En Turquie, les sanctions US ont «uni» le pouvoir et l’opposition

Recep Tayyip Erdogan a ordonné samedi le gel en Turquie des avoirs des ministres américains de la Justice et de l'Intérieur, «s'ils en ont», répliquant ainsi à des sanctions similaires introduites par Washington. Deux hommes politiques turcs ont commenté la situation pour Sputnik.
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La décision du Président américain de sanctionner les ministres turcs de l'Intérieur, Süleyman Soylu, et de la Justice, Abdülhamit Gül, sape sérieusement les relations turco-américaines, ne correspond pas du tout aux normes internationales et témoigne tout simplement d'un manque de respect, a déclaré à Sputnik Mustafa Elitas, député du Parti de la justice et du développement (AKP, au pouvoir).

La Turquie doit-elle s’attendre à de «lourdes sanctions» de la part des USA?

«Les gens réalistes aux États-Unis et ceux qui dirigent ce pays doivent immédiatement revenir sur cette décision […] Qui plus est, ils doivent présenter leurs excuses à nos deux ministres», a souligné l'interlocuteur de l'agence.

Et de rappeler que les États-Unis avaient déclenché une guerre économique contre la Chine, menaçaient l'Union européenne et lançaient des menaces incompatibles avec les normes éthiques à un pays allié déjà confronté à des problèmes.

La Turquie précise quelle sera sa réaction si les USA refusent de lui livrer des F-35

«Cela ressemble, à vrai dire, au comportement des tribus africaines d'il y a 30 à 40 ans. […] Ne serait-ce qu'un premier signe de la transformation des États-Unis […] en menace non seulement pour la Turquie, mais aussi pour le monde entier», a poursuivi M.Elitas.

«Si les USA n’entendent pas attaquer la Turquie, ils n’ont rien à craindre des S-400»

Un autre interlocuteur de Sputnik, Yunus Emre, député du Parti républicain du peuple (CHP) turc, principal parti d'opposition à l'AKP, a signalé pour sa part de sérieux problèmes qui pesaient depuis longtemps sur les relations entre la Turquie et les États-Unis.

«Somme toute, la puissance des États-Unis décline, et l'Amérique essaie de forcer les autres à faire ce qu'elle veut. Telle est la particularité essentielle du moment. Si ses demandes et ses exigences ne sont pas entendues, elle recourt à des contraintes. Il va sans dire que cela préoccupe la Turquie. Nous ne sommes évidemment pas obligés de soutenir la politique du gouvernement, mais dans ce cas précis, il s'agit d'une approche visant à sauvegarder la souveraineté de la Turquie, son existence en tant qu'État indépendant», a expliqué le parlementaire.

Patriot ou S-400? Les USA forceraient la Turquie à choisir

Washington a mis en place des sanctions contre les ministres turcs de la Justice, Abdulhamit Gül, et de l'Intérieur, Süleyman Soylu, en réaction à la détention en Turquie du pasteur évangéliste américain Andrew Brunson, en prison depuis 21 mois. Le pasteur a été arrêté pour suspicion de collaboration avec le mouvement Gülen (FETO). La justice turque l'accuse d'être impliqué dans le coup d'État raté du 15 juillet 2016. En 2017, lors d'une rencontre avec le Président turc, Donald Trump lui avait demandé de faire libérer le pasteur américain. M.Erdogan a, quant à lui, proposé d'échanger le prédicateur Fethullah Gülen, qui vit en exil sur le territoire américain, contre Andrew Brunson.

L'annonce des sanctions contre les deux ministres turcs intervient dans le contexte des divergences entre les États-Unis et la Turquie concernant l'achat par Ankara des systèmes de missiles antimissiles russes S-400 pour quelque 2,5 milliards d'euros. Les États-Unis exercent des pressions sur la Turquie pour qu'elle renonce à l'acquisition de ces systèmes de défense antiaérienne, menaçant de refuser de lui livrer des chasseurs F-35.

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