C'est la première fois que Damas emploie des termes durs envers les forces qui occupent le Nord-Est du pays. Cela rapproche en partie sa rhétorique avec le discours des autorités turques, écrit le quotidien Nezavissimaïa gazeta.
Dans sa lettre le ministère syrien déplore les «crimes» des combattants des Forces démocratiques syriennes (FDS), une alliance multinationale qui a participé à la lutte contre les djihadistes sous l'égide américaine. Le noyau de ces forces est constitué par les Forces de défense du peuple kurdes (YPG).
Le ministère des Affaires étrangères syrien estime que le commandement de l'alliance agit selon des scénarios mis au point par les Etats-Unis et Israël. En combattant au nom de la coalition internationale, les FDS ont commis des crimes de guerre, affirme le ministère. La lettre adressée à Antonio Guterres stipule que les forces gouvernementales syriennes ont l'intention de libérer les territoires occupés par les FDS. Il s'agit du Nord-Est du pays qui demeure dans la sphère d'influence des Etats-Unis.
Les observateurs notent que c'est la première fois depuis le début de la guerre civile que de facto Damas a inscrit les groupes kurdes parmi les terroristes. Le commandement des FDS a déjà réagi aux accusations de Damas. L'alliance a souligné que des milliers de ses combattants ont été tués dans la lutte contre Daech*.
Discours emprunté à Ankara
En grande partie la rhétorique de Damas s'apparente au style des déclarations du gouvernement turc. Ainsi, pendant le sommet au format d'Astana, le Président turc Erdogan a déclaré que l'unique danger pour la Syrie émanait actuellement des FDS, soutenues par les Etats-Unis. Le dirigeant turc a prévenu que si les partenaires américains n'entendaient pas les attentes de la Turquie, elle déciderait elle-même du sort des régions au Nord de la Syrie frontalières avec la Turquie.
«En l'absence d'un accord avec les Etats-Unis d'ici deux semaines, nous serons forcés de créer nous-mêmes une zone de sécurité à l'Est de l'Euphrate en Syrie», a déclaré le dirigeant turc, en pointant «l'inadmissibilité de soutenir les organisations terroristes sous prétexte de lutter contre les combattants».
L'existence d'une «Syrie parallèle» est inadmissible pour le président syrien Bachar el-Assad aussi bien d'un point de vue politique qu'économique, et en ce sens la position de Damas et du «trio d'Astana» (Russie, Turquie, Iran) est similaire», a expliqué Anton Mardassov du Conseil russe pour les affaires internationales.
«Pour la Turquie il est important d'affaiblir le séparatisme kurde», estime l'analyste.
«Ces derniers temps les forces gouvernementales ont renforcé leur présence sur la ligne de contact avec les FDS, mais il est évident qu'un scénario «de front» n'y arrivera pas – seule la pression sur les structures tribales et les Kurdes est efficace. Les démarches sont entreprises dans ce sens depuis longtemps: des réunions entre les représentants des tribus de l'Est ont été organisées plusieurs fois avec l'argent iranien, et des représentants des tribus de l'Euphrate et des délégués des "Forces d'élite syriennes", qui ne font pas formellement partie des FDS, ont assisté au Congrès du dialogue national syrien à Sotchi», a conclu Anton Mardassov.
*Organisation terroriste interdite en Russie
Les opinions exprimées dans ce contenu n'engagent que la responsabilité de l'auteur de l'article repris d'un média russe et traduit en français.