«De notre côté, il n'y a pas de trêve prévue.»
Charlotte, maman d'un petit garçon et Gilet jaune azuréenne annonce la couleur: pas question de ralentir la cadence, même pendant cette période de Noël. Et il semble que l'exécutif ait pris la mesure de la situation. Comme le révèle Le Parisien, le Premier ministre Edouard Philippe a demandé à ses ministres de rester sur le qui-vive:
«Tout le monde a besoin de repos, coupez un peu. Mais ne partez pas trop loin quand même, au cas où…»
Pourtant, les motifs d'espoir sont là pour le gouvernement. D'après les chiffres officiels du ministère de l'Intérieur, l'acte VI des Gilets jaunes a beaucoup moins rassemblé que le précédent. Le 22 décembre, 33.600 manifestants étaient recensés en fin de journée contre 66.000 une semaine avant. De plus, dans plusieurs villes, les contestataires ont décidé de faire une pause. Comme le souligne L'Indépendant, les Gilets jaunes de Carcassonne souhaitent mettre en parenthèse leur action le temps des fêtes. «On fait la trêve de Noël», expliquait le 23 décembre au quotidien Philippe Fougères, porte-parole du collectif «Carcassonne en colère».
Mais tous les Gilets jaunes ne sont pas prêts à relâcher la pression, même durant les derniers jours de décembre. Charlotte explique que sur la Côte d'Azur, ils resteront mobilisés:
«Il y a plusieurs opérations organisées ce 24 décembre comme des distributions de jouets prévue à l'hôpital Lenval de Nice et des blocages de ronds-points. On met également en place des opérations de solidarité comme l'accueil d'une personne seule à notre table à Noël, etc. Il y a déjà des appels à l'acte VII sur les Champs-Elysées lancés sur les réseaux sociaux. Même chose pour le nouvel an. Ceci étant dit, je pense qu'il est tout à fait normal que ça ralentisse un peu car les gens vont se retrouver en famille. Mais le combat reprendra de plus belle une fois les fêtes passées.»
Grégoire*, fonctionnaire et de toutes les mobilisations parisiennes depuis le début du mouvement, partage cet avis: «Continuer les actions c'est bien, tant mieux s'il y en a encore qui sont menées un peu partout, mais il faut bien se douter que ça mobilise moins de monde en raison du calendrier et de la fatigue. Une baisse temporaire de l'intensité de la lutte est logique en cette période.»
«Nous sommes vraiment en train de nous organiser. Concrètement, lors de la dernière manifestation, j'ai rencontré un Gilet jaune qui était équipé en matériel. On a maintenant sur nous une visseuse qui nous permet de mettre hors service des barrières de parking sans rien casser. Pour janvier, nous avons pour projet de former une petite équipe et d'agir plus souvent. Cela ne suffit plus d'être actif que le samedi. Je compte être beaucoup plus impliquée après les fêtes. Je suis persuadée que nous repartirons encore plus forts. De toute façon, je ne lâcherai rien tant que nous n'obtiendrons pas le référendum d'initiative citoyenne.»
Une Saint-Sylvestre à très haut risque
Si les débordements qui ont eu lieu le 22 décembre étaient sans commune mesure avec ceux du 24 novembre, notamment dans la capitale, plusieurs scènes de violence ont émaillé les rassemblements. Une scène a particulièrement marqué les esprits: celle des policiers à moto sur les Champs-Elysées en train d'en découdre avec des manifestants. Ces derniers ont poussé à terre l'une des motos des forces de l'ordre avant de leurs jeter pavés et trottinettes dessus. Dans la confusion, l'un d'entre eux a brièvement dégainé son arme. Le 24 décembre, ils ont eu droit à la visite du Premier ministre. Edouard Philippe a notamment appelé à «un retour à l'ordre» et a affirmé qu'«au fur et à mesure qu'il dure, ce mouvement se traduit par une radicalisation d'une grande violence».
«La date qui nous inquiète le plus du côté de notre syndicat est le 31 décembre. À chaque fois, la police a beaucoup de mal à maintenir l'ordre lors de la Saint-Sylvestre. Je m'étonnerais fortement que les Gilets jaunes n'appellent pas à une action pour cette date symbolique, d'autant plus que le lendemain est un jour férié.»
Et Grégoire ne dit pas autre chose: «On peut aussi utiliser le calendrier à notre avantage: l'idéal serait de lancer une mobilisation générale le soir de la Saint-Sylvestre.»
*le prénom a été changé