Suite à l'arrestation de la présidente de Huawei au Canada les investisseurs ont compris qu'il était possible de tirer un trait sur la trêve dans le conflit commercial entre les États-Unis et la Chine. Mais pourquoi cette interpellation d'une dirigeante de Huawei constitue-t-elle un précédent très dangereux?
D'après les diplomates occidentaux, il s'agirait d'une violation des sanctions anti-iraniennes: une filiale du géant chinois des télécommunications aurait livré des équipements interdits à Téhéran. Ce fait a été notamment évoqué par le sénateur américain Ben Sasse, qui a remercié ses «partenaires canadiens» pour l'arrestation de Meng Wanzhou.
Le ministère chinois des Affaires étrangères a immédiatement exigé qu'elle soit libérée, menaçant d'une nouvelle escalade de la guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine. Selon le quotidien britannique Financial Times, cette démarche agressive de Washington «sera une épreuve trop dure pour les deux pays», qui ne seront pas en mesure de maintenir leur armistice fragile.
L'effet domino
Ces tendances négatives ont affecté les bourses européennes et asiatiques. L'index des principales entreprises européennes, l'Europe Stoxx 600 a perdu 2,3%, pour arriver à son minimum depuis deux ans. Les marchés de titres de Hong Kong ont chuté de près de 3%. Le Nikkei, index-clé japonais, a perdu 2,3%, alors que le coréen KOPSI a baissé de 1,4%.
Les acteurs du marché sont persuadés que les actions de Washington torpilleront les négociations commerciales, mais provoqueront aussi un ralentissement encore plus important de l'économie américaine en 2019.
La deuxième victime
Les USA ont déjà testé une approche similaire sur la société ZTE, «soeure cadette» de Huawei. En 2016, cette entreprise chinoise avait fait l'objet de sanctions après avoir violé l'interdiction d'exporter des technologies américaines en Iran. La société a consenti à payer une amende de 1,4 milliard de dollars, à licencier quatre dirigeants coupables et à sanctionner 35 employés. Bien que les sanctions aient été levées après le paiement de l'amende, ZTE n'a pas pu éviter une punition plus sérieuse. En effet, Washington a décidé en avril dernier d'interdire aux entreprises américaines de vendre des composants à ZTE pour une période de sept ans.
Un tir de semonce
On a donc compris en avril qu'après avoir écrasé ZTE, les Américains visaient un acteur plus important: Huawei. Le Wall Street Journal indiquait notamment que le ministère de la Justice menait une enquête concernant une «violation des sanctions américaines contre l'Iran par l'entreprise chinoise Huawei».
Comme l'administration américaine l'a déjà annoncé, Huawei «menace le leadership américain dans la course aux technologies mobiles du futur». Aujourd'hui, Huawei est le troisième producteur mondial de smartphones derrière le sud-coréen Samsung et l'américain Apple. Ainsi, les observateurs considèrent l'interpellation de Meng Wanzhou non seulement comme un moyen de freiner l'expansion du géant chinois, mais aussi comme un «tir de semonce» destiné à tous ceux qui «oseraient ignorer» les sanctions américaines.