Dans la nuit du 10 mars 1918, les dirigeants bolcheviks quittèrent en toute discrétion l'institut Smolny et embarquèrent pour Moscou d'une gare de marchandises de Petrograd. Cinq jours plus tard, le IVe Congrès des Soviets a officiellement proclamé Moscou capitale de la RSFSR.
Moscou en 1918
La version officielle de l'événement était fondée sur l'argument du danger militaire allemand: dans un appel signé le 11 mars, Léon Trotski soulignait que le Conseil des commissaires du peuple «ne saurait demeurer et travailler à deux jours de marche de l'armée allemande». Or, la vérité était beaucoup plus douloureuse pour les nouveaux maîtres du pays: plus que les troupes allemandes, c'était le prolétariat de Petrograd qui menaçait l'existence même de leur gouvernement.
Moscou en 1918
Le 3 mars 1918, la Russie soviétique signa la paix avec l'Allemagne à Brest-Litovsk, écartant ainsi la menace de la perte de Petrograd aux forces ennemies. Cependant, les bolcheviks prirent bien des précautions en prévision d'une offensive allemande sur une ville dépourvue d'une défense militaire adéquate, procédant à l'évacuation totale de son industrie lourde et de ses réserves en matières premières. Ils renoncèrent toutefois à l'idée de vider Petrograd de «toute la population masculine en bonne santé» faute de wagons disponibles.
«La nouvelle et jeune Russie s'éveille à l'endroit même où la vieille Russie éleva jadis sa puissance. La continuité de notre État est assurée», écrivait le journal Izvestia.
Selon certains rapports relatés par les médias à l'époque, les bolcheviks pétrogradois eurent l'intention fin mars 1918 de rendre à leur ville son nom historique et de la rebaptiser Pétersbourg. Pourtant, il a fallu attendre plus de 70 ans pour que ce projet soit réalisé par un pouvoir tout différent.