Ce vendredi 14 décembre le parlement kosovar a adopté des lois portant sur la transformation de la Force de sécurité du Kosovo en armée nationale à part entière. Cet événement ne serait pas possible sans la ferveur avec laquelle l'Occident, et la France en premiers rangs, s'est dressé, à la fin du siècle dernier, à la défense de la cause kosovare contre l'«immondicité» des Serbes, au premier chef du Président yougoslave Slobodan Milosevic.
Jacques Chirac était en première ligne des défenseurs de cette cause kosovare. Dès janvier 1999, à deux mois du début des bombardements de la Yougoslavie, il a été annoncé à l'issue de son entretien avec le Premier ministre britannique Tony Blair qu'«avec leurs partenaires, ils renforceront leurs efforts pour atteindre les objectifs de la Communauté internationale: l'arrêt de la répression au Kosovo… et un accord politique donnant l'autonomie substantielle au Kosovo».
Après le début des bombardements, M. Chirac ne manquait nulle occasion pour s'exprimer à ce sujet. En mai 1999, dans son cinquième discours sur l'opération en Yougoslavie, il a déclaré que les Occidentaux étaient plus déterminés que jamais à continuer les bombardements «24 heures sur 24» pour stopper la «gangrène de l'innommable».
Dans le même discours il s'en est pris à Slobodan Milosevic en personne dénonçant sa «volonté méthodique d'effacement de tout un peuple» et lui imputant «des pratiques qui rappellent les heures les plus sombres de la barbarie».
«Accepter les horreurs dont nous sommes les témoins, ce serait perdre notre âme, ce serait laisser la gangrène de l'innommable s'installer à nouveau sur notre continent», a-t-il martelé en direct de l'Elysée.
Bombardant les civils pour punir une seule personne, leur Président, Jacques Chirac a cependant invoqué la morale et les droits des nations.
«Le combat d'aujourd'hui est exemplaire, il n'est pas fondé sur des considérations économiques ou stratégiques», mais sur une certaine idée de la «morale» et du «droit des nations», a-t-il expliqué aux générations qui n'ont pas connu la guerre.
Des centaines d'articles et ouvrages ont été publiés pour alerter sur les raisons pour lesquelles cette opération humanitaro-militaire violait plusieurs lois et conventions internationales.
Neuf ans plus tard, en février 2008, Nicolas Sarkozy comptait parmi les premiers à reconnaître l'indépendance autoproclamée du Kosovo.
La présidence de François Hollande n'a pas été riche en événements relatifs au Kosovo, sauf le scandale de l'expulsion de Leonarda à laquelle, selon ses propos, M. Hollande «a gâché la vie».
Le thème du Kosovo a ressurgit en France à l'occasion de la cérémonie du centenaire de l'Armistice de 1918. La Serbie s'est sentie humiliée lors de la cérémonie du centenaire de l'Armistice de 1918 à Paris, et pour cause: sur les photos prises lors des cérémonies, on voit le dirigeant kosovar Hashim Thaçi derrière Vladimir Poutine, Donald Trump, Emmanuel Macron et Angela Merkel, alors que le Président serbe Aleksandar Vucic a été installé en face, dans une autre tribune, exclu du champ des caméras.
La présence de la France est restée assez importante au sein de la MINUK (mission d'administration des Nations unies au Kosovo) et de la KFOR (Force pour le Kosovo de l'Otan), avec plus de 2.000 soldats sur 16.000 (soit le deuxième contingent en importance).
Cette longue histoire de la France en faveur de cette république autoproclamée au détriment de la Serbie a indubitablement contribué à ce qu'une armée locale soit créée, au risque de relancer un conflit qui aurait aujourd'hui des proportions bien plus alarmantes que durant les années 1990.
Emmanuel Macron ne s'est quant à lui pas encore exprimé à ce sujet.