«Moscou a réussi pour la paix en Syrie, je crois qu'il peut le faire au Kosovo»

Entamé par l’UE en 2011, le dialogue de normalisation des relations entre Belgrade et Pristina est à l’arrêt mais la relance des négociations avec la participation russe est de plus en plus évoquée. Depuis le début du conflit, la position de Moscou n'a pas changé et «prouve son attachement à la paix», selon des experts interviewés par Sputnik.
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Si les deux camps n’arrivent pas à s’entendre sous l’égide d’une tierce partie, cela doit-il impliquer l’arrivée d’un nouveau négociateur? Dans le dialogue entre Belgrade et Pristina, c’est Moscou qui pourrait assumer ce statut, affirment de plus en plus d’experts en la matière, dont Nikola Mirkovic, auteur de l’ouvrage Le Martyre du Kosovo et l’ancien diplomate serbe Zoran Milivojevic.

«Vortex d’instabilité politique»

Nikola Mirkovic revient sur les origines des problèmes auxquels est confrontée la région actuellement. 

«Les États-Unis, l'Otan et l'Union européenne sont à l'origine même de la situation catastrophique du Kosovo. En bombardant illégalement la Serbie il y a 20 ans, ils ont créé un vortex d'instabilité politique qu'ils ne contrôlent plus. Ils n'ont toujours pas réussi à trouver une issue pacifique», a déclaré M.Mirkovic à Sputnik, rappelant que de nombreux pays ont révoqué leur reconnaissance de l’indépendance du Kosovo cette année.

L’expert est persuadé qu'«il est temps de faire rentrer de nouveaux intermédiaires dont le seul objectif sera d'aider les camps opposés à trouver un compromis juste et conforme au droit international». Selon M. Mirkovic, les Kosovars y sont disposés.

Quid de la participation de Moscou?

Le nom de Moscou revient avec de plus en plus d'insistance, souligne-t-il, car la Russie a une grande expérience de règlement des crises internationales, rappelant la participation russe aux accords de Minsk 2, à la résolution du conflit en Afghanistan et en Syrie. 

«Contrairement au camp atlantiste, la Russie œuvre pour le respect du droit international et de la résolution 1244 des Nations unies [pour placer le Kosovo sous administration provisoire de l’Onu, ndlr] qui doit régir le Kosovo depuis la fin de la guerre. Depuis le début du conflit, sa position n'a pas bougé d'un iota et prouve son attachement à la paix et aux instances internationales», déclare l’expert.

«La Russie a un rôle clé à jouer» sur la situation du Kosovo
Si Moscou jouit d'une bonne image auprès du peuple serbe «qui verrait son intervention comme intermédiaire d'un très bon œil», les élites de plusieurs pays des Balkans sont «clairement atlantistes».

«Si la Russie intervient elle devra rassurer les Albanais sur sa capacité à être équitable», prévient M. Mirkovic. «Ce que Moscou a réussi pour la paix en Syrie, poursuit-il, je crois qu'elle peut le faire au Kosovo. Je pense même que cela serait salutaire pour toute la région».

«Le processus de négociation n'est pas débloqué»

L’ex-diplomate serbe Zoran Milivojevic rappelle qu'aucune décision concernant le statut du Kosovo ne peut aller de l’avant sans le Conseil de sécurité. Donc le processus de négociations est de toute façon impossible sans la Russie car les initiatives des pays qui ont reconnu le Kosovo doivent passer par le Conseil de sécurité et, logiquement, par la Russie, qui participe indirectement aux négociations en cours.

«S'il s'agit d'une décision finale sur le Kosovo et si la Serbie est satisfaite de cette décision, c'est le moment où la Russie doit parler et doit indirectement s'engager dans la phase finale des négociations. Mais le problème est que nous sommes très loin des négociations de fond. Le gouvernement n'est pas formé à Pristina. Le processus de négociation n'est pas débloqué. On ne sait pas sur quelle plate-forme ce dialogue sera mené. Je pense que l'ambition des États-Unis d'achever rapidement ce processus est irréaliste», a-t-il déclaré.

Échec de l’initiative bruxelloise

Sous pression de Bruxelles et pour le rapprochement de la région avec l’UE, ainsi que pour faciliter la vie des Serbes au Kosovo, les autorités serbes ont dû engager des négociations portant sur la normalisation des relations avec les Albanais kosovars sous la médiation de l’UE en 2011. Cependant, après l'instauration par les autorités de Pristina de taxes de 100% sur les produits de Serbie et de Bosnie-Herzégovine en novembre 2018, le dialogue a été suspendu.

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