Exhumation de Franco: «les organisateurs de l’oubli ont mis 40 ans à obtenir l’impunité»

Le gouvernement espagnol a décidé de déplacer les restes du dictateur Franco hors de son mausolée de la «Valle de los Caídos» [vallée de ceux qui sont tombés] à 50 km de Madrid pour en faire un lieu de «réconciliation». Sputnik s’en est entretenu avec Emilio Silva, président de l'Association pour la reconnaissance de la mémoire historique.
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L'élite politique espagnole, qu'elle soit de gauche ou de droite, était directement liée aux familles proches de la dictature, a rappelé Emilio Silva dans un entretien accordé à Sputnik.

«Les organisateurs de l'oubli ont mis 40 ans à obtenir l'impunité. C'est qu'aucun coupable de violation des droits de l'Homme sous la dictature ne s'est jamais retrouvé sur le banc des accusés», a déclaré l'interlocuteur de l'agence, paraphrasant le poète argentin Juan Gelman.

Et de rappeler que depuis les 15 dernières années, avec le lancement du programme d'exhumation de corps des fosses communes, les parents des victimes du franquisme devenaient de plus en plus actifs.

«Durant 40 ans, un système comparable à l'apartheid a régné sur l'Espagne. Il n'était pas du tout facile pour les vaincus de la Guerre civile de 1936-1939 d'entrer dans une école supérieure, d'être embauché dans une entreprise privée, dans une banque ou dans une ONG», a expliqué le militant.

Selon ce dernier, «des centaines de milliers» d'Espagnols ont dû émigrer.

«Entre 1960 et 1970, 1,7 million de personnes ont émigré, c'étaient essentiellement les enfants des vaincus», a précisé M.Silva.

Et de relever que quatre décennies après la fin du franquisme, 114.200 personnes étaient toujours portées disparues. Les opposants au régime de Franco étaient jetés en prison, dépouillés de leurs biens et humiliés.

«Ils n'ont même pas été vaccinés contre la poliomyélite. Nous sommes le pays avec le plus grand nombre de fosses communes après le Cambodge», s'est indigné l'interlocuteur de Sputnik.

La «Valle de los Caídos» a été ouverte le 1er avril 1959 pour commémorer le 20e anniversaire de la fin de la Guerre civile.

«On la faisait passer pour un lieu de réconciliation, les franquistes et 330.000 républicains y reposant. Si on lit toutefois le discours prononcé par Franco lors de l'inauguration de cet ensemble monumental, on comprendra qu'on avait vécu tout ce temps sous l'apartheid… C'est le symbole d'une fausse réconciliation», a résumé le président de l'Association pour la reconnaissance de la mémoire historique.

La tombe du général Francisco Franco est à côté de celle du fondateur du parti fascisant de La Phalange, Jose Antonio Primo de Rivera, dans la Valle de los Caídos, monument que le dictateur avait conçu à sa propre gloire. Plus de quatre décennies après sa mort, en 1975, ses restes en seront exhumés pour être enterrés à nouveau plus intimement auprès de sa famille.

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