Les Tunisiennes se mobilisent contre le harcèlement sexuel après l’affaire du député

La mobilisation des Tunisiennes contre le harcèlement sexuel prend de l’ampleur, notamment sur les réseaux sociaux. Depuis qu’une lycéenne de 19 ans a porté plainte contre un député, les témoignages accompagnés du hashtag #EnaZeda fusent.
Sputnik

La publication jeudi 10 octobre d’une vidéo et de photos du député Zouheir Makhlouf, fraîchement élu sur la liste du parti de Nabil Karoui Qalb Tounès, pris en flagrant délit de masturbation dans sa voiture, a déclenché un énorme tollé en Tunisie. L’élu de la région de Nabeul a été filmé devant un lycée par une élève de 19 ans qui a déposé plainte contre lui pour harcèlement sexuel.

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Des activistes ont lancé le hashtag #EnaZeda [dialecte tunisien, ndlr], #Metoo en anglais, sur les réseaux sociaux où les témoignages déferlent, lançant ainsi le débat national sur la question du harcèlement sexuel.

Ainsi, dans une déclaration à France 24, Sarah Ben Saïd, directrice exécutive de l’association Asswat Enissa («Les voix des femmes») qui soutient la plaignante dans sa démarche, souligne l’importance de faire aboutir judiciairement cette affaire.

«Pour nous, cette affaire est très importante parce que la fille a seulement 19 ans», insiste-t-elle, mettant l’accent sur le fait qu’«elle a eu le courage de dénoncer ce harcèlement sexuel. Il y a désormais une plainte avec une affaire entre les mains de la justice». Par ailleurs, elle souligne que cette plainte a une grande importance vu que «l’agresseur pouvait encore devenir député à l’Assemblée malgré cette affaire, même s’il n’a pas encore prêté serment».

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Pour sa part, Me Naïma Chabouh, avocate de la victime, confie qu’«il n’y avait pas beaucoup d’affaires de harcèlement sexuel [portées devant la justice, ndlr], parce que la culture en elle-même, qui est conservatrice, n’encourage pas la femme à aller jusqu’au bout et déposer plainte». «D’ailleurs, l’aboutissement de cette affaire est très important car il va motiver d’autres femmes à porter plainte», soutient-elle.

Le député nie les faits

Dans un message publié sur sa page Facebook, Zouheir Makhlouf nie les faits qui lui sont reprochés, affirmant qu’il était en train d’uriner dans une bouteille d’eau. Selon ses propres termes, étant atteint de diabète, il n’a pas trouvé d’endroit adéquat pour uriner et ne pouvait pas se retenir.

Cependant, ses détracteurs lui ont fait remarquer qu’il n’y avait pas de trace sur les photos de la bouteille d’eau qu’il dit avoir utilisée. Le député a depuis désactivé son compte.

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Nadia Ayadi, l'une des initiatrices de #EnaZeda, a répondu au député dans une déclaration à TV5Monde, affirmant que la jeune femme qui a pris la photo ne faisait que rapporter un comportement récurrent.

«Elle et ses amies avaient remarqué qu'un grand nombre d’hommes rôdaient autour de leur lycée», a-t-elle déclaré. «Elle ne faisait que documenter un comportement suffisamment répandu pour qu’elle repère l'homme et ait le réflexe de sortir son téléphone pour prendre une vidéo en passant devant la voiture», a-t-elle ajouté.

Le procureur de la République a ordonné l’ouverture d’une enquête. Zouhair Makhlouf et la lycéenne seront convoqués pour audition.

En matière de harcèlement sexuel, la loi adoptée en 2017 représente déjà une avancée important en Tunisie, donnant à la justice les outils nécessaires pour saisir et condamner. La loi contient en effet des définitions claires du harcèlement et des agressions sexuelles, avec des peines associées. Selon une étude, 97% des victimes du harcèlement sexuel ne signalent pas leur cas à la justice.

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