La conférence de presse annuelle du chef de la diplomatie russe se tient ce 17 janvier à Moscou. Sergueï Lavrov, qui occupe le poste de ministre des Affaires étrangères par intérim, doit faire un résumé de l’activité de la diplomatie russe en 2019.
Au menu: la situation en Ukraine, le règlement de la crise syrienne, le dialogue russo-américain et les relations avec les pays européens ainsi que le cessez-le-feu en Libye.
Crash du Boeing ukrainien: au moins six F-35 auraient été repérés près des frontières iraniennes
La présence présumée de F-35 en vol près des frontières iraniennes peu de temps après les attaques de Téhéran contre des bases américaines en Irak et peu avant le crash du Boeing 737 ukrainien témoigne à quel point la situation était tendue à ce moment-là, a déclaré le responsable.
«Il y a des informations selon lesquelles, après l’attaque [contre des bases US en Irak, ndlr], les Iraniens s'attendaient à une nouvelle frappe américaine. Ils ne savaient pas sous quelle forme, mais il y avait au moins six F-35 en vol dans l'espace aérien juste à la frontière iranienne. Ce sont des informations, à mon avis, qui doivent être encore revérifiées. Mais je veux juste souligner que la nervosité est toujours présente dans de telles situations», a commenté le diplomate.
Lavrov prône l'avancée des accords de Minsk
En 2019, des progrès ont été réalisés dans le règlement de la crise dans l’est de l’Ukraine, a déclaré M.Lavrov, soulignant que ces accords ne devraient pas rester uniquement sur le papier.
«On a réussi à réaliser des progrès dans le règlement de la crise intra-ukrainienne. Après une pause de trois ans, un sommet en format Normandie s’est tenu après que la nouvelle direction de Kiev a pu enfin prendre des mesures pour mettre en œuvre les décisions des deux précédents sommets», a-t-il souligné.
«Nous espérons que les décisions prises à Paris en décembre nous permettront d’avancer dans la mise en œuvre de l’ensemble des mesures de Minsk, mais bien sûr, ces décisions ne devraient pas rester sur papier, comme ce fut le cas sous le régime de Porochenko», a-t-il rappelé.
Iran: Moscou n’abandonnera pas le dialogue
Moscou poursuivra le dialogue avec Washington et l'Europe sur le règlement des problèmes internationaux, y compris ceux liés à la situation autour de l’accord de Vienne sur le nucléaire iranien.
Il a avoué qu’aucun résultat «impressionnant» n’avait été obtenu pour le moment, mais a souligné que la Russie s’efforcerait «fermement de ne pas laisser le Monde sans accords qui, du moins d'une manière ou d'une autre, limitent les armes, en particulier nucléaires».
«C'est une situation préoccupante. Et maintenant, elle prend un tournant encore plus dangereux: les trois pays européens participant au Plan d'action global d'Europe – le Royaume-Uni, la France et l'Allemagne – ont envoyé une lettre au Haut représentant de l'UE pour les affaires étrangères, Josep Borrell, dans laquelle ils ont dit qu'ils voulaient entamer la procédure de règlement des différends qui est prévue dans l’accord lui-même», a déclaré M.Lavrov en commentant l’intention de ces pays de lancer le mécanisme de règlement des différends de l’accord de Vienne.
Le ministre par intérim a également proposé d’organiser une rencontre entre les pays qui adhèrent toujours à l’accord pour mieux comprendre l’avenir de celui-ci. La Russie se prononce pour la prolongation du traité New Start de réduction des armes stratégiques sans conditions préalables, mais Moscou ne voit pas de signaux clairs de Washington, a-t-il noté.
Avion abattu: une «désescalade» irano-américaine est nécessaire
Le crash d’un Boeing ukrainien en Iran est un signal pour Washington et Téhéran de s'engager dans une désescalade et ne pas s’échanger des menaces.
«L'aggravation des relations entre l'Iran et les États-Unis n'aidera à résoudre aucune crise dans la région, du moins parce que les tensions vont augmenter. Et la tragédie de l'avion de la compagnie aérienne ukrainienne au-dessus de Téhéran est un grave avertissement et un signal pour commencer à s’occuper de la désescalade, et pas des menaces constantes et des vols de l’aviation militaire dans la région», a insisté M.Lavrov.
Washington attire le Japon dans sa politique de confrontation avec la Russie
Moscou ne soupçonne pas Tokyo d'avoir des intentions malveillantes envers la Russie, mais ne peut que prendre en compte le déploiement d'armes de frappe américaines à ses frontières, a souligné M.Lavrov.
«Les systèmes de missiles antiaériens achetés aux États-Unis sont déployés au Japon. Ce sont les mêmes installations que les États-Unis ont déjà testées non seulement pour lancer des missiles antibalistiques, mais aussi pour lancer des missiles de croisière d'attaque. C’est-à-dire que c’est déjà une arme qui était interdite en vertu du traité sur les missiles à moyenne et courte portée pendant qu'il était en vigueur, jusqu'à ce que les Américains ne le rompent. Cela représente déjà une possibilité pour les armes près de nos frontières. Bien sûr, nous devons en tenir compte», a-t-il déclaré.
Il a noté que Moscou s'inquiétait de voir déployer des Aegis au Japon. «Bien sûr, nous ne voulons pas que la menace vienne du territoire de notre bon voisin, comme nous croyons l’être le Japon. Oui, en effet, nous avons des inquiétudes, elles sont formulées, elles sont également discutées dans le cadre du dialogue entre les vice-ministres des Affaires étrangères, et dans le cadre d'un dialogue au niveau des secrétaires des conseils de sécurité», a annoncé M.Lavrov.
Cessez-le-feu en Libye
Le ministre par intérim a noté que le cessez-le-feu était persévéré en Libye. Selon lui, la Russie est prête à de nouveaux contacts et efforts avec la Turquie pour y faire avancer le processus politique et désamorcer les tensions.
Le chef du gouvernement d'entente nationale libyenne, Fayez el-Sarraj, et le chef de l'armée nationale libyenne (ANL), le maréchal Khalifa Haftar, ont déclaré qu'ils assisteraient à la conférence de Berlin. Toutefois, le diplomate russe a souligné les tensions extrêmes qui les séparent.
«Pour le moment, les relations entre eux sont très tendues, ils ne veulent même pas être dans la même pièce, sans parler d’une conversation ou d’une rencontre», a-t-il mentionné.