Après une année 2019 mouvementée due aux manifestations violentes qui ont secoué Hong Kong, c’est au tour du coronavirus de perturber la vie des 7,5 millions d’habitants de cette région rattachée administrativement à la Chine. Parmi eux, Racim, 13 ans, et son frère Ghiles, 9 ans, qui sont scolarisés au Lycée international français.
À la mi-janvier, leurs parents, traders à la bourse de Hong Kong, ont décidé de les envoyer en Algérie, leur pays d’origine, afin de leur éviter de supporter «le climat de panique» qui régnait déjà.
«Ma sœur était en panique à cause du climat d’hystérie qui régnait à Hong Kong lorsque le virus a commencé à se propager en Chine. Pour elle et son mari, il fallait absolument éloigner les enfants de cette tension. Il n’était même pas question de penser aux études, Racim et Ghiles pouvaient même rater une semaine ou deux d’école. Nous étions donc heureux de les accueillir pour une période qui devait être relativement courte», explique à Sputnik Nesrine, leur tante maternelle.
Classe interactive
Les choses se sont accélérées lorsque Hong Kong a confirmé le premier cas de Covid-19 sur son territoire le 22 janvier. Les autorités ont alors décidé d’annuler les festivités du Nouvel An chinois et ont pris des mesures strictes en fermant tous les lieux publics. Pour ce qui du système éducatif, les établissements scolaires et universitaires sont restés porte close au terme des vacances de début d’année. «Nous étions à Alger lorsque nous avons appris la nouvelle. Mais très vite, on nous a expliqué que nous devions suivre les cours via une plateforme d’e-learning», indique Racim. L’établissement où sont scolarisés les deux enfants ont opté pour l’application Google-Classroom qui permet d’organiser des classes interactives.
«Nous recevons chaque vendredi un mail détaillé avec les cours, des documents à imprimer et un manuel pour les parents. Cela nous permet d’être prêts dès le lundi. Mon frère Ghiles a seulement trois matières: le français, l’anglais et les mathématiques. Pour ma part, j’étudie le français, l’anglais, le mandarin, le latin et l’histoire-géo. Au début, c’était fatigant: je devais suivre les vidéoconférences d’évaluation de mes professeurs à 1h30 du matin à cause du décalage horaire. Les choses se sont arrangées par la suite», note l’adolescent qui souhaite devenir ingénieur.
Excuses pour la gêne occasionnée
Elle explique que durant la première semaine, les autorités hongkongaises ont axé leurs efforts sur la communication avec les parents. Les fonctionnaires «usaient d’un ton solennel» et n’arrêtaient pas de «s’excuser pour la gêne occasionnée» car ils estimaient que la fermeture des écoles avait rajouté «une nouvelle responsabilité aux parents».
«Au début, la personne que j’avais face à moi sur l’écran n’était pas consciente que je n’étais pas la maman des élèves et que, surtout, j’étais à l’autre bout de la planète. Bien sûr, ma maîtrise limitée de l’anglais et le décalage horaire n’arrangeaient pas les choses. De plus, je ne comprenais vraiment pas les subtilités du système éducatif hongkongais. Les choses sont rentrées dans l’ordre lorsque cet organisme a désigné une fonctionnaire francophone. C’est à partir de là que j’ai compris les enjeux: ils considéraient que je participais à ma façon à l’effort de lutte contre le Covid-19 sur le territoire de Hong Kong. Sauf que je le faisais à partir d’Alger et via Internet », note Nesrine.
«Des mots sur des maux»
Selon elle, cette expérience avec ses neveux lui a surtout permis de découvrir la «flexibilité et l’adaptabilité» du système hongkongais. Elle a également compris qu’il est possible d’avoir un enseignement de qualité grâce à quelques matières essentielles et que les écoliers peuvent utiliser les tri-jigsaw (sortes de puzzles) pour les aider à faire du calcul mental.
«L’enfant hongkongais est au cœur du système pédagogique. J’ai pu mettre de mots sur les maux de l’école algérienne. Ici, tout est fait pour satisfaire les professeurs, l’administration, les syndicats. Le bien-être de l’enfant arrive loin derrière», relève Nesrine. Racim et son frère Ghiles sont retournés chez eux dimanche 8 mars. Ils devront continuer à suivre leurs cours à domicile puisque leur école n’ouvrira qu’à partir du 20 avril.