Israël conclut un grand accord avec le «meilleur ami» de l'Iran

La visite inopinée du premier ministre israélien Benjamin Netanyahu à Oman, qui n'entretient pas de relations diplomatiques avec l’État hébreu, a créé la surprise.
Sputnik

Et cet étonnement découle moins du fait qu'il s'agissait du premier contact officiel avec le sultanat depuis 1996 que de l'appel d'Oman à «reconsidérer le statut d'Israël» adressé à ses voisins arabes. Un ancien diplomate américain a déclaré que la visite de Benjamin Netanyahu pourrait être un «signal pour l'Iran», sachant qu'Oman est considéré comme son «meilleur ami» dans le Golfe, écrit le quotidien Nezavissimaïa gazeta.

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«On ignore ce qui se cache réellement derrière cette visite. Certains communiqués ont rapporté que le président de l'Autorité palestinienne Mahmoud Abbas s'était rendu à Mascate quelques jours avant la venue de Netanyahu. Compte tenu de l'aide d'Oman dans les contacts américano-iraniens il y a quelques années, quand était évoqué l'accord sur le nucléaire iranien, on pourrait se demander si le sultan Qabous ibn Saïd ne chercherait pas à jouer un rôle similaire pour relancer les négociations israélo-palestiniennes», déclare l'ancien représentant du département d'État américain pour la transition politique en Syrie Frederic Hof. Toutefois, compte tenu de la réputation d'Oman en tant que «meilleur ami» de l'Iran dans le Golfe, le geste du premier ministre pourrait viser un tout autre but.

«Le premier ministre Netanyahu a forcément évoqué le thème iranien, poursuit Frederic Hof. Je doute qu'il ait demandé au sultan Qabous un canal de négociations avec Téhéran, mais il aurait pu, bien sûr, utiliser les relations du sultan pour envoyer des messages à l'Iran concernant la Syrie et le Liban. Ce n'est pas à exclure. Le fait que le président Abbas ait annoncé son récent voyage à Oman soulève également une autre possibilité. Le sultan Qabous part probablement du principe que le rôle que pouvait jouer le prince héritier saoudien dans les négociations israélo-palestiniennes pourrait être menacé aujourd'hui. Même si je peux imaginer à quel point les appétits du premier ministre Netanyahu par rapport aux nouvelles négociations de paix seront sous contrôle, il ne manquera certainement pas la possibilité de se rendre dans ce pays du Golfe pour s'entretenir avec son dirigeant.»

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La chancellerie du chef de l'État hébreu a souligné que la visite de ce dernier dans le sultanat était le premier contact public entre les deux pays depuis 1996. «Le premier ministre Netanyahu et sa femme ont été invités à rendre visite au dirigeant d'Oman, le sultan Qabous ibn Saïd, après de longues négociations entre les deux pays. Le communiqué commun publié à l'issue de la visite note que les solutions pour promouvoir le processus de paix au Moyen-Orient, ainsi que plusieurs questions d'intérêt commun pour parvenir à la paix et à la stabilité dans la région, ont fait partie des thèmes évoqués. La visite du premier ministre est une démarche importante dans la mise en œuvre de la politique du premier ministre Netanyahu visant à approfondir les relations avec les pays de la région», stipule le communiqué de la chancellerie. Il est précisé que pendant ce voyage, Benjamin Netanyahu et son épouse Sara étaient accompagnés par le chef du Mossad Yossi Cohen, le conseiller à la sécurité nationale Meir Ben-Shabbat, ainsi que le directeur général du ministère des Affaires étrangères Yuval Rotem.

A l'issue des pourparlers à Mascate, le gouvernement d'Oman a affiché un changement de position vis-à-vis de l'État hébreu. Ainsi, le chef de la diplomatie d'Oman Youssef al-Alawi Abdullah, dans son discours au forum international sur la sécurité à Bahreïn, a appelé les États arabes à reconsidérer le statut d'Israël. «Israël est un État qui existe dans la région et nous le savons parfaitement. Le monde en est également conscient et l'heure est peut-être venue de considérer Israël [comme tous les autres États] pour qu'il puisse remplir les mêmes engagements», a déclaré le ministre omanais. Ce dernier faisait manifestement allusion au problème palestinien, autour duquel la tension est à son comble suite à la décision de l'administration Trump de reconnaître Jérusalem en tant que capitale de l'État hébreu.

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Youssef al-Alawi Abdullah a annoncé que lors de ses contacts avec Israël, le sultanat avait suggéré plusieurs initiatives diplomatiques pour aider les Israéliens et les Palestiniens à trouver une entente, mais réfuté que son pays aurait l'intention de jouer un rôle de médiation dans le conflit. «Nous ne disons pas que désormais le parcours est simple et qu'il est parsemé de fleurs, mais notre priorité consiste à mettre un terme au conflit et à entrer dans un nouveau monde», a déclaré le chef de la diplomatie omanaise. Selon lui, le sultanat compte sur la politique des USA et les efforts du président Trump pour travailler sur l'«accord du siècle» concernant le conflit israélo-palestinien. Le ministre des Affaires étrangères de Bahreïn Khalid al-Khalifa a exprimé son soutien à Oman dans sa tentative d'assurer la paix entre Israël et la Palestine, et son homologue saoudien Adel al-Joubeir a déclaré que «le processus de paix était la clef pour la normalisation des relations avec Israël».

Toutefois, la tentative de Benjamin Netanyahu de faire un pas dans le sens du monde arabe n'a pas apaisé la situation dans la bande de Gaza. Plusieurs dizaines de roquettes ont été tirées en direction de l'État hébreu le week-end dernier. L'armée israélienne (Tsahal) en a accusé le Djihad islamique palestinien. A son tour, le mouvement palestinien Fatah a diffusé un communiqué officiel stipulant que la visite de Netanyahu à Oman était «une atteinte à l'initiative de paix arabe basée sur le principe «le territoire en échange de la paix globale»». «Le mouvement Fatah condamne fermement une telle normalisation gratuite de cette situation d'occupation sans la reconnaissance par Israël des droits des Palestiniens et des Arabes, le retour des territoires arabes occupés et la création d'un État palestinien indépendant dans les frontières de 1967 avec une capitale à Jérusalem-Est. Nous exigeons que le monde arabe réagisse», indique ce communiqué.

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Ce n'est pas la première fois que des États du Golfe évoquent prudemment les droits d'Israël à la souveraineté. Ainsi, dans une interview accordée au magazine américain The Atlantic, le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed ben Salmane avait déjà souligné: «Je crois que tout le monde a le droit de vivre en paix parmi les gens de sa nation. Je crois que les Palestiniens et les Israéliens ont le droit à leur propre territoire.» Cette déclaration avait suscité une vague de critiques compte tenu des relations hostiles entre Israël et le monde arabe. En janvier dernier, Benjamin Netanyahu avait reconnu le reformatage des relations entre l'État hébreu et d'autres pays de la région. «Je suis d'accord qu'il y a un rapprochement entre Israël et d'autres pays du Moyen-Orient, ce qui était inimaginable il y a encore dix ans», explique le premier ministre. L'une des prémisses à une telle «détente», selon Benjamin Netanyahu, a été l'«inquiétude par rapport à l'ennemi commun qu'est l'islam radical» incarné par les groupes terroristes Daech et Al-Qaïda. Une autre raison invoquée par le premier ministre est la «proximité des positions vis-à-vis de l'Iran».

Les opinions exprimées dans ce contenu n'engagent que la responsabilité de l'auteur de l'article repris d'un média russe et traduit dans son intégralité en français.

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