Vannes à volonté, grimaces, répliques à couper le souffle, Ulrich Takam tient les internautes en haleine. À travers ses webséries diffusées chaque semaine sur les réseaux sociaux, le comédien de 25 ans fait rire la toile entière. Une inspiration, dit-il, tirée de la vie quotidienne.
«En fait, j’ai développé trois concepts: les délires de Takam, les parodies de Takam et les feats de Takam. Chacun a sa particularité mais l’objectif est toujours le même: procurer de la bonne humeur à la communauté qui est née autour de mes différentes productions en tournant en dérision les réalités sociales», confie Ulrich Takam au micro de Sputnik
D’un concept à un autre, Ulrich Takam, qui a conquis la toile camerounaise, se donne entièrement. L’humoriste comédien a de l’imagination à revendre et il est désormais une star en pleine ascension qui récolte des milliers de vues à chacune de ses publications. Une montée en flèche qui s’appuie sur sa grande communauté de followers.
«Mes productions focalisent de plus en plus l’attention des Camerounais et donnent du sens à mon slogan "Ma vraie force, c’est vous". La communauté Bimoulè (nom de ses followers, ndlr) croit et soutient un mouvement, c’est ce public-là qui like, qui regarde les vidéos, c’est grâce à lui qu’on a cette audience aujourd’hui et je lui en sais gré», précise-t-il.
Pour capitaliser son succès sur Internet, le jeune comédien a affiné sa stratégie. Il s’est entouré d’une équipe et développe désormais des spectacles grand public.
«On s’est constitué en entreprise. Toute une équipe travaille sur le volet des spectacles en salle – stand-up par exemple – avec un metteur en scène, un éclairagiste, une maquilleuse, un régisseur lumière, un manager, un régisseur son, un attaché de presse… Ulrich Takam n’est que la partie visible d’une équipe de plus de 30 personnes et c’est la raison pour laquelle nous sommes arrivés où nous sommes aujourd’hui», renchérit la star.
Une ascension fulgurante
Né à Bansoa, dans l’arrondissement de Penka Michel, à l’ouest francophone du pays, Ulrich Takam est le cinquième d’une fratrie de huit enfants. Après son baccalauréat, il a suivi une formation d’instituteur avant de se consacrer aux arts du spectacle. Un destin inattendu pour le jeune humoriste, par ailleurs animateur de radio sur une chaîne urbaine émettant depuis Yaoundé, la capitale du Cameroun.
«C’est en 2016 que je suis monté sur scène pour la première fois. Ce n’était pas mon rêve d’être humoriste, mais j’ai toujours eu cette grosse envie de travailler dans les métiers de la communication. Je voulais notamment être animateur, un peu comme Guillaume Pley sur NRJ ou d’autres grosses pointures de l’animation», relate-t-il.
Mais le virage s’est produit en 2016, au moment de passer sa licence en arts du spectacle et cinématographie à l’université de Yaoundé 1. Le jeune étudiant, soucieux de son avenir, a commencé à écrire ses propres textes et à jouer dans des pièces de théâtre.
«À chaque fois que j’incarnais un personnage, je trouvais le moyen de susciter le rire à travers ce personnage. Je me suis dit: pourquoi ne pas me spécialiser dans le genre comique, dans l’humour? J’ai essayé et cela m’a souri», se souvient Ulrich Takam.
À ses débuts, le jeune comédien a incarné divers personnages dans des pièces de théâtre pour polir son talent. Et, un pas après l’autre, Ulrich Takam, qui a encore à l’esprit sa première scène, est passé de l’ombre à la lumière.
«Ma première prestation, c’était à l’Institut français du Cameroun, dans la pièce "Noces de cendre" de Gilbert Doho. Je jouais le rôle de Pou, un malpropre d’un village voisin qui entretenait une relation avec une femme mariée qui a abouti à une grossesse adultérine. J’ai également joué dans "Le Roi Semeur" d’Eugène Ionesco. J'étais le docteur comique sans scrupules qu’on soupçonnait d’être l’amant de la femme du roi. Tous les deux avaient pour ambition de tuer ou de voir mourir le roi. Le seul personnage en peine que j’ai incarné c’est Wilfried Otterman dans "La Croix du Sud" de Joseph Ngoué, c’est dans ce rôle que j’ai senti que je pouvais avoir du succès dans l’humour. En effet Wilfried Otterman est un personnage dramatique, qui n’est pas comique. Il suscite plutôt la pitié, mais j’ai réussi à faire rire dans la peau de ce personnage pathétique», nous confie le jeune prodige.
Aujourd’hui, le petit Takam est devenu grand et multiplie des scènes à travers le pays, et pas seulement. Le promoteur de slam-up – un événement annuel dédié au slam et stand-up – a représenté le Cameroun en juin dernier au Marrakech du rire au Maroc. Un rêve de passionné, devenu réalité.
«J’avais déjà rêvé du Marrakech, mais si quelqu’un m’avait dit que j’y serais en 2019, je ne l’aurais pas cru! Ça a toujours été mon rêve. Je m’y voyais en 2023 mais le destin a voulu que ça se fasse plutôt en 2019. Tout est arrivé de façon inopinée, ça m’avait l’air d’un film, je ne m’y attendais vraiment pas. C’est lorsque je suis arrivé à Marrakech que j’ai pris conscience que mon rêve s’était réalisé. Je voyais des affiches du Marrakech presque partout et quand j’ai vu Jamel Debbouze, je l’ai touché, je me suis écrié: c’est vraiment toi Jamel ? Il m’a répondu: oui, dans un rire saccadé. C’est un moment inoubliable que j’ai vécu, un grand pas dans ma carrière», se réjouit-il.
«J’ai aussi été nominé en 2018 au Prix RFI Talent du rire, et en 2019 au Canal d’or. Je n’ai pas eu la chance de décrocher ces prix. Mais j’ai la conviction qu’il viendra un moment où j’en sortirai gagnant», espère-t-il.
En résidence de création pour ses futurs numéros, cet admirateur de Dieudonné M’bala M’bala et de Gad Elmaleh ne se donne pas de répit.
«Je prépare actuellement un spectacle de fin d’année intitulé «Ma première fois». C’est un one-man-show qui aura lieu le 29 novembre à la place Saint Josué de Yaoundé. Un événement similaire aura lieu le 13 décembre à Douala. C’est à travers ces deux spectacles que je vais officiellement lancer ma tournée nationale qui est prévue de février à août 2020. Et en septembre 2020, je ferai une tournée européenne», se projette Ulrich Takam.
Ulrich Takam est l’exemple d’un destin exceptionnel. Parti de rien de son Bansoa natal, des rêves plein la tête, pour poursuivre ses études universitaires dans la capitale politique, il est devenu, à force de travail, une grande figure de la scène culturelle au Cameroun.