Le ministre serbe du Commerce, Rasim Ljajic, a commenté dans une interview accordée en exclusivité à Sputnik la situation qui semble dégénérer en une guerre commerciale de Pristina contre la Serbie et la Bosnie-Herzégovine.
«Nous nous sommes heurtés dès aujourd'hui [des taxes douanières de 100% frappent depuis hier des produits importés de Serbie et de Bosnie-Herzégovine au Kosovo, ndlr] à la vente, dans le nord du Kosovo, d'articles serbes à des sociétés serbes par des détaillants de Pristina. Il s'agit peut-être de réserves de stock, mais il se pourrait également qu'ils se soient procuré ces articles illégalement pour les revendre maintenant aux Serbes du Kosovo», a-t-il indiqué.
«Il s'agit de 2.660 entreprises, pour la plupart des PME, qui vendent leurs produits sur ce marché. Les petites sociétés encourront de grands préjudices parce qu'il est peu probable qu'elles puissent compenser la perte du marché kosovar. Les grandes entreprises réussiront vraisemblablement à trouver une issue et de nouveaux marchés, mais en général, le préjudice économique sera énorme et dépendra de la période pendant laquelle ces mesures resteront en vigueur», a-t-il expliqué.
À la question de savoir si l'introduction de ces taxes signifie un arrêt complet du flux de marchandises depuis la Serbie vers le Kosovo, Rasim Ljajic a noté qu'aucun fabriquant ne pourrait rester compétitif dans de telles conditions.
«Cela ne fera que contribuer au développement du marché gris, voire noir. Il y aura de la spéculation et des trafiquants qui profiteront de la situation pour gagner gros. Celui qui a voulu bloquer le commerce entre la Serbie centrale et le Kosovo comprenait peut-être très bien la situation et savait que ce commerce devrait s'épanouir», a-t-il fait remarquer.
Rasim Ljajic a souligné que cette situation frapperait de plein fouet les consommateurs du Kosovo qui devraient payer plus cher les mêmes produits, ainsi que les producteurs kosovars qui achetaient des matières premières serbes et qui ne leur trouveraient sans doute pas de remplacement rapidement. Il a ajouté qu'ils optaient pour ces matières premières non pas par amour pour la Serbie, mais parce qu'elles étaient bon marché et de qualité.
Il a évoqué également l'exclusion accordée par Pristina aux sociétés étrangères qui ont implanté leur production en Serbie.
«Coca-Cola est l'une des marques internationales qui n'est pas concernée par la décision de Pristina et qui peut vendre son produit phare sans taxes supplémentaires. Mais cette même société fabrique un autre soda, Rosa, qui est son produit le plus vendu sur le marché local. Et les nouvelles sanctions douanières du Kosovo sont en vigueur pour ce soda en tant que marque serbe. Ainsi, les multinationales comme Coca-Cola subiront elles aussi des pertes», a précisé le ministre.
Le Président serbe Aleksandar Vucic a d'ores et déjà informé les ambassadeurs des cinq plus grands pays occidentaux et le représentant de l'Union européenne des conséquences déstabilisatrices de l'introduction par Pristina de taxes de 100% sur des marchandises serbes. Il a fait remarquer également que cette démarche violait l'Accord de libre-échange centre-européen (CEFTA).
Le ministre serbe des Affaires étrangères, Ivica Dacic, a indiqué pour sa part à Sputnik que la déclaration de Ramush Haradinaj, Premier ministre de la république autoproclamée du Kosovo, selon laquelle les taxes ne seront réduites que si la Serbie reconnaît complètement l'indépendance du Kosovo, était «un témoin lumineux rouge pour les forces occidentales leur signifiant qu'elles doivent pousser Pristina à renoncer à ses mesures».
Des taxes douanières de 100% frappent désormais certains produits importés de Serbie et de Bosnie-Herzégovine au Kosovo et Ramush Haradinaj a affirmé qu'il ne lèverait les sanctions qu'après la fin de «l'agression serbe» et la reconnaissance de l'indépendance du Kosovo par la Serbie.