Quel épilogue pour l'affaire Clément Méric? Cinq ans après la mort du jeune militant antifasciste de 18 ans, proche du mouvement Action antifasciste Paris-Banlieue et étudiant à Sciences-Po, il va être encore difficile pour la justice de faire la lumière sur cet évènement tragique. Le procès qui s'ouvre à la Cour d'assises de Paris, ce mardi 4 septembre et qui devrait durer jusqu'au 14 septembre, va tenter de déterminer les responsabilités. À ce titre, trois skinheads d'extrême droite dont certains proches, au moment des faits, des mouvements Troisième voie et Jeunesses nationalistes révolutionnaires [deux organisations dissoutes par le gouvernement, ndlr] comparaissent pour l'homicide du militant «antifa».
Les faits se déroulent le 5 juin 2013 aux alentours de 18 h: des militants antifascistes et des skinheads se rencontrent fortuitement lors d'une vente privée de la marque anglaise Fred Perry, particulièrement appréciée par les deux camps, qui se déroule dans la rue Caumartin (IXe arrondissement de Paris), à quelques pas de la gare Saint-Lazare.
L'altercation qui finira par un drame débute par des provocations verbales. Le groupe de Clément Méric aurait invectivé l'autre groupe: «les nazis viennent faire leur courses», à cause des inscriptions équivoques floquées sur leurs t-shirts: «white power» ou encore «100% pure race». Selon les trois skinheads, les provocations ont continué. «On vous attend à dix en bas. N'achetez pas trop d'affaires, il va falloir courir.» Un vendeur affirme avoir entendu Clément Méric s'adresser au groupe en leur disant: «descendez si vous avez des couilles». Une quarantaine de minutes plus tard, une altercation physique, cette fois-ci, éclatera entre les deux groupes, les antifas étant restés sur place, à quelques mètres de la boutique.
Si chaque camp déclare que l'autre a commencé, l'issue sera mortelle pour Clément Méric qui succombera le lendemain d'une hémorragie cérébrale causée par plusieurs coups reçus au visage ou sa chute au sol, consécutive à ces coups. Un des enjeux pour la justice sera de déterminer si les coups ont été portés avec ou sans poing américain, un élément qui pourrait démontrer une préméditation. Certains témoins déclarent avoir vu Esteban Morillo armé d'un poing américain, d'autres non. Or, Esteban Morillo a déclaré, lors de sa garde à vue, que Samuel Dufour frappait les antifas avec un poing américain. Dans des SMS à un ami, Samuel Dufour écrivait: «Salut j'ai frappé avec ton poing américain». L'ami en question lui rétorquait: «Sérieux qu'est-ce que tu as fait encore?», Dufour répondait alors «Bah il est parti à l'hôpital, mdr [mort de rire, ndlr]» et un peu plus tard dans la soirée: «5 contre 3, on les a défoncés».
Néanmoins, le «Comité pour Clément» explique, dans un communiqué, que cette rixe revêt justement un caractère politique: «nous attendons essentiellement que la vérité soit dite publiquement sur les circonstances de la mort de Clément et que la dimension politique de ce crime soit clairement mise en évidence.» Les faits ont eu lieu à un moment où la tension entre groupes d'extrême gauche et droite avait atteint son paroxysme. Le syndicat Solidaires-Etudiantes-e-s, auquel appartenait Clément Méric, abonde dans ce sens et dénonce un «assassinat politique».
En parallèle de ce procès, qui doit répondre aux nombreuses questions en suspens, plusieurs rassemblements en mémoire de Clément Méric seront organisés notamment ce mardi 4 septembre pour la pose d'une plaque commémorative à Havre-Caumartin.