Kremlin-Bicêtre/Dmitrov, en Russie, la coopération sacrifiée

Les jumelages entre les villes russes et françaises, restés longtemps un socle d'échanges entre sociétés civiles, souffrent des aléas des relations internationales. La ville russe de Dmitrov souhaite garder sa relation privilégiée avec le Kremlin-Bicêtre. Mais la commune française ne suit plus. Pourquoi? Sputnik a enquêté.
Sputnik

«J'ai essayé de contacter par mail le département des relations internationales du Kremlin-Bicêtre, mais mes lettres me reviennent», regrette Marina Faoustova au micro de Sputnik France.

Chef du département de la coopération économique extérieure de la Chambre de commerce de Dmitrov, elle se désole du silence du Kremlin-Bicêtre. La coopération entre cette commune de région parisienne et Dmitrov, une ville à une soixantaine kilomètres au nord de Moscou, est en berne après avoir pourtant connu des débuts prometteurs.

«La coopération de Dmitrov et de la Ville du Kremlin-Bicêtre a commencé en 2011 par la participation de notre région au Festival RussenKo. Nous avons signé à cette occasion un accord de coopération.»

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À l'époque, cette coopération était très active: «les Français démontraient un très grand intérêt», plusieurs projets dans le domaine de la culture, de l'enseignement, des affaires et de la science ont étés initiés. «On a même eu plusieurs projets sociopolitiques, précise Marina Faoustova. Monsieur Jean-Luc Laurent, le maire de l'époque, était très satisfait par cette coopération. Il a même pris à plusieurs reprises la parole dans les pages de Libé, où il soulignait l'importance de la collaboration avec la Russie. Il a également été l'initiateur d'un groupe "France-Russie" au sein de l'Assemblée nationale.»

«En 4 ans de "jumelage", nous avons eu environ 60 projets bilatéraux. Tout donnait à penser que ces relations d'amitié allaient durer. Mais en 2015, Le Kremlin-Bicêtre a coupé toute communication», s'attriste Marina Faoustova.

La première pensée de la mairie de Dmitrov a été que les relations politiques tendues entre la Russie et la France étaient la cause de cette Guerre froide, puisque ses partenaires hollandais depuis 26 ans, lui ont ouvertement dit que «l'amitié n'était plus possible à cause de la situation politique». Mais devant le silence de la commune du Val-de-Marne, ce ne sont que spéculations. Une situation d'autant plus étonnante qu'en 2012, l'actuel maire, Jean-Marc Nicolle, membre du Mouvement Républicain et Citoyen (MRC) comme le maire de l'époque, soutenait les échanges avec Dmitrov.

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Malgré le succès du Festival, constaté par les habitants et les médias, RussenKo n'a pas eu lieu en janvier 2016. La mairie expliquait à l'époque dans un communiqué que «les baisses des dotations de l'État aux communes et la volonté de ne pas augmenter les impôts locaux, ont conduit la ville du Kremlin-Bicêtre à suspendre le festival.» Pourtant, un an auparavant, en février 2015, la mairie dirigée par Jean-Luc Laurent accueillait encore Madame Elena Vinogradova, gouverneur-adjointe de Dmitrov, partenaire du festival RussenKo.

«On n'a pas envie de perdre nos partenaires, mais on peut se tourner vers une autre ville, explique Marina Faoustova. En participant au Forum du Dialogue de Trianon, on a compris que des relations entre les populations des villes étaient fiables et utiles.»

Alors, qu'est-ce que pousse la mairie du Kremlin-Bicêtre à faire la sourde oreille aux sollicitations de Dmitrov? Didier Roussel, adjoint à la culture, la coopération décentralisée, le numérique, les technologies de l'information et de la communication nous accueille dans son bureau:

«à ce jour, il n'y a aucune difficulté de communication, il n'y a aucun couac avec Dmitrov, explique Didier Roussel. Nous avons décidé de stopper toute activité de coopération pour des raisons budgétaires, comme cela a été indiqué à l'époque. On est conscient que ça désole et gêne Dmitrov.»

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Ce ne serait donc pas des considérations liées à la politique extérieure de la France, comme le supposait la représentante de Dmitrov, puisque la mairie du Kremlin-Bicêtre a «entamé d'autres coopérations avec d'autres pays, et avec qui on n'a pas donné suite non plus», précise Didier Roussel. La collectivité locale française, étant impactée par la crise budgétaire, fait les choix. Et les choix ne sont pas en faveur de la coopération internationale.

«C'est à notre grand regret, se désole Didier Roussel, parce que le festival RussenKo marchait bien, il plaisait énormément à la population. On n'exclut pas que ça puisse être repris à l'avenir, mais aujourd'hui, c'est illusoire.»

À l'époque, le budget des festivités s'élevait à quelque 300.000 euros. Aujourd'hui, d'après l'adjoint à la culture, c'est «un vrai problème» pour la municipalité et «on ne peut pas les mettre dans ce type d'activité».
La culture n'est d'ailleurs pas la seule à souffrir de restrictions budgétaires: Le Kremlin-Bicêtre «est à 3,5 millions en moins de son budget global» par rapport à dix ans auparavant. La liberté d'action des communes dans le cadre de l'autonomie des collectivités territoriales existe toujours pour une ville qui décide de poursuivre la coopération. «Mais les communes de notre taille ne peuvent plus suivre, financièrement! Sinon, on va priver un pan de la population d'autre chose», affirme l'adjoint à la culture.

«Ces choix ne nous conviennent pas forcément, mais on est obligé de les appliquer. Nous sommes obligés de présenter les budgets équilibrés… contrairement à l'État français, d'ailleurs», conclut, caustique, Didier Roussel.

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