Depuis l’incendie de l’usine Lubrizol le 26 septembre à Rouen, les interrogations fusent et les réponses des autorités sont jugées insuffisantes: quelles sont les causes de l’incendie, ses risques pour la santé, pour l’environnement, à court et plus long terme, se demandent les habitants.
Face aux messages qui se veulent rassurants, mais qui sont peu concrets, du gouvernement et du préfet, les Rouennais ont organisé de nombreuses manifestations, qui ont pris de plus en plus d’ampleur. Après deux rassemblements citoyens le vendredi 27 et le lundi 30 septembre, où les habitants réclamaient des réponses, ce mardi 1er octobre, des associations, ONG et syndicats entendent mobiliser les Normands.
Ils organisent une marche à partir de 18 h, du Palais de Justice jusqu’à la Préfecture, exigeant que la vérité soit faite sur les conséquences de l’incendie. Parmi leurs griefs, ils constatent que la liste des produits brûlés n’a pas été communiquée, que les résultats d’analyse de l’air et de l’eau n’ont pas été rendus publics ou que les autorités observent le silence sur les animaux morts après le drame…
La défiance grandissante envers les pouvoirs publics.
Les habitants ont soif de vérité et pour cause. Depuis l’incendie, les pouvoirs publics assurent une seule chose, c’est que les retombées ne sont pas toxiques.
«Il n’y a pas de dangerosité particulière même si, nous le savons, l’inhalation des fumées présente en soi sa part de dangerosité», avait déclaré Christophe Castaner aux journalistes lors de sa visite de l’usine, le 26 septembre.
Lundi 30 septembre, Édouard Philippe, qui s’est rendu sur place, a reconnu des odeurs gênantes, mais affirme qu’elles ne sont pas nocives. Un discours qui a de quoi irriter les oreilles de ceux qui souffrent d’inflammations aux yeux, à la gorge ou aux poumons.
Pourtant, les résultats d’analyses sur les suies et pollutions seront publiés «demain ou après-demain», a déclaré ce 1er octobre Didier Guillaume, ministre de l’Agriculture à FranceInfo. Les propos du Premier Ministre ont été jugés scandaleux par ce chimiste sur BFMTV :
L’association Respire a d’ailleurs déposé un référé lundi soir dans le but de nommer un expert et affirme vouloir «organiser avec la population une campagne de prélèvements citoyens, qui seront faits en présence d’huissiers, afin de fournir des analyses complémentaires à partir des suies, galettes et autres résidus identifiés par les habitants.»
La sécurité de la population est-elle assurée?
Pas de distribution de masques de protection, une eau du robinet qui devient marron chez certains, des puits emplis de résidus noirâtres chez d’autres, distants de dizaines de kilomètres du site du sinistre… Les témoignages se multiplient après l’incendie. «Pas de dangerosité», «un peu toxique, mais pas trop», «gênants, mais pas nocifs», les analyses ne sont pas encore publiées que les autorités se veulent rassurantes, tout en étant parfois contradictoires. Comment expliquer alors les arrêts maladie des forces de l’ordre et des pompiers présents sur le site de l’incendie? Quelles conséquences sur la qualité de l’air et de l’eau? Quel sort sera réservé aux agriculteurs et à leurs élevages? Le ministre de l’Agriculture a voulu se montrer rassurant auprès des paysans normands: «Vous devez être indemnisés», leur a-t-il dit. Il a promis «des avances de trésorerie rapides» pour pallier aux situations les plus urgentes, mais les modalités d’un tel dispositif restent à définir.
Les habitants demandent une enquête publique menée par des experts représentatifs de la population et une totale transparence. Une demande légitime. Sera-t-elle entendue, et si oui, quand?