Coronavirus, un infectiologue français s’oppose aux dires de l’OMS

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Ce 6 mars, le cap des 100.000 contaminés au Covid-19 a été franchi. Le nouveau coronavirus résonne à l’international via les médias. Une information qui répond à la demande de transparence des populations mais qui crée des inquiétudes. Qu’en est-il de la situation en France? Le professeur Jean-Michel Molina fait le point pour Sputnik.

Le nouveau coronavirus s’est propagé comme une traînée de poudre à travers le monde, avec plus de 100.000 personnes contaminées, dont plus de 570 en France. Près de 3.500 personnes sont décédées, dont neuf morts à déplorer dans l’Hexagone en date du 6 mars. Alors que le 24 janvier dernier, Agnès Buzyn, alors ministre de la Santé, affirmait que le risque dû au virus était modéré voire nul en France, les chiffres d’aujourd’hui prouvent bien le contraire. Que faut-il penser de la gestion française de la crise, le pays a-t-il tardé à prendre les mesures nécessaires?

Interrogé par Sputnik, le professeur Jean-Michel Molina, chef du service infectiologie de l’hôpital parisien Saint-Louis, se veut rassurant et assure que tous les services de l’État se mobilisent pour faire face à l’épidémie «d’un agent infectieux qui est heureusement le plus souvent bénin» mais qui reste dangereux pour les personnes les plus fragiles. Il regrette le traitement médiatique qui alimente la psychose, bien que tous ne partagent pas son opinion, y compris l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

«Il existe en effet une forte pression médiatique. L’information est importante pour que les gens prennent leurs précautions sans s’affoler. En effet, même en l’absence de vaccin ou de traitement contre ce virus, nous disposons tout de même de moyens efficaces pour se protéger et aussi pour prendre en charge les personnes malades.»

Alors que la France s’apprête à passer au stade 3 de l’épidémie, des stades générateurs d’angoisses pour l’expert, pour la plupart des personnes contaminées, le professeur assure qu’il s’agira d’une infection bénigne «sous forme d’atteinte des voies aériennes supérieures, une sorte de rhume ou d’angine». Mais pour les personnes les plus âgées, atteintes de maladies chroniques, cardiaques ou respiratoires, l’infection sera plus grave et ce sont ces personnes-là qu’il faudra protéger. Si en France, près de 600 personnes ont été testées positives au 6 mars, le nombre de cas ne va cesser de s’accroître, selon lui, puisque le Covid-19 est très contagieux. D’où la nécessité de prendre les différentes mesures d’hygiènes: se laver les mains, porter un masque en cas de symptômes et éviter les rassemblements d’un grand nombre de personnes.

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«Les coronavirus, on les connaît bien, ce sont des virus qu’on appelle les virus du rhume. C’est un peu comme si nous avions une épidémie de rhume plus sévère. Même si je ne souhaite pas banaliser la situation, je trouve qu’on la dramatise à l’extrême.»

Si le professeur se montre rassurant, ses propos ne sont pas partagés par tous, y compris par l’Organisation mondiale de la santé. Lors d’une conférence datée du 3 mars, le directeur général de l’OMS insistait sur la sévérité du Covid-19, avec un taux de mortalité estimé à 3,4%, ce qui rend le virus «plus sévère que la grippe mais plus difficilement transmissible». Tout le contraire de ce qu’avance l’infectiologue de l’hôpital Saint-Louis en somme, qui a réagi aux propos de l’OMS:

«Ce taux est directement lié aux diagnostics qui sont faits. Si l’analyse se déroule à l’hôpital, le taux de mortalité sera beaucoup plus élevé parce qu’on aura analysé les formes les plus graves. Si l’analyse se déroule en ville, il sera beaucoup plus faible. À ce jour, il est difficile de se prononcer précisément. On ne pourra dire si ce virus est plus dangereux qu’une grippe qu’à la fin de l’épidémie. En tout cas, aujourd’hui il est beaucoup moins dangereux que d’autres coronavirus comme le SARS ou le MERS.»

Un taux de létalité qui se base sur le nombre de cas dépistés. Or, il est connu qu’une bonne partie de la population n’est et ne sera sûrement pas testée du tout, au vu de la complexité de la démarche. Premièrement, cela amènerait à une saturation des services de santé et ensuite, rien ne peut assurer que la personne soit contaminée après dépistage, rendant ce dernier inutile. Si aujourd’hui, dans le monde, 100.000 personnes sont positives, en réalité c’est peut-être le double voire le triple qui est contaminé sans le savoir et sans subir de conséquences aggravantes. De fait, pour l’heure, il est encore trop tôt pour pouvoir s’avancer sur le taux de létalité du Covid-19.

Plus de 55.000 guéris

Sur les 100.000 personnes infectées, plus de 55.000 ont pu être guéries du virus, dont 12 en France. Ces personnes deviennent-elles immunisées? Bien que le professeur Jean-Michel Molina prenne beaucoup de recul sur le coronavirus, il affirme néanmoins au micro de Sputnik que par analogie avec d’autres infections virales, une fois infectée puis guérie, la personne est immunisée. Il ajoute:

«Aujourd’hui, un très grand nombre de personnes qui ont été infectées ont guéri, sont immunisées, et on veut même utiliser leur sang pour essayer de traiter les personnes malades. En maladies infectieuses, c’est un concept assez classique: utiliser les anticorps que l’on fabrique pour se défendre contre une infection afin de les transférer sur une personne malade. C’est une méthode utilisée lorsque l’on ne dispose pas de traitement efficace.»

Cependant, des cas de personnes guéries mais qui sont retombées malades ont fait leur apparition, principalement en Asie, rapporte le quotidien Les Échos. Même s’ils restent rares, ces cas inquiètent les experts qui avancent plusieurs raisons comme le professeur Jin Dong-yan, de l'université de Hong Kong. Celui-ci explique que des personnes encore malades ont probablement été autorisées à quitter l’hôpital, notamment à cause de tests erronés. Depuis, certains hôpitaux ont renforcé leurs examens de sortie.

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Tel n’est pas le cas en France, où l’on rapporte que 12 patients ont été guéris. Et malgré la communication bancale de la part du gouvernement autour du Covid-19, le professeur Jean-Michel Molina se veut très optimiste et salue les efforts des hôpitaux publics, qu’il dit prêts à faire face à l’épidémie malgré la crise que subit l’institution depuis fin 2019.

«Il y a une prise de conscience par les pouvoirs publics de la nécessité de renforcer significativement les moyens financiers des hôpitaux, de revoir la gouvernance et de revaloriser les métiers les plus faiblement rémunérés. Espérons que les financements suivront… Cette épidémie nous montre en tout cas la réactivité des hôpitaux publics qui sont capables de se mobiliser rapidement et efficacement dans une situation de crise comme celle que nous connaissons.»
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