«Ils ont démoli son fauteuil»: un témoignage sur la violente interpellation d’un handicapé à Lille

Depuis le 33e samedi de mobilisation des Gilets jaunes à Lille, plusieurs vidéos avec un contenu bouleversant ont circulé sur le Net montrant un homme en fauteuil roulant recevant des coups de matraque de la part de policiers, puis traîné par terre. Une témoin, qui a filmé l’une des vidéos, a raconté à Sputnik la chronologie des faits ce jour-là.
Sputnik

Juste avant les instants immortalisés sur la vidéo, avant l’interpellation musclée où un handicapé a été «pris par les cheveux, mis au sol et ensuite traîné», Charlène Hugot avec ses camarades Gilets jaunes vivait un cortège «très répressif». Contactée par la rédaction de Sputnik, elle se rappelle ce qui est survenu précisément pendant cette arrestation.

Début de la scène

En fin de cortège, les forces de l’ordre ne poussaient pas les manifestants, mais donnaient «des coups de bouclier, on essuyait des insultes, ils essayaient de nous faire des chassés avec leurs jambes pour qu’on tombe». À un moment, Charlène, qui fait partie des Mariannes de France, a aperçu un groupe de Gilets jaunes amassés autour d’une personne – blessée, comme elle le pensait au premier instant après qu’on venait de gazer la foule.

Dans l’agitation et la bousculade, sa chaise roulante n’était pas bien apercevable. Et voilà qu’un agent de police peu compréhensif «l’a attrapé par les cheveux, l’a claqué violemment à terre» avant qu’ils, lui et ses collègues, le traînent par les cheveux, puis «par les bras pour l’éloigner». Scène suivie de la dispersion du reste de la foule «avec le gaz et tout ce qu’ils pouvaient, les matraques». D’autres policiers tentaient également d’empêcher les gens de filmer en les repoussant.

«Ils ont clairement démoli son fauteuil. Il a fait 48 heures de garde à vue, il a été déféré au tribunal hier. Il a refusé sa comparution immédiate et a demandé son report d’audience. Du coup, c’est reporté au 5 août et là il est sous contrôle judiciaire.»

Chefs d’accusation

«Il est accusé de violence sur quatre personnes dépositaires de l’État, de rébellion outrage à un agent», explique la manifestante. «Ils oublient de préciser qu'après avoir fermé le fourgon, il a pris un coup de poing en plein visage, il a été matraqué, des constatations sont plus que visibles sur le bras et les cotes et il a les traces au niveau de la gorge, suite à son interpellation.»

«Il est vraiment marqué, ils n’y ont pas été de main morte», poursuit-elle. «Voilà un homme handicapé ultraviolent comme on voit dans la vidéo, pour moi les images parlent.»

LBD, convulsions, matraquages et «personnes avec le crâne ouvert»

La manifestation était déclarée jusqu’à 18 heures. Aux environs de 17h00, «ils [les policiers] nous poussent, nous forcent, nous insultent pour qu’on avance», raconte Charlène. «La violence c’est de pire en pire.»

Une autre scène s’est produite ce même jour: un père de famille a été «attrapé par le coup par cinq officiers, traîné sur le sol, son fils poussé à terre», alors qu’il tentait d’expliquer, énervé, que sa femme ne se sentait pas bien.

Cet homme «interpellé puis relâché dans les minutes suivantes doit se rendre chez le médecin, sa gorge est complètement enflée car il était tenu par le cou», ajoute Charlène.

Lors de cette 33e mobilisation à Lille, les street medics ont décompté deux blessés par des tirs de LBD. Il y a eu des «coups de matraque, du gazage à bout portant qui a entraîné des convulsions chez un garçon belge d’ailleurs et chez une autre dame aussi. Il y a eu des personnes avec le crâne ouvert chez des gens qui sont venus juste venir voir s’ils peuvent nous aider parce que ça devient n’importe quoi», raconte-t-elle.

«C’est vraiment épuisant parce qu’en fait le droit de manifester n’existe plus, il y a trop de répression, on n’a plus le droit de rien», résume la manifestante.

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