Pourquoi un nouveau réseau
«Quand on parle de 5G, on met l'accent sur la vitesse élevée du transfert de données, et c'est la vidéo qui vient immédiatement à l'esprit. Mais l'internet mobile propose déjà des vidéos en haute définition. L'avantage principal de la nouvelle technologie est qu'elle constituera un canal de liaison fiable avec un temps de réponse minimal. Environ 15-20% du trafic internet est occupé par l'information de service, les signaux de commande. La manière dont ils fonctionnent est déterminée par le standard de communication, dont dépend aussi la vitesse d'échange. Avec la 5G, le trafic de service est plusieurs fois plus rapide qu'avec le réseau de la génération précédente. Autrement dit, la requête est traitée 4 à 5 fois plus vite. C'est primordial pour le contrôle des robots en temps réel, sans délai», explique Maxim Jarenov, directeur du développement international et de l'accélération du secteur informatique de la fondation russe Skolkovo.
L'infrastructure de la 5G
Les smartphones actuels ne peuvent pas utiliser la 5G. Leur module principal, un modem radio doté d'un processeur à signal, est prévu pour fonctionner dans un autre diapason (la 3G et la 4G utilisent des fréquences inférieures à 2,5 GHz), avec un autre protocole de base. Il est impossible de moderniser les anciens téléphones ou de remplacer une pièce à part: il faut inventer un nouvel appareil.
Mais cette question est pour plus tard. Avant de déployer le réseau mobile de nouvelle génération, il faut libérer les fréquences nécessaires pour celui-ci.
«Conformément aux accords internationaux, il est prévu d'utiliser pour la 5G les fréquences de 3,4 à 3,8 GHz, 6, 25 à 28 GHz et au-delà. Mais chaque pays a ses propres plans, ses idées sur ce qui doit être utilisé et dans quel but, et souvent ces fréquences sont déjà occupées. Il faut procéder à une normalisation et à l'attribution de fréquences pour que les opérateurs mobiles commencent à construire l'infrastructure pour le nouveau standard», poursuit Maxim Jarenov.
L'attribution de fréquences est toujours un travail très long et laborieux, qui nécessite d'importantes dépenses. Par exemple, certaines chaînes satellites fonctionnent déjà sur la fréquence 3,5-4,2 GHz, et plusieurs fréquences sont réservées aux besoins étatiques et militaires.
«La conversion des fréquences a été réalisée en Russie pour la 4G. La même chose doit être faite pour la 5G. Mais cette question restera floue tant que le ministère de la Défense ne se penchera pas dessus. Il faudra probablement remplacer certains systèmes militaires ou libérer ces fréquences. Puis sera lancé un appel d'offres pour l'attribution des fréquences aux opérateurs mobiles. Les plus grands d'entre eux pourront former des consortiums afin d'optimiser les investissements à l'étape initiale de construction des réseaux», explique l'expert.
Les tours, piliers en ville et stations de base constituent le gros de l'infrastructure. Pour la 5G, le rayon de la cellule, c'est-à-dire la distance minimale entre la station de base et l'abonné, est compris entre 80 et 100 mètres. A titre de comparaison, ce chiffre s'élève jusqu'à 500 mètres pour la 4G et jusqu'à 1 km pour la 3G.
La densité plus élevée du réseau cellulaire est le prix à payer pour la fiabilité de la connexion à haut débit et une meilleure résistance aux parasites — ce qui est important pour la ville avec ses nombreuses sources de bruit radioélectronique. Plus la fréquence est élevée, plus la vitesse d'échange de données l'est. En même temps, le signal s'atténue plus rapidement, c'est pourquoi le rayon de la cellule est réduit.
A quoi sert la 5G pour les utilisateurs
Les gadgets deviendront plus sensibles à nos requêtes et commandes. Des centaines de capteurs reliés en réseau seront intégrés dans les vêtements, les meubles et les murs des logements, qui optimiseront l'éclairage, le chauffage, contrôleront l'alarme, les appareils ménagers, ou encore avertiront de l'approche d'une voiture sur la route.
Les technologies de réalité augmentée ou virtuelle bénéficieront d'un nouveau souffle. Par exemple, il sera possible d'envoyer son profil numérique au bureau pour une réunion ou participer à une soirée avec des amis tout en se trouvant à des kilomètres d'eux. Les gants tactiles permettront de prendre dans ses bras un proche via internet.
«Je pense que l'évolution portera avant tout sur l'internet des objets et les villes intelligentes. Il existe de nombreuses tâches pertinentes dans les services communaux. Les arrêts de bus, les paliers d'immeuble, les interphones — tous les services municipaux pourront utiliser le réseau de nouvelle génération. Les voitures autonomes apparaîtront plus tard. Hormis la télémétrie et la connexion entre les voitures, il est nécessaire de créer un modèle d'entreprise clair, il faut comprendre comment cette technologie fonctionne du point de vue de la sécurité de la circulation», ajoute Maxim Jarenov.
Une locomotive de développement
«La 5G est une technologie extrêmement avancée. Des protocoles complexes sont mis au point, et le noyau du réseau est modernisé d'un point de vue logiciel. C'est une bonne motivation pour le développement de cette nouvelle industrie, la création de nouveaux emplois pour des spécialistes hautement qualifiés, la coopération internationale — c'est donc un autre facteur qui contribue au développement de l'économie», conclut Maxim Jarenov.
L'an dernier, le parc technologique de Skolkovo a mis à disposition un territoire pour un polygone d'essai de la 5G. La connexion a été assurée par la compagnie Nokia. Conjointement avec l'institut NAMI, la compagnie KamAZ a conçu un bus autonome transportant des passagers comme une navette. A présent, ce polygone est utilisé par la société Yandex afin de tester des robots-taxis.
La fondation Skolkovo mène des négociations actives sur la coopération avec la compagnie chinoise Huawei, qui se positionne comme le leader du déploiement de réseaux 5G dans le monde.