Recep Tayyip Erdogan a profité de sa visite de travail à Alger pour présenter ce qui peut être considéré comme sa nouvelle vision du dossier libyen. Ce dimanche 26 janvier, lors d’une conférence de presse animée avec son homologue algérien Abdelmadjid Tebboune, le Président turc a plaidé pour une solution politique en Libye.
«Il est impossible de parvenir à un résultat dans le dossier libyen avec des solutions militaires. Le dialogue et l'entente demeurent les facteurs essentiels d’une stabilité durable. Il existe des contacts intenses avec les pays de la région et les acteurs internationaux pour un cessez-le-feu durable et la reprise du dialogue politique», a déclaré Recep Tayyip Erdogan.
La déclaration d’Alger est donc un virage à 180 degrés. Et, selon Recep Tayyip Erdogan, les troupes envoyées à Tripoli se sont transformées «en experts chargés d’entraîner les militaires du GNA».
Pour Hakim Boughrara, universitaire et analyste politique algérien, l’aspect militaire n’est qu’un volet de la stratégie turque en Libye.
«La Libye est très importante pour les Turcs, et cela pour différentes raisons. Leur stratégie pour ce pays du Maghreb se base sur trois piliers: politique, militaire et économique. En proférant la menace d’une intervention militaire, Erdogan ne visait pas uniquement le maréchal Haftar, l’ennemi de son allié Fayez el-Sarraj, mais aussi indirectement Alger», explique-t-il à Sputnik.
En effet, poursuit Hakim Boughrara, l’Algérie a besoin d’une Libye stable et pacifiée à ses frontières. L’objectif final de la Turquie, et de toutes les puissances impliquées dans le conflit libyen, est de profiter des ressources énergétiques de ce pays. Mais le Président Tebboune, lors de la rencontre de Berlin, avait affirmé être contre toute ingérence étrangère en Libye et que les avantages d’ordre économiques ne pouvaient être accordés à un pays tiers que par un gouvernement libyen légitime.
«Ce qui peut paraître comme un revirement d’Erdogan n’est en fait qu’une manière de privilégier l’option politique tout en gardant l’option militaire sous la main», précise l’analyste.
Lors de sa visite algéroise, le Président turc a mis en avant ses ambitions: augmentation du volume des échanges commerciaux à plus de 5 milliards de dollars, renouvellement du contrat d'approvisionnement en gaz naturel liquéfié (GNL) jusqu’en 2024 et création d’une zone de libre-échange. Les regards d’Ankara se dirigent également du côté du secteur de la Défense, grand importateur d’équipements. En pleine expansion, l’industrie militaire turque est à la recherche de nouveaux marchés. Jusqu’à présent, les résultats sont plutôt limités puisque seul Aselsan a réussi à se positionner en Algérie.