sable», insiste Tagba.
Les déchets ramassés sont recyclés
Ce jour-là, le résultat des courses est plutôt satisfaisant. Plus de 20 kilogrammes (kg) dans l’escarcelle des écojoggeurs qui viendront se rajouter aux quelque cinq tonnes de déchets dont on a débarrassé la ville depuis 2017, date du premier écojogging.
Les détritus passent ensuite par la case recyclage. Après un premier tri, et en collaboration avec des structures de recyclage, la «récolte» est transformée en pochettes de téléphones portables que les écojoggeurs, réunis en association, mettront sur le marché.
Le cas échéant, le plastique est vendu «à un prix dérisoire» (de 50 ou 75 francs CFA le kilogramme, soit moins de 0,10 dollar) à des structures qui ont la capacité de procéder à sa transformation. L’argent récolté servira à organiser des compétitions d’écojogging.
La Coupe du monde d’écojogging
Cette activité a donné lieu à une compétition, la Coupe du monde d’écojogging, qui s’est tenue entre le 26 octobre et le 16 novembre 2019. Durant quatre samedis consécutifs, quatre équipes (Togo, Italie, États-Unis et Union européenne) se sont affrontées. C’est l’équipe européenne qui, avec 288 kg de déchets, a été sacrée championne du monde, suivie de celle des États-Unis (257 kg), du Togo (192 kg) puis de l’Italie (136 kg).