Le chef du gouvernement tunisien suspendu de son parti

Le gel de l’adhésion de Youssef Chahed est le dernier rebondissement dans le conflit qui l’oppose, depuis des mois, au directeur-exécutif du parti, Hafedh Caïd-Essebsi. En toile de fond, une guerre de positionnement dans l’optique de la présidentielle de 2019.
Sputnik

Le chef du gouvernement tunisien, Youssef Chahed, a été suspendu de son parti, Nidaa Tounes, qui lui avait adressé un ultimatum de 24 heures pour répondre à un questionnaire lui enjoignant de clarifier sa position.

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Une commission du règlement intérieur sera chargée de trancher la question, précise un communiqué du parti présidentiel, publié vendredi 14 septembre.

Cette suspension intervient une semaine après que le chef du gouvernement a reçu, dans ses locaux, huit députés du parti Nidaa Tounes Il leur a demandé de quitter leur groupe parlementaire pour en rejoindre un autre, a accusé, le parti présidentiel, le 8 septembre.

Youssef Chahed n'a pas souhaité commenter sa suspension. Peu de temps auparavant, il avait déclaré, vendredi, que

«Malgré le tapage politique entravant le travail gouvernemental, malgré le maigre soutien politique dont bénéficie le gouvernement, celui-ci est bien déterminé à aller de l'avant dans la réalisation des réformes économiques».

Les huit députés de Nidaa Tounes reçus par Chahed ont effectivement rejoint un nouveau bloc parlementaire, la « Coalition nationale ». Le dernier-né des groupes parlementaires tunisiens compte 43 députés: des « transfuges » de Nidaa Tounes et d'autres partis de la même mouvance politique, ainsi que des indépendants.

Les députés de la « Coalition nationale » qui se défendent d'être des partisans de Chahed, se démarquent pourtant clairement de Nidaa Tounes qui exige, depuis plusieurs mois, la tête du chef du gouvernement, en arguant de l'«échec » de sa politique économique.

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Cette tentative est demeurée, toutefois, infructueuse. Le cadre du dialogue politique consensuel du Pacte de Carthage, réunissant partis et organisations nationales sous le patronage du chef de l'Etat, n'a pas permis d'atteindre un consensus autour de cette question.

L'arithmétique parlementaire, ne permettait pas, non plus, aux « Nidaïstes », de réunir la majorité absolue exigée par la Constitution pour retirer la confiance au gouvernement Chahed, qui se trouve soutenu par le parti Ennahda, premier groupe parlementaire.

Le chef du gouvernement, Youssef Chahed, et le directeur-exécutif du parti, Hafedh Caïd Essebsi, fils du Président tunisien, se livrent, depuis plusieurs mois, une bataille frontale qui participe de l'enlisement de la crise politique en Tunisie.
En mai 2018, le chef du gouvernement avait désigné Hafedh Caïd-Essebsi comme responsable de la crise qui agite le pays et fragilise la position gouvernementale, en déclarant notamment qu'il « a détruit le parti».

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Ce discours a été interprété comme une volonté du chef du gouvernement d'enclencher une dynamique politique pour soustraire la direction du parti à Hafedh Caïd-Essbsi, dans la perspective de la Présidentielle de 2019, à laquelle il pourrait se porter candidat.

Prenant acte de l'isolement, relatif, de Chahed, le Président de la République, Béji Caïd-Essebsi, l'avait appelé, en juillet dernier, « soit à démissionner, soit à demander la confiance au Parlement. »

A 15 mois de la présidentielle, le Président de la République, 92 ans, n'exclut pas de briguer un second mandat. Le directeur exécutif de Nidaa Tounes, avait récemment déclaré que son parti soutiendrait, en priorité, le Président, s'il souhaitait rempiler. A défaut, Nidaa Tounes choisirait son propre candidat.

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