Loyers fictifs pour les propriétaires, ce serpent de mer de la gauche qui refait surface

L’idée de faire payer aux propriétaires un loyer fictif refait surface par le biais de Gaspard Gantzer, candidat à la mairie de Paris et ex-conseiller de Hollande à l’Élysée. Derrière les bonnes intentions, la mesure s’apparente fort à un nouvel impôt local, déconnecté de la réalité des propriétaires. Retour sur une vieille rengaine de la gauche.
Sputnik

30€ par mètre carré, c’est le montant que Gaspard Gantzer, candidat à la mairie de Paris, entend facturer aux propriétaires d’un logement vacant depuis plus d’un an dans la capitale. Le «montant du marché» se justifie, au micro d’Europe 1, cet ancien directeur de la communication de François Hollande, qui met en avant que 10% du parc immobilier à Paris serait inoccupé.

Un montant qui se situe entre les statistiques de l’INSEE qui estimait en 2015 à 6,6% la vacance des logements dans la capitale et celles de l’hôtel de ville de Paris qui avance cette année un taux de 17%.

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Si cette fois-ci, la mesure ne concernerait que les détenteurs d’un logement vide depuis plus d’un an à Paris, l’idée d’appliquer un «loyer fictif» aux propriétaires de logements inoccupés ou non ne cesse de resurgir ces dernières années en France. Apparu dans le courant des années 2000 dans les travaux sur les inégalités de niveaux de vie de l’INSEE, ce qui n’est qu’un simple outil statistique prend rapidement les contours d’une piste de taxation supplémentaire sur les propriétaires, sous l’impulsion d’associations et de groupes de réflexion.

À leurs yeux, les propriétaires ayant fini de rembourser leur emprunt immobilier jouissent d’une «nette amélioration de leur train de vie» par rapport aux autres ménages, qui paient un loyer ou sont encore endettés, en somme une réelle «inégalité» mal appréciée, mais à corriger. Sous la présidence de François Hollande, le concept de fiscaliser cette économie de loyer prend tout son essor.

«Loyer fictif», vieille rengaine des gauches libérale et sociale

En 2013, dans une note de réflexion, le Conseil d’analyse économique (CAE), groupe de réflexion rattaché aux services de Matignon, suggère d’imposer les propriétaires occupant sur ces loyers qu’ils n’ont pas à payer, ou qu’ils pourraient toucher s’ils louaient. Autres pistes suggérées par le think tank: rehausser la taxe foncière via la mise à jour des valeurs locatives ou encore taxer les plus-values immobilières au barème de l’impôt sur le revenu, le tout afin de «réduire les inégalités de traitement fiscal». L’immobilier et l’assurance-vie jouissent de «taux faibles» d’imposition estiment alors les rédacteurs de la note.

Regrettant le peu d’investissement à risque dans les entreprises, ces derniers s’insurgent par ailleurs contre une «société de propriétaires», qui «réduit la mobilité du travail». En d’autres termes, les propriétaires sont moins enclins à déménager pour suivre l’évolution du marché de l’emploi.

Une absence de mobilité géographique remise en avant quelques années plus tard par France Stratégie, qui n’est autre que l’institution chapeautant le CAE et les autres conseils (emploi, famille, retraite, industrie, etc.) visant à déterminer les grandes orientations de développement du pays. Ainsi, en 2016, ce successeur du Commissariat général du Plan préconise notamment de supprimer la taxe foncière pour taxer «le revenu implicite dont bénéficient les propriétaires occupants», ainsi que de supprimer les droits de mutation à titre onéreux (DMTO, plus communément appelés «frais de notaire»), afin d’encourager les transactions et donc la «mobilité résidentielle» ainsi que l’accès des jeunes générations à la propriété.

Immobilier: la majorité s’apprête-t-elle à réformer le droit de propriété?
Si durant la campagne présidentielle, l’entourage d’Emmanuel Macron avait mis un point d’honneur à démentir une rumeur persistante qui prêtait justement au candidat d’EM l’intention de faire payer un loyer fictif aux propriétaires, on remarquera qu’au-delà de son aversion pour ces derniers, qu’il qualifiera de «rentiers», faciliter la mobilité ou encore «moduler» les frais de notaire, pousser à investir dans l’économie liquide plutôt que dans la pierre, sont autant de propositions qui refirent surface dans le camp En Marche lors de la campagne présidentielle.

Notons également qu’Emmanuel Macron est séduit à l’idée d’alourdir la fiscalité de l’immobilier. En témoigne l’intérêt qu’avait suscitée chez lui la remarque d’un participant au Grand débat national, fin janvier, qui lui suggérant de «réguler» certaines plus-values immobilières.

Dans la foulée d’un rapport récemment remis au Premier ministre sur la maîtrise des coûts du foncier, un député (Modem) de la majorité présidentielle a déposé un projet de loi en vue de généraliser le dispositif de bail réel solidaire (BRS), qui dissocie la propriété du terrain de celle du bâti (les propriétaires de tels logements, non-propriétaire du sol sur lequel il est construit, doivent donc s’acquitter d’une «redevance») afin de «stopper définitivement la spéculation foncière».

La France compte moins de propriétaires que d’autres pays européens

«Contenir les prix de l’immobilier» grâce à un «choc d’offre», c’est justement la bonne intention de Gaspart Gantzer. Que faire de ce «loyer payé à la collectivité»? La construction de logements, la rénovation de l’habitat et «peut-être construire des résidences étudiantes» développe le militant du Parti socialiste.

Au-delà des fantasmes générés par les discours présidentiels qui promettent un accès à la propriété pour tous, des taux d’emprunt toujours plus bas, la réalité sur le terrain est bien différente de ce que s’imaginent certains Français. En effet, avec 64% de propriétaires contre 70% en moyenne dans les 27 États membres de l’UE, les Français font partie des moins bien lotis d’Europe en termes d’accession à la propriété.

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