La grève n'est pas qu'une arme française. En Allemagne, pays pourtant réputé pour ne faire que rarement appel à ce type de contestation sociale, la colère monte. Un syndicat représentant le personnel de cabine de Lufthansa, la première compagnie aérienne du pays, a déclaré le 26 décembre dernier qu'il s'apprêtait à appeler à la grève. Une annonce qui, comme en France, fait craindre le chaos en cette période de fêtes.
C'est le syndicat UFO qui souhaite s'opposer à la direction de Lufthansa afin de demander de meilleures conditions de travail et des salaires plus élevés pour les nouveaux employés.
«Nous ne considérons pas les grèves comme une solution», a répondu un porte-parole de Lufthansa à l'agence de presse DPA.
Les détails seront donnés le 27 décembre en fin d'après-midi, UFO ayant précédemment signifié qu'il ne lancerait pas d'appel à la grève pour les 24, 25 et 26 décembre.
Cet épisode est le dernier d'un combat entamé il y a plusieurs semaines. En novembre dernier, un arrêt de travail massif de 48 heures du personnel de cabine de Lufthansa avait cloué 1.500 avions de la compagnie au sol en 48 heures, ce qui avait affecté environ 200.000 passagers.
La compagnie se dit prête à discuter avec UFO – ce qui relève d’un véritable changement de politique quand l'on sait que la direction a longtemps refusé de dialoguer avec ce syndicat sous le prétexte qu'une lutte de pouvoir à sa tête lui avait fait perdre le droit de représenter les 22.000 personnels de cabine de Lufthansa. La direction de la compagnie aérienne avait même porté l'affaire devant les tribunaux.
La crainte des voyageurs est d'autant plus grande que la guerre entre UFO et la direction de Lufthansa affecte également les filiales du groupe. Le 20 octobre dernier, une grève d'une journée avait entraîné plusieurs dizaines d'annulations de vols chez Eurowings, Germanwings, SunExpress et Lufthansa CityLine.
Ce conflit social outre-Rhin intervient dans une période de difficultés économiques accrues pour le pays. Berlin, regardé en exemple pendant des années en Europe pour ses performances commerciales, voit son modèle économique remis en cause par le ralentissement commercial mondial qui impacte notamment ses partenaires de choix comme la Chine. En octobre dernier, sa production industrielle a plongé de 1,7% contre une croissance attendue de 0,3%. L'Allemagne, après être rentrée en récession technique à la fin de l'année 2018, a vu sa croissance faiblement évoluer à la hausse en 2019 et la situation ne devrait pas grandement s'améliorer en 2020, comme le note La Tribune:
«En Allemagne, l'économie devrait encore souffrir du ralentissement du commerce mondial. En 2018, la croissance de l'activité a marqué le pas pour entrer en période de récession technique à la fin de l'année. Le PIB devrait augmenter de 0,7 % en 2019 et 1,2 % en 2020, selon l'OCDE. La persistance des incertitudes liées au Brexit et à la guerre commerciale sino-américaine devrait continuer à peser sur le moral des entrepreneurs. Le niveau très bas du chômage et la hausse des salaires devraient néanmoins soutenir l'activité. Outre-Rhin, de nombreux débats agitent les sphères politico-économiques sur le modèle de croissance du pays, très dépendante du commerce extérieur à un moment où le libre-échange est remis en cause. La moindre demande d'équipements dans les pays émergents et le changement de modèle du géant chinois oblige l'économie allemande à chercher la croissance du côté de la demande intérieure. L'industrie automobile est toujours en proie à de lourdes difficultés face aux défis des normes environnementales plus exigeantes et à la baisse des exportations.»
De quoi voir les grèves se multiplier outre-Rhin?