La séduction de Wall Street par l’Arabie saoudite frustrée par Joe Biden?
10:15 26.01.2022 (Mis à jour: 22:24 08.04.2023)
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Si les entreprises américaines hésitent à investir en Arabie saoudite, Riyad pense que c’est surtout à cause de Joe Biden qui émet un appel d’air contre le pays, estime Sami Hamdi, analyste de risque politique, au micro de Rachel Marsden.
"Historiquement, l’économie de l’Arabie saoudite a toujours été dominée par les monopoles, les élites. Si une entreprise étrangère voulait investir dans le pays, elle devait trouver un partenaire proche du régime. Les réformes de MBS ont cassé ces monopoles donc en principe, elles devraient avoir ouvert l’économie. Les diplomates, les politiciens estiment donc qu’il y a maintenant davantage de nouvelles opportunités dans le royaume."
Malgré un climat d’investissement amélioré, les entreprises américaines seraient "devenues hostiles" vis-à-vis de l’Arabie saoudite. Elles menacent ainsi les plans de croissance du prince héritier, Mohammed Ben Salmane (MBS). C’est ce que signale Le Wall Street Journal, l’un des journaux économiques les plus prestigieux des États-Unis.
"Des impôts surprises, des factures impayées et des vols de propriété intellectuelle sapent les efforts du gouvernement pour sortir l’économie du pétrole", selon la publication. À titre d’exemple de sociétés américaines en butte à ces problèmes, le Wall Street Journal cite Uber Technologies, General Electric, Bristol-Myers Squibb ou encore Gilead Sciences. D’autres projets dans le royaume, comme ceux d’Apple, n’ont jamais abouti bien que MBS tente de sevrer son pays de sa dépendance vis-à-vis du pétrole.
Qu’est-ce qui a mal tourné dans le partenariat de longue date qui a permis à Washington d’échanger le pétrole saoudien et un tremplin au Moyen-Orient pour ses interventions militaires contre son inconditionnel soutien politique et militaire au royaume?
Pour Sami Hamdi, malgré les nouvelles opportunités sur marché saoudien, les sociétés américaines rencontrent trop de risques:
"Tout d’abord, le pouvoir est concentré entre les mains de Ben Salmane. Il change tout sans consultation, impose des taxes rétrospectives. Par ailleurs, son image est écornée en Occident (droits de l’homme, affaire Khashoggi…)."
Et comme, poursuit notre intervenant, "Joe Biden considère MBS comme un paria, il veut l’isoler. Tout ceci rend le climat beaucoup moins favorable à l’investissement américain dans le pays". Le nouveau locataire de la Maison-Blanche a en effet initié un changement d’attitude vis-à-vis du pouvoir saoudien par rapport à l’administration Trump.
"À l’inverse de Trump, Biden a toujours dit qu’il ne souhaitait pas communiquer personnellement avec le prince MBS. Il a toutefois envoyé des délégations pour discuter. Et MBS, en revanche, veut que le monde sache que Biden a parlé avec lui parce que pour lui, l’opposition claire de Biden est la principale raison à la frilosité des entreprises américaines en Arabie saoudite", constate Sami Hamdi.
Les États-Unis sont pourtant d’une certaine manière dépendants de l’Arabie saoudite pour leurs interventions militaires au Moyen-Orient comme pour le pétrole. Cette posture de Biden ne représente-t-elle pas un risque pour Washington?
"Le monde et l’Arabie saoudite ne sont pas les mêmes qu’il y a dix ans. Il y a une grande concurrence entre les pays du Moyen-Orient eux-mêmes. Pour Biden, qui souhaite se concentrer sur la Chine et la Russie, il fallait imposer une discipline. Et maintenant, grâce à l’administration Biden, il y a un dialogue entre les pays de la région, à l’exception du Yémen", considère l’expert.