«Je continuerai à militer contre ce projet en particulier et contre la filière nucléaire en général» confie à Sputnik Angélique Huguin, l'une des militants anti-nucléaires mis en examen sous contrôle judiciaire.
Le 14 novembre, Sputnik avait assisté à l'audience à la Cour de cassation. Nous avions interrogé l'avocat des zadistes, Me Guillaume Lécuyer, ainsi que deux des cinq militants mis en examen, Angélique Huguin et Joël Domenjoud. Ils nous décrivent leurs conditions de vie sous contrôle judiciaire:
«Depuis deux ans, une cinquantaine de procès, une vingtaine de perquisitions, autant d'interdictions de territoire, près de deux ans de prison ferme accumulés, des centaines de mois de prison avec sursis, une trentaine de gardes à vue, sept personnes sous contrôle judiciaire, des milliers d'euros d'amende… Le bilan de la répression des opposants à ce grand projet inutile est impressionnant et le déni démocratique et l'intimidation judiciaire est totale», s'indigne Michèle Rivasi, députée européenne EELV.
Le site Internet Bureburebure.info, animé par les militants opposés au projet de CIGEO (Centre industriel de stockage géologique), tient à jour un compte exhaustif des procès depuis 2013. Il y aurait actuellement «une quinzaine de procès en cours» ciblant des opposants au centre de stockage de déchets nucléaires de Bure. Le bilan dressé par le site fait état d'une cinquantaine de procès depuis 2016, 28 interdictions de territoire, près de deux ans de prison ferme cumulés et des centaines de mois de prison avec sursis.
L'association CEDRA 52 dénonce l'ensemble des contrôles judiciaires dont sont victimes les militants comme des «atteintes graves aux libertés fondamentales».
«Nous dénonçons ici un dispositif contraire aux libertés fondamentales, qui vise à paralyser tout un mouvement de lutte, celui d'opposition à un mégalomaniaque projet de l'industrie nucléaire, dont les travaux menacent de commencer à tout moment», s'insurge l'association de lutte contre le projet de CIGEO.
Les opposants à ce projet dénoncent non seulement son coût important (entre 15 et 36 milliards d'euros), mais surtout les risques écologiques et humains, alors que l'histoire de l'industrie nucléaire a connu plusieurs accidents, dont certains aux conséquences planétaires (Tchernobyl et Fukushima, parmi d'autres).
À Bure, les déchets seraient stockés dans des galeries à environ 500 mètres de profondeur, dans une couche géologique dont il faut s'assurer qu'elle soit stable, dense et étanche. Or, selon les opposants au projet, il serait difficile —sinon impossible- de garantir l'imperméabilité de ces couches profondes sur une durée de 100.000 ans, temps minimal requis pour que la radiotoxicité des déchets les plus radioactifs diminue et ne représente plus une menace pour l'écosystème.
«Au fil du temps, l'eau et l'oxygène dégradent inexorablement l'acier et le béton renfermant les déchets radioactifs, ce qui augmente le risque de fuites et d'explosion. La radioactivité pourrait traverser la couche d'argile et contaminer la nappe phréatique lentement par diffusion ou rapidement via une voie d'eau», alerte le réseau Sortir du nucléaire.
Le document «CIGEO, une faisabilité en question» produit par l'ingénieur Bertrand Thuillier, met en garde contre les risques de «contaminations radioactives qui seront principalement concentrées sur les voies d'accès au site (voies ferrées et gares, en particulier)», mais aussi contre «une pollution atmosphérique multiple constituée de radioéléments gazeux, d'aérosols radioactifs, de poussières, de fumées», sans compter les risques d'accident, d'explosions ou d'incendies, bien plus graves et imprévisibles.