Désignée par Emmanuel Macron pour intégrer la Commission européenne, la Française Sylvie Goulard a réclamé mardi «le respect de la présomption d'innocence» aux eurodéputés, qui ne l'ont pas ménagée lors d'une audition à Bruxelles sur les enquêtes dont elle fait l'objet pour des soupçons d'emploi fictif, informe l’AFP.
«I'm clean» («je suis propre»), a lancé en anglais Mme Goulard aux représentants du Parlement, qui décideront, à l'issue de cette audition, de valider ou non sa nomination pour le portefeuille aussi vaste que stratégique du «Marché intérieur» au sein du futur exécutif européen.
Cette audition est aussi un nouveau test pour la présidente du futur exécutif européen, l'Allemande Ursula von der Leyen, censée entrer en fonction le 1er novembre et dont l'équipe peine pour l'instant à convaincre les eurodéputés qui auditionnent tous les candidats jusqu'au 8 octobre, informe l’agence de presse.
Deux de ses membres -la social-démocrate roumaine Rovana Plumb et le Hongrois Laszlo Trocsanyi (PPE, droite)- ont été retoqués avant même leur audition, ce qui provoqué le courroux du PPE.
Députée européenne de 2009 à 2017, la Française a été interrogée à plusieurs reprises sur les deux enquêtes dont elle fait l'objet -l'une de la justice française, l'autre de l'Office européen de lutte antifraude (Olaf)- dans l'affaire des emplois présumés fictifs des assistants des eurodéputés Modem.
Ce dossier l'avait conduite à quitter son poste de ministre des Armées en juin 2017, un mois seulement après sa nomination.
Scepticisme de députés
Plusieurs députés ont soulevé les «questions éthiques» posées par le fait que Mme Goulard fasse l'objet de deux enquêtes. «Comment comprendre que cela ne vous empêche pas d'exercer la fonction de commissaire ?», a lancé le Français François-Xavier Bellamy.
D'autres députés, rapporte l’AFP, ont aussi déclaré «ne pas comprendre» comment elle pouvait prétendre être commissaire alors qu'elle a démissionné pour les mêmes raisons de son poste de ministre des Armées.
«Un usage existe en France, depuis les années 90, selon lequel tout ministre, à partir du moment où il serait mis en examen, devrait démissionner», a-t-elle expliqué, ajoutant que «dans les institutions européennes, un tel usage n'existe pas».
«Je n'ai pas été mise en examen, mais j'ai estimé alors pour une raison, avoir la responsabilité des armées françaises [...] que je ne pouvais pas faire courir ce risque», a-t-elle poursuivi.
«Ce n'est pas que j'aurais du mépris pour les fonctions européennes», mais «la gravité de l'engagement de la vie humaine est un petit peu d'une autre nature».
«Je respecterais, si elle advient, la décision de justice», a-t-elle affirmé.
La Française a déjà remboursé 45.000 euros au Parlement européen, correspondant à huit mois de salaire d'un de ses assistants, pour lequel elle n'a pas pu fournir «de preuve de travail». «Un aveu», selon ses détracteurs, rappelle l’agence.
«Je n'ai rien reconnu» avec ce remboursement, a-t-elle répondu, expliquant qu'«il y avait eu des problèmes au moment de [la] démission» de ce collaborateur.
Mme Goulard a également été interrogée sur son travail de «consultante», à «plus de 10.000 euros» mensuels, pour un think tank américain, l'institut Berggruen, d'octobre 2013 à janvier 2016, alors même qu'elle était eurodéputée.
«J'ai tout déclaré, tout était légal», a-t-elle souligné.