Mercredi 10 juin, l’ancienne magistrate Éliane Houlette a été auditionnée dans le cadre de la commission d’enquête de l’Assemblée nationale consacrée aux «obstacles à l’indépendance du pouvoir judiciaire». Elle y a dénoncé des «pressions» de la part du parquet général lorsqu’elle était à la tête du parquet national financier (PNF) et menait les investigations sur l’affaire Fillon en février 2017, a révélé Le Point.
Elle reproche à celui-ci d’avoir exigé de nombreuses fois des remontées d’informations, souvent avec des délais très courts.
«Les demandes de précisions, de chronologie générale – tout ça à deux ou trois jours d'intervalle –, les demandes d'éléments sur les auditions, les demandes de notes des conseils des mis en cause […] On ne peut que se poser des questions. C’est un contrôle très étroit», s’est plaint l’ex-procureur.
«J'ai gardé toutes les demandes, elles sont d'un degré de précision ahurissante […] Je les ai ressenties comme une énorme pression», a-t-elle confié.
Ouverture d’une information judiciaire
Ce même parquet lui avait également demandé de «changer de voie procédurale» contre M. Fillon, à savoir d’ouvrir une information judiciaire. Les investigations avaient jusque-là lieu dans le cadre d'une enquête préliminaire. Dans un premier temps, elle a résisté à la pression, mais a fini par y céder. Elle assure toutefois avoir pris cette décision car elle était convaincue que c’était la bonne chose à faire.
Autre fait souligné par l’ex-procureur: le Parlement a voté une réforme de la prescription pénale en février 2017, en pleine affaire Fillon. Une loi qui interdit le PNF d’enquêter sur des faits qui remontent à plus de douze ans, ce qui est curieusement favorable à l’ancien Premier ministre. Mme Houlette annonce alors l’ouverture d’une information judiciaire par l’adoption de cette réforme. Le parquet général a tenté de s’y opposer, en vain.
«Je n'ai pas eu le sentiment que nous faisions cause commune», a-t-elle conclu.
Toujours selon les informations du Point, les magistrats, quant à eux, critiquent le PNF qui peine à «s'insérer, toutes ces années, dans une organisation hiérarchisée» alors qu’il est légalement soumis au parquet général.