Il a fallu de longues négociations et de nombreuses modifications pour que la résolution 2532 (2020) sur la pandémie de Covid-19 soit finalement adoptée par le Conseil de sécurité de l’Onu. La Tunisie ainsi que la France ont dû activer leur arsenal diplomatique afin d’obtenir gain de cause.
Rappelons ici que la Tunisie a présenté son projet en tant que membre non permanent au Conseil de sécurité de l’Onu, depuis juin 2019. Un poste qu’elle occupe pour la période 2020-2021.
Revenant sur les coulisses de cette opération, Abdelkarim Hermi, conseiller diplomatique du Président de la République, a déclaré le 1er juillet, au journal de 20h de la chaîne publique de télévision Al Wataniya 1, que:
«La vision du Président Kaïs Saïed était d’avoir une approche globale, dans le cadre de l’Onu, pour lutter contre la pandémie. Ainsi, il a multiplié les contacts auprès des chefs d’État de plusieurs pays voisins et amis, et même auprès de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) pour soutenir le projet de résolution qu’il allait présenter au Conseil de sécurité.»
La démarche tunisienne était de le faire accepter d’abord par les dix membres non permanents du Conseil de sécurité, avant de le présenter au reste des membres du conseil. Ce qui a été réalisé. «Entre-temps est venue la proposition française d’une résolution similaire à la tunisienne. Les deux pays ont alors décidé, vers le 23 avril, de fusionner les deux textes et de présenter une résolution commune», a poursuivi le conseiller diplomatique.
Une position qui n’a pas manqué de susciter la réaction de la Chine, laquelle a menacé elle aussi d’utiliser son veto si la résolution ne faisait pas référence à l’OMS. Le texte est donc restée bloqué pendant trois mois. Il a fallu que la Tunisie et la France le retouchent et trouvent une formulation satisfaisant les deux puissances mondiales.
Dans la nouvelle version présentée au Conseil de sécurité, un paragraphe a été ajouté faisant référence à la résolution 70/270 intitulée «Solidarité mondiale dans la lutte contre la maladie à coronavirus 2019 (Covid-19)» et adoptée par l’Assemblée générale le 2 avril 2020. C’est dans cette résolution qu’un hommage explicite a été rendu à l’Organisation mondiale de la santé, en saluant le «rôle crucial» joué par elle dans la lutte contre la propagation du Covid-19).
Cette version a été adoptée à l’unanimité.
«C'est la première fois que le Conseil de sécurité adopte une résolution sur la santé. C’est un acquis historique», a déclaré à l’AFP l'ambassadeur tunisien à l'Onu, Kaïs Kabtani.
Quant à l'ambassadeur français à l'Onu, Nicolas de Rivière, il a indiqué que «cette résolution doit maintenant être mise en œuvre».
Une image positive pour la Tunisie
Commentant l’événement, Mohamed Lymam, enseignant de sciences politiques, a souligné à Sputnik que «l’adoption de cette résolution au Conseil de sécurité de l’Onu montre à quel point la diplomatie tunisienne est active et qu’elle réussit à commettre des exploits. En même temps, cela sert l’image de la Tunisie, ce petit pays, membre non permanent du Conseil de sécurité et qui arrive à faire adopter une résolution aussi importante».
Mohamed Lyman estime qu’elle pourrait l’exploiter «symboliquement». Par exemple, «pour obtenir davantage d’aides internationales, notamment au niveau sanitaire, puisque c’est elle qui a été à l’origine de la résolution onusienne sur la pandémie».
«Le président Kaïs Saïed pourrait lui aussi bénéficier de cet événement pour renforcer son image personnelle, sur le plan international, mais surtout sur le plan national où il est très souvent accusé par ses détracteurs d’être un novice au niveau de la politique. Grâce à cette résolution, il a montré qu’il était un visionnaire», note l’universitaire.
Rappelons que la résolution 2532 (2020) exige la «cessation générale et immédiate des hostilités dans toutes les situations dont le Conseil de sécurité est saisi» et exige «de toutes les parties une pause humanitaire pour au moins 90 jours successifs de façon à permettre l’acheminement sûr, sans entrave et durable de l’aide humanitaire». Enfin, le texte met l’accent sur «les effets négatifs et disproportionnés» de la pandémie sur les catégories les plus vulnérables comme les femmes, les personnes âgées, les réfugiés et les handicapés.