Après l’Il-20, Israël devra prouver qu’il tient aux vies des Russes

L’examen de toutes les circonstances du crash de l'avion russe Il-20 en Syrie se poursuit. La position-cadre de la Russie qui a été exposée par le Président Vladimir Poutine se résume comme suit: le crash a été le résultat d'un tragique concours de circonstances.
Sputnik

Il serait toutefois une grave erreur de raisonner, en réfléchissant «que faire, cela arrive, personne n’est à blâmer». Au contraire. C’est justement le cas quand la phrase prononcée par l’homme d'État soviétique Lazare Kaganovitch: «chaque accident a son prénom, son nom et son poste» est plus que jamais d’actualité.

Comme il s’agit dans ce cas précis, tout d’abord, de la mort de 15 de nos militaires. Ensuite, du fond et de la cause de ce concours de circonstances. Et enfin, de ce qu’on a à faire pour exclure à jamais la réédition de tels événements.

Et c’est justement la raison pour laquelle, la position exposée publiquement par Israël et destinée à prouver la thèse, selon laquelle «les Syriens qui ne maîtrisent en général pas la DCA tiraient au hasard, il revient à eux tous les reproches», est inacceptable et pas seulement pour la Russie. Mais en premier lieu, pour Israël lui-même.

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C’est que dans la guerre syrienne qui illustre on ne peut mieux la nature paradoxale du monde qui est le nôtre, participent directement plusieurs machines militaires les plus puissantes de la planète, dont chacune poursuit des objectifs contraires à ceux d’une autre. Quoi qu’il en soit, le nombre de morts parmi les effectifs de ces puissances militaires est assez limité. Tout le monde sait comment on est arrivé à une telle situation: grâce à un système de coordination scrupuleux et extrêmement sévère et à celui d’ententes réciproques, dont la Russie est modérateur. La guerre syrienne, c’est sans doute la guerre la plus «diplomatisée» et la plus soumise aux règles dans l’Histoire contemporaine.

Or, la Russie est devenue «modérateur de la guerre» pas seulement parce que grâce à son aide l’État syrien a annulé son arrêt de mort et reprend aux bandes son territoire, mètre par mètre. Mais aussi parce qu’à la différence des États-Unis qui s’appliquaient par tous les moyens à intervenir en arbitre, la Russie étudie en pratique, essaie de comprend et prend en considération la souveraineté et les intérêts des participants.

Y compris les intérêts d’Israël. La liste des cas où la Russie a accédé aux désirs de l’État hébreu a été plus d’une fois publiée ces derniers jours. Qu’il s’agisse de la médiation lors du retrait des forces pro-iraniennes (qualifiées de «terroristes» en Israël) des régions à proximité du territoire israélien. Ou de l’abandon du marché déjà conclu sur la livraison en Syrie de systèmes S-300 pour un demi-milliard de dollars, car le rayon d’action de ce système couvrait l’ensemble du territoire israélien. Cette liste est longue. La Russie montrait par des faits qu’elle tient à ses rapports avec Israël et comprend sa position. Israël peut ne pas expliquer à la Russie ce que signifie se trouver au milieu d’«amis jurés», souffrir de la clandestinité terroriste et lire en permanence quel mal tu représentes.

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Quoi qu’il en soit, ce respect et cette compréhension des intérêts ne peuvent pas, somme toute, être un mouvement à sens unique. Sinon, cela ne fonctionne tout simplement pas, et avec le temps, l’absence de respect réciproque et égal des règles affectera celui même qui viole les règles.

Il faut toutefois constater que les forces armées des États-Unis, qui seraient un concurrent global et un adversaire de la Russie et qui sont dans de très mauvais termes avec celle-ci, respectent, dirait-on, à la lettre les règles de la guerre syrienne et coordonnent leurs actions avec les collègues russes.

Alors que l’Armée de défense d'Israël, qui n’est pas un adversaire de la Russie et qui a avec elle de bons rapports constructifs, s’est permis jusqu’ici, pour une quelconque raison mystérieuse, des choses que la superpuissance nucléaire ne s’est jamais permise. Par exemple, ne notifier à la partie russe qu’une opération sur 10 contre le territoire syrien. Ou comme dans le cas du raid malheureux contre Lattaquié – annoncer l’opération une minute seulement (!) avant son lancement.

Comme résultat, le concours le plus tragique de circonstances ayant débouché sur la mort de soldats russes.

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Et comme cela est déjà arrivé, s’appliquer à prouver que «toute la faute revient aux Syriens qui ne tiraient pas correctement» est tout bonnement déplacé. Parce qu’au départ, la diplomatie de guerre avait justement pour objectif de garantir la sécurité des militaires des États opérant dans la région. On supposait que cette sécurité serait assurée par toutes les parties impliquées dans ladite diplomatie.

À présent, Israël doit choisir l’une des deux variantes très simples. Soit il s’engage et endosse la responsabilité pour que des éventualités tragiques ne se reproduisent plus avec les avions russes lors de ses opérations. Soit il refuse d’en répondre, en délégant ainsi à la Russie tout le devoir de garantir pleinement la sécurité de ses soldats sans compter sur des ententes quelles qu’elles soient avec Israël. Il est plus ou moins évident de savoir par quels moyens on peut le faire. Par exemple, nous avons beaucoup lu sur la DCA des alliés syriens qui n’est pas suffisamment performante. Et bien, c’est un cas où la Russie peut incontestablement les aider.

Certains supposent cependant qu’une telle évolution de la situation ne serait pas beaucoup appréciée par Israël. Aussi, est-il dans son intérêt d’expliquer à ses propres militaires qu’il fallait se soucier des vies des Russes et éviter par tous les moyens des combinaisons qui les mettent en péril et ce, même s’il s’agit de combinaisons habiles et spirituelles, susceptibles de récolter une multitude de «like» sur les réseaux sociaux.

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