Vers l’établissement d’un accord commercial préférentiel entre l’Algérie et la Russie

Forte d’un partenariat historique avec la Russie, l’Algérie, du fait de la disponibilité de ses produits agroalimentaires sur toute l’année, est invitée à prendre une part importante du marché alimentaire russe de 150 millions d’individus. Pour ce faire, le pays doit défier les concurrents locaux et améliorer sa logistique.
Sputnik

L’Algérie sera l’invitée d’honneur de la 28e édition de la Foire internationale russe des produits agroalimentaires World Food Moscow qui se tiendra du 24 au 27 septembre à Moscou.

En prévision de ce rendez-vous, l’Agence algérienne de promotion du commerce extérieur (ALGEX), en collaboration avec la Représentation commerciale de la Russie en Algérie, a organisé le 18 septembre dernier à son siège d’Alger un séminaire d’information. Cette réunion regroupait une centaine de participants, parmi lesquels les 31 entreprises algériennes présentes au salon – qui accompagneront une délégation de haut niveau dirigée par le ministre algérien du Commerce Said Djellab – ainsi que les représentants de la Mission économique de la Russie en Algérie.

Vers l’établissement d’un accord commercial préférentiel entre l’Algérie et la Russie

«L’enjeu de cette édition est de taille pour l’Algérie car il est prévu d’instaurer un Conseil des affaires algéro-russe. De plus, la présence du ministre du Commerce sera l’occasion de préparer la mise en place d’un accord commercial préférentiel entre les deux pays», a confié au micro de Sputnik Ali Bey Nasri, président de l’Association des exportateurs algériens (ANEXAL).

Cet accord sera mis en place conformément à une demande des investisseurs russes désireux de s’approvisionner en fruits et légumes algériens frais et disponibles toute l’année, selon les confidences de Chafik Chiti, directeur général de l’ALGEX au micro de Sputnik.

«Nous notons la ferme volonté de la Mission économique russe de développer les échanges commerciaux avec l’Algérie. En prévision de cette foire, où un important pavillon de 600 m2 nous a été réservé, nous avons discuté des conditions et des nouvelles solutions pour le renforcement et la diversification de nos exportations. Nos amis russes ont même évoqué l’établissement d’un accord commercial préférentiel avec l’Algérie pour faciliter les échanges, notamment en matière de produits agroalimentaires. Cette question n’avait jamais été posée auparavant!», a précisé Chafik Chiti.

Entre la Russie et l’Algérie, un partenariat stratégique prometteur
En effet, la Fédération de Russie, dont les importations de produits alimentaires s’élèvent à 7 milliards de dollars par an, fait face, depuis 2014, à des sanctions internationales, notamment de l’Union européenne d’où provenait une grande partie de ses approvisionnements en fruits et légumes.

Pour assurer sa sécurité alimentaire, ce plus grand pays du monde par sa superficie cherche à diversifier ses fournisseurs. Au cours de cette réunion, les représentants de la Mission économique russe en Algérie ont donc appelé les investisseurs algériens à venir plus nombreux afin de mieux présenter le potentiel agroalimentaire algérien méconnu des Russes.

«Nous proposons un champ de coopération très large à l’Algérie, qui pourrait potentiellement devenir un grand fournisseur de produits agroalimentaires pour la Russie, notamment par la qualité de ses denrées et sa capacité à  fournir des fruits et légumes frais sur toute l’année. Le marché russe est en pleine croissance, il y a vraiment une place pour l’Algérie», a déclaré Nicolaï Loktev, représentant de la Mission économique russe.

«Soyez plus agressifs!»

Si l’Algérie a un fort potentiel en matière de production agroalimentaire, le marché russe lui, est totalement méconnu. Il est pourtant très compétitif puisque de nombreux fournisseurs s’y bousculent, de l’ex-URSS notamment, qui sont installés depuis de longues années.

«Certes, le marché russe est un marché très compétitif pour l’Algérie, dont l’un des principaux atouts sont ses récoltes de produits de qualité qui ne sont pas limitées à des saisons particulières. Toutefois, la concurrence sera rude avec les fournisseurs traditionnels des produits agroalimentaires de la Russie, notamment les pays de l’ex-Union soviétique. Ces derniers présentent, contrairement à l’Algérie, des produits connus du consommateur russe et disposent de solutions de logistiques déjà bien établies. Nous vous invitons à promouvoir votre production, à être plus insistants et plus agressifs», préconise Nicolaï Loktev.

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La Mission économique russe est présente dans trois autres pays d’Afrique, à savoir l’Afrique du Sud, l’Egypte et le Maroc. Elle invite les Algériens à s’introduire sur le marché hallal russe où vivent plusieurs communautés musulmanes qui représentent environ 15% de la population russe.

«La Russie possède une grande communauté musulmane estimée à environ 20 millions d’individus. Il est intéressant de miser sur les exportations des produits hallal vers cette population. Des échanges commerciaux dans un sens comme dans un autre de ces produits serait d’un grand bénéfice pour les deux côtés», a expliqué Nicolaï Loktev.

Améliorer la visibilité et la logistique

Les participants à cette réunion de l’ALGEX ont unanimement regretté le manque de logistique et de moyens de transport qui permettraient la fluidification des exportations algériennes vers la Russie. L’autre inconvénient, dans la pénétration des produits algériens sur le marché russe, réside dans la méconnaissance totale des productions algériennes en Russie.

«La conjoncture politique actuelle est favorable pour la promotion des échanges entre l’Algérie et la Russie. Toutefois, il faudrait se rappeler que les Russes n’ont hélas pas d’image de l’Algérie, comme les Algériens n’ont pas d’image de la Russie. Nous devrions travailler pour renforcer nos représentations respectives», a appelé Erik Dadaian, autre représentant de la Mission économique russe.

Vers l’établissement d’un accord commercial préférentiel entre l’Algérie et la Russie

Rencontré lors de cette réunion, l’investisseur Boudjemaa Kermiche, du groupe algérien d’eau minérale et de boissons diverses Ifri, estime que l’augmentation de la visibilité de l’Algérie incombe aux officiels, aux professionnels du secteur des exportations mais surtout aux ressortissants algériens vivant en Russie.

«La diaspora algérienne établie en Russie a, par sa connaissance de la langue et des us et coutumes de la Russie, un rôle très important à jouer dans la facilitation de l’introduction et la promotion des marchandises algériennes», a-t-il rappelé au micro de Sputnik.

Mais l’Algérie est déjà sur la bonne voie de sa conquête de ce marché, selon le président d’ANEXAL. 

«Les exportations algériennes vers la Russie étaient quasiment nulles il y a quatre ans de cela, mais pour l’année 2018, celles-ci, composées essentiellement de dattes et d’autres produits du terroir, se sont élevées à 8 millions de dollars. Nos capacités nous permettent de multiplier par 10 nos exportations sur le moyen et le long terme. Nous devrions hisser le niveau des échanges commerciaux à la hauteur des excellentes relations politiques qu’entretiennent nos deux pays depuis l’indépendance de l’Algérie (1962, NDLR)», a insisté Ali Bey Nasri au micro de Sputnik.

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La valeur totale des échanges commerciaux entre l’Algérie et la Russie s’est établie à 4,8 milliards de dollars, en 2018, selon des chiffres communiqués à Sputnik par la représentation commerciale russe en Algérie. Cette même source a précisé que les exportations de l’Algérie vers la Russie ont atteint seulement 10,5 millions de dollars (essentiellement les dattes). Tandis que la Russie a exporté pour 173 millions de dollars de produits alimentaires vers l’Algérie.

Les exportations algériennes de produits agroalimentaires ont donc de beaux jours devant elles, compte tenu des enjeux sur le marché russe.

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