L'élargissement des pouvoirs de l'OIAC met en péril l'organisation elle-même, a estimé le ministre russe des Affaires étrangères dans une interview accordée à la chaîne britannique Channel 4.
«Il y a quelques jours, l'OIAC a été victime d'une manipulation brutale lorsque la Grande-Bretagne et ses alliés ont soutenu l'élargissement de son mandat.
Le chef de la diplomatie a souligné que l'organisation devrait fonctionner conformément à la Convention sur l'interdiction des armes chimiques (CIAC) qui dispose comment les circonstances de l'incident doivent être établies. «Les experts de l'organisation devraient visiter les lieux des attaques chimiques présumées eux-mêmes, sans transférer cette tâche à quiconque. Ils devraient prendre des échantillons avec leurs propres mains et les avoir avec eux jusqu'à ce qu'ils atteignent le laboratoire», a-t-il expliqué.
Rappelant la dispersion chimique de Khan Cheikhoun en avril 2017, M.Lavrov a pointé que les spécialistes de l'OIAC n'avaient jamais visité les lieux: «Quand nous leur avons demandé comment ils avaient reçu les échantillons de la substance, ils ont répondu qu'ils avaient été livrés dans des réfrigérateurs par des experts britanniques et français. Et quand nous avons demandé pourquoi ils ne s'y étaient pas rendus eux-mêmes, ils ont répondu que c'était risqué».
En conséquence, le rapport de la mission conjointe des Nations unies et de l'OIAC sur Khan Cheikhoun était rempli de phrases telles que «selon toute vraisemblance» et «avec une forte probabilité».
«Lorsque la convention est brutalement violée, je pense qu'il est impossible de ne pas s'inquiéter. Nous allons essayer de remédier à la situation, puisque cette décision sera discutée à la conférence régulière des États membres [en novembre 2018, ndlr]. Mais si l'on n'y parvient pas, je pense que les jours de l'OIAC seront comptés, ou du moins, l'OIAC ne restera pas une organisation universelle», a résumé le ministre.
Le projet de décision avait été soumis par le Royaume-Uni avant d'être approuvé par 82 voix pour et 24 contre, dont la Russie, l'Iran et la Syrie. Selon Damas, la résolution en question est susceptible d'«ajouter de nouvelles complications à la capacité de l'OIAC de jouer son rôle» et d'«aggraver la division entre les pays membres».