Deux ans et demi après l’élection d’Emmanuel Macron, Sibeth Ndiaye était l’invitée des Matins de France Culture afin de dresser un premier bilan. Parmi plusieurs sujets, le refus d’accréditer les médias RT et Sputnik est revenu sur la table. Le journaliste Frédéric Says lui demande alors une réaction.
«Sur les médias que vous avez cités, je ne sais pas si on peut les considérer en tant que tels, c’est une vraie question déontologique que la profession à mon sens doit se poser. Je sais qu’elle est difficile à apporter d’un point de vue déontologique mais moi je considère que ce ne sont pas tout à fait des médias libres tels qu’on peut les connaître en France. En France, vous avez personne qui relie les éditos de Frédéric Says, je ne suis pas sure que ce soit complètement le cas pour les reportages de Sputnik ou RT», a déclaré Sibeth Ndiaye.
Et ça tombe bien puisque la profession s’est déjà posée la question et y a même répondu. Le Syndicat national des journalistes (SNJ) déclarait encore le 11 octobre 2019 lors du congrès de Biarritz:
«Pourtant, titulaires de la carte de presse, les journalistes de RT France exercent leur profession au sein d'un média dont la chaîne télévisée détient une licence de diffusion délivrée par le CSA. Réuni en congrès national du 9 au 11 octobre, le SNJ dénonce et condamne le refus répété d’accréditer certains journalistes aux seins des institutions de pouvoir, la pratique correspondant à une réelle entrave à la liberté d’informer. Ce n’est pas au chef de l'État ni à sa majorité de définir sur mesure la couverture médiatique d'événements officiels. La capacité des journalistes à exercer n’est jugée que par leurs pairs.»
Frédéric Says se demande alors où placer la limite. Nommant des médias proches des pouvoirs étrangers comme Al Jazeera, proche du pouvoir qatari ou encore CCTV, proche des pouvoirs publics chinois. Ce à quoi la porte-parole du gouvernement a répondu non sans peine:
«Justement, ce n’est pas forcement aux politiques de la placer, c’est pour ça que je faisais appel à la profession, et à ce sujet d’un conseil déontologique - je crois que c’est comme ça que ça s’appelle - qui est aujourd’hui en discussion. Si on ne fait rien, on finira tous par se faire avaler par la fake news. Tout le monde pourra dire qu’il est journaliste. Au fond, avoir une carte de presse c’est pas si difficile que ça!»
«Avoir une carte de presse, ce n’est pas si difficile que ça», une phrase qui suscite un éclat de rire du présentateur, (à la rédaction de Sputnik aussi d’ailleurs): «ça, je vous propose d’essayer», lui lance alors l’animateur au vu du nombre de journalistes reporters d'images (JRI) qui travaillent pour des grands titres sans carte de presse. La secrétaire d'État auprès du Premier ministre assure que ce n’est pas aux politiques de placer ces limites, sous-entendant son intention de ne pas accréditer Sputnik ou RT.