Le Partenariat économique régional global comprendrait 16 pays d'Asie dont la Chine, l'Inde, le Japon, l'Australie, la Corée du Sud, la Nouvelle-Zélande et les dix États membres de l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est (ANASE). Les pays qui avaient participé au sommet de l'ANASE en 2012 évoquaient déjà la nécessité d'une zone de libre-échange (ZLE). «Une association économique aussi vaste permettrait d'élargir significativement le commerce international et de décupler les investissements réciproques», avait noté à l'époque Surin Pitsuwan, secrétaire général de l'organisation. Le principal avantage d'une telle association économique est que tous les pays de la région, indépendamment de leur niveau de développement, bénéficieraient d'une croissance économique accélérée.
Les barrières commerciales
Les États-Unis menaient également depuis 2008 des négociations sur la création du Partenariat transpacifique (TPP) auquel devaient se joindre plusieurs pays de l'ANASE. Washington espérait obtenir le contrôle d'une grande partie de la région pour faire contrepoids à la Chine, dont les ambitions géopolitiques et économiques inquiétaient sérieusement la Maison blanche. Mais en 2017, la politique américaine a brusquement changé de cap: Donald Trump a signé un décret sur la sortie de l'accord dès le troisième jour de sa présidence.
L'ennemi de mon ennemi…
En soi, la sortie des USA du TPP n'a pas relancé à elle seule les négociations sur le Partenariat économique régional global (PERG). En revanche, les guerres commerciales déclenchées par Trump dans le monde entier ont été une puissante stimulation. Washington a augmenté les taxes et a infligé un sérieux préjudice aux principales économies asiatiques. Et même des pays opposés comme l'Inde et la Chine ont décidé de faire front uni. Résultat des courses: l'accord final pourrait être signé dans le courant de l'année.
«Bien évidemment, cela découle des provocations commerciales organisées par Trump à l'échelle mondiale. L'accord sur le PERG contribuera à l'intégration du marché du Pacifique occidental, c'est-à-dire de tout le marché de l'Asie du Nord-Est, et au développement commercial et économique régional», a déclaré Jia Jinjing, directeur de l'Institut d'études macroéconomiques à l'université populaire de Chine.
Le potentiel des pays participant aux négociations sur le PERG permettront à la future organisation de prétendre au rôle de principale association économique mondiale. Selon la Banque mondiale, entre 2012 et 2017 leur PIB global est passé de 21.900 à 25.500 milliards de dollars, et leur part dans le PIB mondial de 29,3 à 31,6%, le tout avec une population de plus de 3,5 milliards d'habitants, soit 47,5% de l'humanité.
L'argent décide de tout
«Si la Chine commençait à investir dans le secteur industriel de l'Inde, cela créerait des dizaines de milliers d'emplois. De plus, de nouvelles opportunités s'ouvriraient pour les exportations indiennes. Avec le temps, cela permettrait de régler le stupide conflit territorial qui oppose les deux pays», souligne Mohan Guruswamy, spécialiste en relations internationales.
Cependant, le PERG ne deviendra pas une alternative au commerce avec les USA pour tous les pays de l'alliance. Selon Grigori Iaryguine, membre de l'Association d'études internationales, l'interdépendance entre Washington et les pays d'Asie se maintiendra quoi qu'il arrive.
«Les nouvelles alliances économiques peuvent être efficaces en Asie-même, mais pour les plus grandes économies asiatiques — le Japon, la Chine et la Corée du Sud — le marché américain est trop important, elles n'y renonceront jamais», estime l'expert.
Néanmoins, sur le plan fonctionnel le PERG impactera radicalement la politique américaine en matière de commerce extérieur. Les sanctions contre certains pays de l'alliance deviendront inutiles car les réexportations seront possibles dans le cadre de la ZLE, et ce serait un suicide économique que de décréter des restrictions contre tous les membres du PERG à la fois, se coupant ainsi d'un tiers du marché mondial.
Et la Russie dans tout ça?
Gazprom et la compagnie chinoise CNPC ont signé un accord sur la fourniture de 38 milliards de mètres cubes de gaz par an. Grâce au PERG, cette quantité pourrait décupler.
«Selon nos prévisions moyennes, d'ici 2035 les besoins de la Chine en gaz de pipeline russe seront compris entre 80 et 110 milliards de mètres cubes», a déclaré le patron de Gazprom Alexeï Miller.
La première partie du gaz naturel liquéfié (GNL) a été acheminée de Yamal vers le port indien de Dahej. Le contrat prévoit la livraison en Inde de 3,5 milliards de mètres cubes de GNL par an. Et puisque les locomotives économiques du PERG utilisent activement le gaz russe, il est fort probable que les «frères cadets» de l'association suivent prochainement leur exemple.