Tacle glissé d’un collectif sur les pratiques de sponsoring chez Nike et Adidas

Dans son rapport Anti-jeu #2, le collectif Éthique sur étiquette dénonce les politiques salariales pratiquées par Nike et Adidas. La raison? Malgré un chiffre d’affaires doublé en 10 ans, les deux marques préfèrent rémunérer les actionnaires et les contrats de sponsoring au détriment des ouvriers, laissés sur la touche.
Sputnik

Chérir ses actionnaires et ambassadeurs au détriment de ses ouvriers? C'est ce que dénonce le collectif Éthique sur l'étiquette, membre de Clean clothes campaign, dans son rapport Anti-jeu #2 publié en juin. En effet, pour l'association, les grands équipementiers sportifs Nike et Adidas, qui au passage sponsorisent plus de la moitié des équipes présentes à la coupe du monde en Russie, «se partagent près de 60% du marché européen et affichent des performances financières presque indécentes; le premier enregistre la 5e plus forte progression de Wall Street en dix ans, devant Google. Leurs chiffres d'affaires ont été multipliés par 2 en 10 ans.» Une progression dont tout le monde ne profite pas, comme le regrette le collectif Éthique sur l'étiquette dans son communiqué.

«Dans leurs chaînes de sous-traitance, les ouvrier-e-s [sic] sont loin de bénéficier de cette santé économique. Ces marques désertent la Chine, où les salaires tutoient désormais des niveaux proches du salaire vital, pour l'Indonésie, le Cambodge ou le Vietnam, où les salaires moyens sont inférieurs de 45% à 65% au salaire vital.»

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Un collectif asiatique d'ONG a défini le salaire vital comme un indicateur qui «prend compte des coûts alimentaires et non-alimentaires (habillement, loyer, santé, protection sociale éducation, épargne), de façon à avoir un salaire suffisant pour une famille de 2 adultes et 2 enfants», ce qui relativise légèrement le constat alarmiste du collectif Éthique sur l'étiquette. Pour autant, la situation est d'autant plus préoccupante que certaines marques développeraient des usines automatisées qui menacent directement l'emploi. Or, Nike et Adidas, contactés par l'AFP, s'inscrivent en faux face à ses accusations.

Selon Adidas, «le respect de conditions de travail justes et sûres et de salaires équitables dans les usines […] fait partie intégrante de la politique commerciale [de la marque] et fait partie des arrangements contractuels avec nos fournisseurs.» La marque aux trois bandes assure également qu'elle «exige que les employeurs paient au moins la rémunération prescrite par la loi ou négociée dans le cadre d'un processus de négociation collective. Cependant, les salaires sont déterminés, outre les conditions économiques et le coût de la vie d'un pays, par les lois nationales, le nombre et la disponibilité des travailleurs dans le pays, les qualifications et les compétences du travailleur, la nature du secteur et la compétitivité de l'employeur». Une habile manière de noyer le poisson?

Quant à Nike, un porte-parole déclare que «nous poursuivons nos échanges avec les gouvernements, fabricants, ONG, marques, syndicats et ouvriers pour soutenir un changement structurel de long terme.»

Pourtant, le collectif enfonce le clou et fustige une allocation des revenus inégale entre la part revenant aux ouvriers qui a baissé et celle dédiée au sponsoring et aux actionnaires qui, elle, a considérablement augmentée.

«La part revenant aux travailleur.euse.s [sic] des usines de confections sur le prix d'une basket a baissé de 30% entre 1995 et 2017! Sur un maillot Adidas de la coupe du Monde vendu 90 euros, les travailleur.euse.s [sic] ne touchent que 0,8 euro, tandis qu'Adidas empoche 18 euros de bénéfice.»

Et d'ajouter,

«Avec le contrat à vie qu'il a signé avec Nike, Cristiano Ronaldo gagne en un jour ce qu'un travailleur gagnant le salaire minimum moyen en Europe réunira en 6 ans. Si Adidas et Nike avaient maintenu les mêmes montants de sponsoring entre 2012 et 2017, 1 million de travailleurs en Asie auraient pu recevoir un salaire vital pendant 1 an.»

En 2017, le collectif avait déjà interpellé, sans succès, les équipementiers sportifs sur leurs politiques salariales. Ce nouvel appel peut-il changer la donne? Rien n'est moins sûr…

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