À la liste des journalistes blessés en mission par l'équipement de la police française s’est ajoutée une autre victime le jour de la grève générale du 5 décembre. Un photojournaliste de l'agence turque Anadolu, Mustafa Yalcin, a été grièvement blessé au visage par une grenade lacrymogène.
Au micro de Sputnik, le journaliste blessé revient sur ce qu’il s’est passé et sur comment évolue la gestion des manifestations en France.
Les circonstances du drame
Près d’un bâtiment se trouvait un groupe de policiers en embuscade qu’il n’avait pas remarqué. Les manifestants, remarquant la présence de la police, ont commencé à leur jeter des pierres et le correspondant a décidé de quitter son abri.
«Je pense qu'à ce moment la police était dans une situation difficile et a décidé d'utiliser un équipement spécial qui, dans ses caractéristiques, serait comparable à une arme à feu. Malheureusement, cela m'a touché. Je pense que c'était un accident», a-t-il déclaré.
Mais, chose particulièrement surprenante pour lui, le drame a eu lieu alors qu’il était bien équipé et protégé: «Je portais un casque de fabrication allemande, souvent utilisé par les policiers français, et un masque à gaz. Le verre avant de ce casque est antichoc, capable de protéger contre la pierre, il est fait d'un matériau similaire au mica. Un tel masque ne peut être percé qu'avec un marteau et d'un coup très fort. Et malgré toutes ces précautions, ma blessure était si grave».
Son état de santé
Suite à cet incident, une période de convalescence «très difficile» attend le journaliste. L’œil a été sauvé, mais il est peut-être déjà trop tard pour restaurer complètement sa vue, déplore-t-il, soulignant que seules 10% des prévisions des médecins à ce sujet sont positives.
«Les experts envisagent même une option telle que me transplanter une partie saine de l’œil d'un donneur décédé. Mais même cela nécessite au moins une restauration partielle des zones endommagées. Cela peut prendre des années et non des mois. Dans le scénario le plus optimiste, l'œil pourra retrouver partiellement ses fonctions visuelles, dans le scénario le plus négatif, je resterai aveugle d'un œil.»
Comme le journaliste dispose d’une assurance en France, une enquête sur cet incident aura lieu.
Un soutien général… mais pas des autorités françaises
Le journaliste raconte avoir reçu un «énorme» soutien de la part de plusieurs responsables et collègues: de la direction et des employés d’Anadolu, du Président Erdogan et de représentants du gouvernement turc.
Toutefois, il a été désagréablement surpris en constatant que les autorités françaises ne commentaient pas l’affaire de quelque manière que ce soit:
«Cependant, il y a un moment qui m'a bouleversé et m'a étonné. Je suis un Turc français, j’ai la double nationalité. Habituellement, même si quelque chose arrive à une personne ordinaire, le gouvernement français fait une déclaration. Cependant, dans mon cas, il n'y a eu aucune déclaration, aucune excuse, aucun souhait de recouvrement auprès des autorités françaises. Je ne connais pas les raisons de cela, mais je peux dire que cela m'a vraiment bouleversé.»
Une gestion à Paris qui entraîne des pertes importantes
Le journaliste exerce son métier depuis 30 ans. Il travaille en France depuis 2005. Il avoue que «même à l'époque de Sarkozy», il n’a jamais rencontré de situation où les rassemblements de protestation étaient à ce point «hors du contrôle des autorités».
M.Yalcin s’en est également pris à la gestion des manifestations en France.
«Les mesures prises par le gouvernement français pour augmenter les bénéfices se transforment en dommages encore plus importants pour lui-même. Par conséquent, les autorités devraient réfléchir soigneusement à la manière de prévenir ces actions. Au final, les biens publics qui subissent des dommages lors des affrontements sont à nouveau payés par les impôts du commun des mortels, de sorte que la France y perd à nouveau.»