«Le dispositif SAM (analyse d'échantillons sur Mars) a trouvé des traces de nitrates dans le sol de Mars au cours des premières années de travail du rover Curiosity. Cette découverte était cruciale du point de vue de l'astrobiologie car, l'atmosphère de la Planète rouge ne contenant que très peu d'azote, les nitrates du sol pouvaient être la seule source de vie à sa surface. Nous avons découvert leur origine», a déclaré Christopher McKay du Centre de recherche Ames de la NASA.
Quand le rover Curiosity a effectué les premières analyses de la composition de l'air et du sol de Mars en 2012 et en 2013, les chercheurs n'ont pas réussi à y trouver des traces de méthane, dont des molécules avaient été retrouvées dans l'atmosphère de la planète par la sonde Mars-Express en 2004. Cependant, quelques mois plus tard, les capteurs du rover ont enregistré plusieurs sursauts dans la concentration de méthane.
Il y a un an, après de longs débats et de nouvelles vérifications, l'appareil de la NASA a confirmé ses mesures initiales et a fait une découverte incroyable: des molécules organiques «antiques» dans l'épaisseur de la roche de précipitation au fond d'un lac asséché. Sa découverte a poussé les scientifiques à songer sérieusement à la manière dont étaient apparues ces molécules à la surface supposément froide et inerte de Mars.
Christopher McKay et ses collègues ont découvert par hasard le mécanisme éventuel de formation de différentes particules organiques nitreuses retrouvés par Curiosity dans le cratère Gale, en vérifiant les données obtenues par le rover lors de l'analyse de tous les échantillons à l'intérieur du laboratoire chimique SAM.
Les auteurs de l'article ont tenté de régler ce problème en partant du contraire: ils ont reproduit les résultats de mesure du SAM en créant des échantillons artificiels de l'atmosphère et du sol de Mars en observant leur composition et l'interaction entre eux.
En se préparant pour ces expériences, Christopher McKay a noté que l'atmosphère de l'ancienne Mars pouvait contenir non seulement de grandes quantités de dioxyde de carbone, mais également un autre gaz à effet de serre: l'oxygène moléculaire ordinaire. Selon les estimations actuelles des géologues, l'atmosphère de la Planète rouge a pu être composée à environ 20% de ce gaz avec son niveau d'activité volcanique caractéristique.
La présence d'hydrogène, selon de nombreux théoriciens, devait empêcher la formation d'acide nitrique et contribuer à la naissance d'autres composés comme l'acide cyanhydrique (HCN). Les chercheurs de la NASA ont vérifié si c'était effectivement le cas avec des expériences en laboratoire.
A leur grande surprise, l'addition d'une quantité même infime d'hydrogène ne réprimait pas mais accélérait la formation de molécules d'acide nitrique et nitreux lors d'un «bombardement» de l'analogue du sol de Mars par de puissantes impulsions laser imitant les frappes de météorites.
De tels processus, si l'air de l'ancienne Mars contenait effectivement de grandes quantités d'hydrogène, ont pu conduire à la naissance d'immenses réserves de nitrates. Selon les calculs de Christopher McKay et de ses collègues, leur quantité aurait suffi à recouvrir toute la planète d'une couche de 20 à 60 cm de ces sels.
Cela suffit largement pour expliquer la présence de traces de molécules organiques et de composés d'azote dans le sol du cratère Gale et percer le mystère de la disparition soudaine de leurs traces dans les roches plus jeunes. Quand les volcans ont cessé d'entrer en éruption, l'hydrogène, nécessaire pour la formation de l'acide nitrique, a également disparu, concluent les auteurs de l'article.