Seulement voilà, les géants du Net ne veulent pas en entendre parler et pour cause. Aujourd'hui, la loi européenne prévoit que si un contenu soumis à des droits d'auteur est publié de manière illégale par un internaute, c'est lui qui est responsable. L'hébergeur ne peut être mis en cause que s'il a été prévenu qu'un contenu illégal est disponible sur sa plateforme. Une loi parfaite pour permettre à des startups de devenir des compagnies multimilliardaires.
Pour cette raison, les GAFA (Google, Apple, Facebook et Amazon) ont mené une campagne de lobbying très importante afin de faire rejeter le texte. Campagne qui a porté ses fruits. Au grand dam des défenseurs de la réforme.
«Il est incroyablement décevant de constater que le Parlement européen, après avoir fait l'objet de pressions féroces de la part d'opposants utilisant de faux arguments, n'a pas soutenu les droits des créateurs», a réagi le musicien Jean-Michel Jarre, président de la Confédération internationale des sociétés d'auteurs et compositeurs (CISAC).
Le député français au Parlement européen Marc Joulaud (PPE, centre-droit) est même allé plus loin et a dénoncé «une campagne de lobbying d'une violence sans précédent orchestrée par les GAFA».
Mais les géants américains du Net n'ont pas été les seuls à mener bataille contre le texte. Ils se sont trouvés des alliés inattendus dans cette guerre. Plusieurs associations d'activistes de la liberté sur internet dénonçaient une réforme qui allait verrouiller la toile. Wikipedia, célèbre encyclopédie en ligne, avait appelé ses utilisateurs à faire pression sur leurs députés européens. De plus, le 4 juillet, le site n'était plus disponible dans plusieurs pays européens en signe de protestation.
«La directive menacerait la liberté en ligne et imposerait de nouveaux filtres, barrières et restrictions pour accéder au Web», a notamment expliqué Wikipédia Espagne dans un communiqué.
«Si la directive était approuvée sous sa forme actuelle, des actions comme le partage d'informations sur les réseaux sociaux ou l'accès à des informations grâce à un moteur de recherche seraient beaucoup plus compliquées sur internet.»
Sur Twitter, la députée européenne PS Pervenche Berès s'est désolée de cette fronde commune: «Les GAFA, qui volent les artistes, ne payent pas d'impôt, ont gagné une bataille. Quel angélisme de la part de ceux qui pensent défendre les consommateurs.»
Les défenseurs du texte ont certes perdu une bataille mais peut-être pas la guerre. En effet, le texte sera de nouveau débattu en septembre lors d'une session plénière du Parlement européen ou l'ensemble des eurodéputés pourront amender le texte avant un nouveau vote. Peut-être l'occasion d'une nouvelle alliance de circonstances entre GAFA et Wikipédia.