Québécois inculpé à Cuba: «le Canada ne protège pas ses ressortissants»

En juillet 2017, le Québécois Toufik Benhamiche causait accidentellement la mort d'une touriste canadienne à Cayo Coco, à Cuba. Depuis, il est retenu sur cette île dans l'attente de son procès. En entrevue avec Sputnik, il déplore la lenteur du système judiciaire cubain et dénonce l'inaction des autorités canadiennes.
Sputnik

En juillet 2017, le Québécois Toufik Benhamiche était impliqué dans un accident nautique, dans la station balnéaire de Cayo Coco, à Cuba. M. Benhamiche se trouvait en vacances avec sa femme et ses deux filles, qui étaient alors âgées de 5 et 7 ans. Sur la plage, M. Benhamiche décide de louer une embarcation pour naviguer dans les environs.

Il part avec ses deux filles et sa femme mais rapidement, le Québécois perd totalement le contrôle de son bateau à moteur. C'est alors qu'il happe une touriste qui se trouvait sur une autre embarcation de même type. Environ 40 minutes plus tard, le décès de la Canadienne Jennifer Ann Marie Innis est constaté à l'hôpital. Cette femme vivait en Ontario avec ses trois enfants. Une véritable tragédie.

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Le 10 décembre dernier, Toufik Benhamiche a de nouveau été condamné à une peine de quatre ans de prison par la justice cubaine. De nouveau, car le Québécois n'en était pas à son premier procès. M. Benhamiche avait déjà été reconnu coupable de négligence criminelle causant la mort, mais ce verdict avait été annulé en juin 2018 par la Cour suprême de Cuba. M. Benhamiche n'est pas incarcéré, mais est assigné à résidence sur le territoire cubain dans l'attente d'un verdict final. Selon lui, les autorités cubaines reconnaissent en partie son innocence, mais cherchent à protéger la compagnie de location de bateaux, qui appartient à l'État.

M. Benhamiche ne s'explique pas que la compagnie de location de bateaux ait été exemptée de procès, alors qu'il doit lui-même faire face à la justice. Il estime que les consignes de sécurité n'étaient pas claires et donc que la compagnie locale détient une certaine responsabilité dans l'affaire. Lors d'une audience, un capitaine de la marine cubaine aurait affirmé que ce type de bateau ne pouvait accueillir quatre personnes, ce qui n'aurait pas été mentionné au vacancier québécois.

M. Benhamiche a aussi intenté des poursuites contre la compagnie Sunwing, un voyagiste canadien, qui fait affaire avec le loueur de bateaux en question. Le Québécois aimerait que l'on reconnaisse la responsabilité des autres parties. «Ce serait le minimum», a plaidé le principal intéressé au micro de Sputnik.

«Au mois de mai 2018, nous avons réclamé 341.000 dollars [canadiens, soit 218.000 euros, ndlr] à Sunwing, mais c'est un montant temporaire. Quand je vais rentrer au Canada, on va revoir ce chiffre. Les dommages ont été multipliés depuis ce temps», a affirmé Toufik Benhamiche en entrevue avec Sputnik.

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M. Benhamiche déplore surtout l'inexistence de la notion d'homicide involontaire à Cuba. Une notion juridique qui lui permettrait de faire avancer sa cause beaucoup plus rapidement. «Ils appellent ça, ici à Cuba, homicide par imprudence, alors qu'on aimerait qu'ils reconnaissent la notion d'homicide involontaire», a affirmé M. Benhamiche, qui dit toutefois comprendre que les lois ne puissent pas être partout les mêmes.

Homicide involontaire ou homicide par imprudence?

M. Benhamiche est inquiet pour son avenir, mais demeure optimiste. Malgré la lenteur du processus judiciaire, l'ingénieur de 47 ans reste convaincu que les charges qui pèsent contre lui seront levées. Il dit aussi avoir reçu le soutien de plusieurs Cubains. Actuellement, le Québécois doit séjourner à Ciego de Ávila, une petite ville du centre de l'île.

M. Benhamiche pense que sa femme et lui ont réussi à convaincre une majorité de Canadiens de son innocence. Ce qui lui donne également espoir. Au début de mois de décembre, une manifestation en soutien à la famille de Toufik Benhamiche a été organisée à Montréal. L'objectif: réclamer l'intervention du gouvernement canadien et sensibiliser l'opinion publique à son histoire.

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Les autorités cubaines pourraient finir par considérer cette opération médiatique, étant donné l'importance de l'industrie touristique dans l'île. Chaque année, ils sont plusieurs milliers de Canadiens à se rendre à Cuba. En 2016, le ministère du Tourisme cubain a enregistré une année record et les Canadiens figuraient parmi les plus importants contingents de touristes avec les Allemands, les Anglais, les Américains, les Français et les Italiens.

«Moi, je n'ai pas peur d'aller en prison, et je vais vous dire pourquoi. Étant donné que j'ai démontré mon innocence vis-à-vis de l'opinion publique, je suis plutôt optimiste. Depuis que ma femme et moi avons commencé à médiatiser l'affaire, au mois d'avril 2018, la réponse a été positive», a souligné M.Benhamiche.

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Toufik Benhamiche déplore aussi l'inaction du gouvernement canadien.

«Le Canada ne protège pas ses ressortissants: Cuba protège ses citoyens, alors que le Canada ne le fait pas», a-t-il affirmé.

Depuis plusieurs mois, sa conjointe et lui ont multiplié les démarches auprès des autorités canadiennes, et en particulier auprès du ministre des Affaires étrangères, Chrystia Freeland. À l'été 2018, ils ont déposé une requête auprès de la Cour fédérale pour que le Canada leur vienne en aide. Un coup de pouce qui se fait toujours attendre.

 

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