«Les écologistes doivent être les fédérateurs, les rassembleurs», selon Michèle Rivasi

Une troisième place inespérée. Ce scrutin européen aura apporté son lot de surprises. EELV en fait partie: distancés dans les sondages, les écologistes sont pourtant la 3e force politique en France. Sputnik s’est entretenu avec Michèle Rivasi, députée européenne réélue, afin de comprendre les raisons de cet engouement pour les «Verts».
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Une vague verte a soufflé sur les élections européennes. À la grande surprise, notamment des instituts de sondages, Europe Écologie Les Verts (EELV), occupe la troisième place du podium, devançant de loin Les Républicains (8,5%) et La France insoumise (6,3%). Après les nombreuses marches pour le climat dans tout l'hexagone, les partis politiques qui se sont laissés tenter par le «green washing», ce score de 13%, bien qu'il ne soit pas historique pour les Verts, démontre l'importance que revêt l'écologie chez les Français.

Michèle Rivasi, députée européenne EELV fraîchement réélue, s'est entretenue avec Sputnik France afin de partager sa satisfaction de voir les écologistes revenir sur le devant de la scène.

Sputnik France: Avec votre score, vous devenez la 3e force politique en France; êtes-vous surprise et comment expliquez-vous ce succès?

Élections européennes: paysage de ruines après la bataille
Michèle Rivasi: «Je suis agréablement surprise, on le sentait sur le terrain, mais les sondages ne confirmaient pas cette sensation. On l'explique de la manière suivante: le Président de la République a voulu faire un duel entre le Rassemblement national et son parti, entre les "nationalistes" et les "progressistes", nous, nous n'étions pas du tout dans un combat franco-français.
Nous, on parlait d'Europe, on voulait changer l'Europe, mais avec une Europe qui tienne compte des urgences actuelles, que ce soit le changement climatique, la perte de biodiversité, le problème des migrants, etc. Les gens se sont dit autant voter "écolo", puisque tous ces grands changements, toute cette transition qu'il faut réaliser, c'est à l'échelle européenne que cela doit se faire. En plus, cela donnait une note d'espoir, car ce n'était pas un vote "contre", mais un vote "pour". Je trouve ça super, je tiens à remercier les électeurs sur ce point.»

Sputnik France: Un des points intéressants dans vos résultats est le vote de la jeunesse, chez qui vous êtes en tête [chez les 18-34 ans selon les estimations Ipsos/Sopra Sterria, ndlr]. Pourtant, au premier tour des Présidentielles de 2017, les jeunes avaient voté en priorité pour le Rassemblement national, la France insoumise ou encore la République En Marche. Comment expliquez-vous ce revirement de situation?

Action des écologistes de l'ANV COP 21 à Paris (vidéo)
Michèle Rivasi: «C'est la mobilisation des jeunes dans la rue. Ils se disent que le dérèglement climatique, c'est maintenant. Ils se posent des questions sur leur avenir et ils savent pertinemment, par exemple, que les gaz à effets de serre ne sont pas nationalisés, que ça n'a pas de frontière et que c'est vraiment à l'échelle européenne que l'on peut résoudre cela. Ils ont compris les enjeux européens.»

Sputnik France: Au parlement européen justement, allez-vous créer des alliances avec d'autres groupes afin de pousser les thématiques écologiques sur le devant de la scène ou bien ce sera des alliances au coup par coup selon les enjeux?

Michèle Rivasi: «Pour l'instant, nous allons faire des alliances au coup par coup. Néanmoins, tout cela va se décider ce mercredi, car il y a une rencontre au niveau du groupe EELV. À ce moment-là, il y aura toute la discussion sur les stratégies éventuelles à mettre en place. De toute façon, maintenant, on peut acter le fait qu'il n'y aura pas de coalition PPE et S & D, donc ça, c'est un acquis. Désormais, soit il y a une autre coalition qui va se créer et qui sera plus à gauche, soit il n'y aura pas de coalition et ce sera à géométrie variable suivant la nature du projet.»

Sputnik France: Sur le plan national, pour porter la voix des Verts, faut-il rassembler les forces politiques de gauche? S'allier avec la majorité? Ou simplement devenir une force politique autonome en vue des prochaines élections?

Michèle Rivasi: «Ce troisième pilier que l'on a montré par ces élections européennes va être un élément moteur pour les prochaines municipales et régionales. C'est-à-dire qu'il va falloir faire un projet au niveau de ces municipales, sachant que c'est l'écologie politique qui va être la matrice en quelque sorte de ce celui-ci. Je pense ces élections sont importantes, puisqu'elles montrent qu'il y a une autre voie que la gauche traditionnelle et que la droite traditionnelle. C'est une stratégie à la Macron, il a siphonné à la fois les voix du Parti socialiste et les voix des Républicains.
Vu les défis auxquels on est confronté, maintenant ce sont les écologistes qui doivent être les fédérateurs, les rassembleurs, sachant que c'est ce projet qui répond aux dérèglements climatiques qui doit enclencher des villes en transition. Cependant, on ne le fera pas tous seuls, donc c'est à nous d'être une force qui agrège des gens qui veulent construire un nouveau projet, mais dont l'écologie sera maîtresse.»

Sputnik France: De plus en plus de partis politiques ont essayé de surfer sur la thématique écologique à des fins électoralistes. Comment allez-vous réussir à continuer d'incarner la défense de l'environnement?

Le groupe européen de LREM bénéficie du financement d’un fabricant du glyphosate
Michèle Rivasi: «Les autres partis se sont dit "on va verdir notre discours". On l'a bien vu, ils ont rajouté des gens qui étaient un peu incompatibles avec les personnes déjà présentes sur les listes. On le voyait bien avec celle de la République en marche où se côtoyaient les pro-glyphosates et les anti-glyphosates, les pro-nucléaires et les anti-nucléaires. C'était vraiment un casting à 180 degrés. Le fait qu'il y ait une prise de conscience européenne sur la dimension environnementale, de son urgence, s'il y a des gens de différents partis qui sont capables de nous appuyer suivant les projets, c'est une très bonne chose.
Ce sont les problématiques qui vont rassembler les gens, c'est cette stratégie qu'il faut avoir au niveau de notre parti vert. Il va falloir qu'on lance des actions et qu'autour de ces actions que les gens se réunissent.»

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