Ce qui se cache derrière la diversion navale dans le golfe d'Oman

La décision du secrétaire d'État américain Mike Pompeo d'annuler sa visite à Moscou le 13 mai pour se rendre à Bruxelles afin de s'entretenir avec ses homologues européens a coïncidé avec une provocation militaire dans le golfe d'Oman, qui a alarmé les pays du golfe Persique.
Sputnik

Quatre navires commerciaux ont été victimes d'une «opération de diversion» dans les eaux territoriales des Émirats arabes unis (EAU). Les monarchies arabes ne désignent pas le coupable mais tout prête à croire que la situation actuelle ne joue pas en faveur de l'Iran, qui subit actuellement une forte pression des États-Unis, écrit la quotidien Nezavissimaïa gazeta

La question iranienne était au centre de la réunion du Conseil de l'UE au niveau des ministres des Affaires étrangères le 13 mai.

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Depuis que Washington a durci les sanctions anti-iraniennes et que Téhéran a réagi en suspendant partiellement ses engagements dans le cadre de l'accord nucléaire, les autres signataires de l'accord se sont demandés comment ils allaient maintenir toutes les ententes.

La troïka européenne (Royaume-Uni, Allemagne, France) a appelé l'Iran à remplir totalement les termes de l'accord, tout en condamnant les mesures restrictives extraterritoriales américaines. Pour autant, aucune stratégie commune définissant comment agir dans les conditions d'une forte pression des autorités américaines n'est ressortie de ces pourparlers.

Les ministres européens n'ont pas non plus été rassurés par la visite non annoncée de Mike Pompeo le 13 mai en Belgique. Le secrétaire d'État a subitement modifié le calendrier de sa visite en Russie, préférant se rendre à Bruxelles avant les pourparlers de Sotchi qui ont finalement eu lieu le 14 mai — ce qui a semé la confusion chez ses partenaires de l'UE.

Les communiqués sur les quatre navires commerciaux naviguant sous différents pavillons attaqués dans les eaux des EAU étaient tout aussi inattendus. Le secrétaire général du Conseil de coopération du Golfe (CCG) Abdellatif ben Rachid al-Zayani a condamné les «diversions» organisées par des malfaiteurs inconnus. Dans sa déclaration, publiée sur le site officiel du CCG, il souligne notamment:

«Cela pourrait renforcer la tension et les conflits dans la région, ainsi que porter atteinte aux intérêts de la population locale». La déclaration du secrétaire général de la Ligue arabe Ahmed Aboul Gheit concernant l'incident dans le golfe d'Oman a dévoilé l'appartenance de deux navires attaqués.

«Le secrétaire général a fermement condamné les subversions visant quatre navires commerciaux à proximité des eaux territoriales des EAU, notamment deux cargos pétroliers saoudiens dans le golfe Persique», a annoncé le service de presse d'Ahmed Aboul Gheit.

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L'incident s'est produit à proximité du port de Fujaïrah (EAU), à seulement 140 km du détroit d'Ormuz que l'Iran a promis plusieurs fois de bloquer en cas d'usage disproportionné de la force par l'Amérique. La veille, les États-Unis avaient décidé de renforcer leur présence militaire à proximité des frontières iraniennes. Les principaux membres du CCG ne désignent pas l'éventuel responsable des tirs, mais le contexte de l'incident qui s'est produit ne promet rien de bon à Téhéran.

Il paraît également étrange que les communiqués sur les «diversions» ont été précédés par les annonces d'agences iraniennes concernant des explosions à Fujaïrah — qui n'ont pas été confirmées.

Le ministère iranien des Affaires étrangères a presque immédiatement appelé à élucider les détails de l'incident. Son porte-parole Abbas Musawi n'a pas exclu un «complot organisé par des personnes malveillantes» pour saper la stabilité et la sécurité du golfe d'Oman.

Les experts supposent que si les communiqués sur les provocations étaient véridiques, le cercle des exécutants éventuels ne serait pas très grand.

«En admettant que l'information sur les diversions soit vraie, et qu'il ne s'agisse pas d'une étrange couverture pour créer une crise artificielle autour de l'Iran, comme le fait actuellement Washington, l'implication des Houthis (les rebelles yéménites proches de l'Iran) avancée par certains activistes arabes sur les réseaux sociaux pourrait être balayée. La région en question — le golfe d'Oman — est trop éloignée du Yémen. De toute évidence, il s'agit d'une allusion aux forces iraniennes, aussi bien à la marine qu'au Corps des gardiens de la révolution islamique, car cette région est leur zone de responsabilité conjointe. Les Iraniens pourraient réaliser de telles opérations de diversion, mais la question est de savoir pourquoi ils le feraient maintenant. Bien qu'hypothétiquement ils soient prêts à faire monter la mise dans cette situation, comme l'indiquent les menaces constantes de bloquer le détroit d'Ormuz», a déclaré Anton Mardassov, expert du Conseil russe pour les affaires internationales.

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L'analyste rappelle qu'à proximité du lieu de l'incident étaient prévus des exercices militaires russo-iraniens. Le commandant de la marine iranienne, l'amiral Hossein Khanzadi, a réaffirmé hier ces plans des deux pays.

«Loin de moi l'idée qu'on chercherait ainsi à empêcher les exercices, même si quelqu'un avancera forcément cette version. Mais je pense que cette longue pause pour nommer le «responsable» [de l'attaque des quatre cargos, ndlr.] n'est pas due au hasard. Elle ne fait qu'attiser l'intérêt pour la situation. Une autre question est que ce sont les médias iraniens qui ont été les premiers à diffuser des communiqués sur des explosions de cargos — cette situation pourrait être nécessaire dans le contexte de l'ordre du jour intérieur en Iran», conclut Anton Mardassov.

Les opinions exprimées dans ce contenu n'engagent que la responsabilité de l'auteur de l'article repris d'un média russe et traduit dans son intégralité en français.

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