Des membres anonymes des services de renseignement américain accusent la Russie d’avoir offert de l’argent à des combattants liés aux talibans en Afghanistan, pour attaquer des troupes américaines et leurs alliés de la coalition internationale, selon le New York Times.
La fuite de renseignements bruts, présentés comme classés secret défense par les services américains, suit un modèle que l’on observe régulièrement contre les cibles des coups d’État menés par les États-Unis. C’est un schéma facilement identifiable: ils divulguent un récit soigneusement conçu, qui suscite la peur et une intense réaction émotionnelle. Le récit se propage rapidement dans le monde entier par le biais des médias et des réseaux sociaux.
Toute nuance ou variante du récit initial est perdue ou ignorée en raison de sa nature sensationnaliste. Les extraits de l’histoire sont répétés en boucle pour que celle-ci finisse par être considérée comme une vérité irréfutable. L’opinion publique est montée avec succès contre la cible.
Mais dans ce cas précis, la cible pourrait bien être Donald Trump. Michel Raimbaud, ancien ambassadeur de France et auteur du livre Les guerres de Syrie (Éd. Glyphe), se montre plus que sceptique sur cette affaire:
«Ça sent l’intoxication à plein nez. Au fond, c’est une affaire de services de renseignement.»
L’information, démentie par le Kremlin, la Maison-Blanche, mais aussi par un porte-parole des talibans, pourrait cibler le Président américain en le faisant apparaître comme passif. Raimbaud réagit à cette hypothèse:
«Je crois que c’est manifestement le Président Trump qui est la cible, de mon point de vue. Il est actuellement dans un état de faiblesse. Pas seulement du fait du coronavirus ou de différents conflits, mais parce qu’il s’est manifestement fait beaucoup d’ennemis dans son Administration, dans l’État profond, y compris dans son entourage même, y compris parmi ses ministres.»
Impossible d’évaluer indépendamment et objectivement la crédibilité d’accusations provenant de sources anonymes, surtout sans le moindre élément de preuve. Michel Raimbaud ne croit pas à cette histoire digne d’un western:
«Tout est possible, mais les Russes ont plein d’autres moyens pour intervenir en Afghanistan sans aller se compromettre dans des mouvements de style mafieux, c’est-à-dire de payer des primes.»
Les services de renseignement des États-Unis pourraient-ils organiser des fuites dans un but politique contre leur propre Président? L’ancien ambassadeur répond:
«Bien sûr qu’ils sont politisés, parce qu’ils ont un rôle politique, et je crois qu’on ne peut pas l’éviter. Ils laissent filtrer leur mécontentement du fait que le pouvoir politique ne tient pas compte de leurs mises en garde, de leurs avertissements, leurs analyses ou de leurs rapports. Alors, je pense qu’aux États-Unis, ça arrive. Il y a 17 agences.»