«Instrumentalisation, contrôle et influence», comment le Qatar exploite l’islam

Le Qatar finance depuis des années l’islam dans toute l’Europe. En se servant des Frères musulmans comme relais d’influence, ce prosélytisme religieux sert-il les intérêts stratégiques de l’émirat, en proie à un véritable conflit face à ses voisins du Golfe? Réponse dans Désalliances l’Entretien, avec Christian Chesnot, coauteur des Qatar papers.
Sputnik

Si le Qatar est connu en France pour ses nombreux investissements dans l’industrie, l’immobilier, les médias ou encore le sport, le richissime émirat gazier a aussi arrosé, à coups de millions d’euros, l’islam en France. Mais avec quelles réelles intentions et dans quels buts?

Désalliances l’Entretien a reçu Christian Chesnot, journaliste à France Inter et grand reporter. Ce spécialiste du Moyen-Orient a publié en avril dernier chez Michel Lafon, en collaboration avec son compère du Figaro, Georges Malbrunot: Qatar Papers: Comment l’émirat finance l’islam de France et d’Europe.

Cet ouvrage est une enquête extrêmement approfondie, remplie de révélations sur l’influence de l’émirat, en Europe et en France en particulier. Grâce à un lanceur d’alerte qui leur a fourni des centaines de documents, les deux journalistes nous apprennent que l’émirat gazier subventionne 140 projets à travers toute l’Europe par l’intermédiaire de l’ONG Qatar Charity. Financements intensifs de mosquées-cathédrale à Mulhouse et à Strasbourg, de centres islamiques à Villeneuve-d’Asq et de structures éducatives à Lille et à St-Léger-de-Fougeret, acquisition de centres sociaux et de biens immobiliers à Bagnolet… une liste qui est très loin d’être exhaustive. En effet, le Qatar a investi des millions d’euros dans plus d’une vingtaine de projets en France.

L’ONG Qatar Charity est présentée comme une organisation non gouvernementale d’aide au développement et d’aide humanitaire, officiant dans plus de 150 pays à travers le monde. Mais d’après les révélations de Christian Chesnot et de Georges Malbrunot, l’organisation, soutenue en sous-main par Doha, a cherché à influencer, à de fins politiques, l’islam et les musulmans de France. Son principal vecteur: la confrérie panislamiste des Frères musulmans, que Doha a soutenue autant qu’elle soutenait les projets du Qatar.

Mais cette stratégie ne se limite pas seulement à la France ou à l’Europe. En effet, les enjeux de cet investissement massif sont, à long terme, mondiaux puisque l’Émir Al-Thani se voyait dès 2011 comme «le chef des croyants». Et dans une période où le Qatar subit le blocus de ses puissants voisins, ce financement poursuit également des buts géopolitiques régionaux.

Focus sur un investissement à but religieux, mais à des fins politiques, au moment même où Emmanuel Macron martèle qu’il se veut «intraitable» face à «l’islam politique».

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