«Tensions commerciales, brexit, populisme, risques géopolitiques, soulèvements populaires en Europe, Amérique du Sud, Hong Kong, tous ces événements ont feuilletonné la scène économique, politique et financière en 2019. Le risque, les tensions, les incertitudes se mesurent en finance avec un outil mathématique un peu complexe, un indicateur, qui est la volatilité implicite. Pour ceux qui sont passionnés par le calcul intégral, il suffit de calculer la valeur de sigma (σ) qui rend vraie la fameuse équation de Black & Scholes. À Paris, cet indicateur c’est le VCAC et aux États-Unis c’est le VIX. La moyenne annuelle historique est d’environ 19 tant sur le VIX que sur le CAC. Elle tourne depuis quelques semaines autour de 10,5. En d’autres termes, cela traduit le fait que les marchés n’anticipent pas de risque malgré toutes les tensions citées plus haut», explique Philippe Alezard, spécialiste du trading, sur le site Contrepoints.
Le phénomène d'euphorie sur les marchés est mondial. Aux États-Unis, le Dow Jones et le S&P 500 vont également de record en record même si pour l'économiste Patrick Artus, il s'agit d'une «illusion due aux rachats d'actions» comme il l'a confié aux Échos:
«À première vue, le S&P 500 affiche un surcroît de performance de plus de 80 % par rapport à l'Eurostoxx entre 1998 et novembre 2019. Mais en raison des importants rachats d'actions à Wall Street, davantage d'actions y ont été détruites que créées. "Un indice boursier est la valeur des entreprises divisée par le nombre d'actions. Si le nombre d'actions est réduit par les rachats d'actions, mécaniquement l'indice boursier augmente". Or si l'on calcule l'évolution des indices corrigés de l'évolution du nombre d'actions: "en réalité l'Eurostoxx a augmenté autant que le S&P 500".»
Autre point d'importance outre-Atlantique comme en Europe: la politique des banques centrales. Elles ont recommencé à ouvrir les vannes des liquidités. Après de nombreuses hausses de taux successives ces dernières années, la Réserve fédérale américaine (FED) les a baissé pour la troisième fois en quelques mois et en Europe, la Banque centrale européenne (BCE) a carrément relancé son programme d'assouplissement quantitatif ou «quantitative easing» et va ainsi injecter des milliards d'euros dans le système financier.
De quoi faire craindre à certains l'éclatement prochain d'une bulle comme Marc Touati, économiste et président du cabinet ACDEFI qui s'est récemment fendu d'une chronique dans Capital afin d'avertir de ce climat à risque:
«Alors, vive la bulle et au diable la prudence! Nous pourrions bien sûr nous arrêter là, mais nous ne le ferons pas, car cet aveuglement collectif nous rappelle trop celui qui prévalait en 2000-2001, juste avant l’éclatement de la bulle internet, ou encore la situation a priori idyllique de 2007-2008 sans oublier celle de 2016-2017, des périodes au cours desquelles personne (ou presque) n’osait qualifier les évolutions extravagantes des marchés boursiers par le terme de bulle. Pourtant, tel était et tel est toujours bien le cas.»
Même du côté des analystes on est partagé sur la suite des événements. Comme le rappelle Les Echos, «les indices de confiance calculés à partir de sondages auprès des opérateurs de marché ont commencé à piquer du nez».