Une centaine de manifestants se sont rassemblés lundi sous la neige devant la direction de l’Administration pénitentiaire (DAP) à Paris pour exprimer leur mécontentement de l’accord signé fin janvier par l'UFAP-UNSA, principal syndicat du secteur (40%), avec le ministère de la Justice, et annoncer leur intention de poursuivre le combat.
«Cette mobilisation, c’est pour dire qu’on est pas d’accord avec ce qui a été signé par l’UFAP-UNSA Justice, que pour beaucoup de personnel c’est un coup de couteau dans le dos, c’est une trahison […]. On va rester mobilisé, on va réfléchir à comment faire dans les mois à venir pour réussir à faire plier ce gouvernement et obtenir ce qu’on réclame: du sécuritaire, de l’indemnitaire, du statutaire», a déclaré à Sputnik un membre de Force ouvrière (FO) Pénitentiaire, syndicat qui réunit 30% des surveillants de prison.
Selon lui, l’accord actuel est «de la poudre aux yeux» puisqu’il parle de choses qui existent déjà au lieu de régler les vrais problèmes.
Signé au bout de 12 jours de blocage des établissements pénitentiaires, l’accord prévoit entre autres d’améliorer la gestion des détenus radicalisés (avec la construction de 1.500 places dans des quartiers étanches) et de renforcer la sécurité des agents (avec le menottage des détenus dangereux et un retour aux fouilles inopinées de cellules).
Pour les personnes rassemblées ce lundi à Paris sur l’initiative de la CGT-Pénitentiaire et de FO Pénitentiaire, l’accord signé est «totalement insuffisant», d’après Thibault Capelle, secrétaire local de FO Pénitentiaire.
«Ce ne sont pas des réelles avancées. Ce n’est pas la révolution qu’on attendait au sein de la pénitentiaire. Aujourd’hui, ce que demandent les collègues au sein même du métier, c’est vraiment de changer tout l’aspect du travail» pour rendre le métier attractif, a-t-il déclaré à Sputnik.
La manifestation de ce lundi n’a pas réuni beaucoup du monde, mais cela ne s’explique pas par l’affaiblissement du mouvement de grogne suite à la signature de l’accord avec le ministère de la Justice, à son avis.
«Nos collègues ont été totalement écœurés pour la plupart et c’est pour ça qu’aujourd’hui ils sont un petit peu démotivés. En plus, avec le froid et la neige vous rassemblez tout ça… C’est ce qui fait qu’on est un peu moins mais vous voyez qu’il y a quand-même du monde», a noté M.Capelle.
Les syndicats FO et CGT, qui réclament notamment un alignement du statut des surveillants pénitentiaires sur celui des policiers, pour une meilleure reconnaissance de leurs conditions de travail, ont beaucoup de moyens d’action en plus «de bloquer des établissements», méthode qui a déjà posé des problèmes aux autorités lors des procès de Salah Abdeslam et de Jawad Bendaoud.
«Le combat-là, il est en train de s’inviter au parlement. Et aujourd’hui on va faire confiance un petit peu aux politiciens qui ont été élus, également par des pénitentiaires […]. C’est à eux de porter nos revendications au sommet de l’État», a estimé M.Capelle.
Selon l’édition du 31 janvier de l'hebdomadaire satirique Le Canard enchaîné, Emmanuel Macron se serait emporté devant ses proches au sujet de la crise des prisons. Selon lui, «les syndicats ne tiennent rien». Le Président aurait accusé le syndicat Force ouvrière d'être infiltré par le Front national (FN), ce qui expliquerait, selon lui, la position «jusqu’au-boutiste» du mouvement des surveillants pénitentiaires.
«Vous voyez les déclarations qu’Emmanuel Macron fait en confidence soi-disant au Canard enchaîné. C’est pour vous prouver qu’il n’y a plus grand-chose aujourd’hui qui peut tenir les pénitentiaires et le malaise. Certaines choses ont essayé d’être étouffées mais ce n’est absolument pas le cas […]. Quand on arrive à des déclarations pareilles, c’est que le problème n’a pas pu être pris au sérieux, il a été largement sous-estimé par les politiques. Si on ne veut pas que ça recommence dans 10 ans, il faut vraiment agir», a conclu M.Capelle.