Affaire de la Crimée: quand Kiev joue des sales tours et cible la Russie avec «sa liste d’ennemis»

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Alors que Kiev et Moscou poursuivent leur bras de fer devant la CEDH concernant la Crimée, l’Ukraine a placé des représentants russes sur la liste des «ennemis» du pays, rendant publiques leurs informations personnelles. Un geste politique qui «vise à intimider et faire taire», estiment de nombreux experts.

Le vice-ministre russe de la Justice, Mikhail Galperin, ainsi que l’avocat britannique de la partie russe Michael Swainston, ont été placés sur la liste noire du site ukrainien Myrotvorets. Cette base de données créée par des militants locaux avec le soutien du gouvernement fin 2014 a pour objectif de répertorier les «ennemis de l'Ukraine» et de révéler leurs informations personnelles.

M. Galperin a été ajouté à la base de données après avoir réfuté devant la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) les affirmations de l’Ukraine concernant de prétendues violations des droits de l’Homme commises en Crimée par la Russie. Quant à M. Swainston, responsable de l'équipe juridique britannique, il a vu son nom inscrit sur la liste en raison de sa prétendue «justification de l'agression russe» et de «la manipulation d'informations d'une grande portée sociale».

L’affaire, soumise à la Cour par Kiev en 2014, portait sur un certain nombre de questions, notamment le fait de savoir si la Russie avait «contrôlé» la Crimée à la fin du mois de février 2014 à la veille du référendum sur le rattachement du 16 mars 2014.

Liste «des ennemis de l’Ukraine»

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La plate-forme Myrotvorets est devenue tristement célèbre pour avoir publié des informations privées de personnes qu’elle considère comme des «ennemis de l’Ukraine», y compris des adresses personnelles et des numéros de téléphone privés. En 2015, l'ancien législateur ukrainien Oleg Kalachnikov et le journaliste Oles Bouzina ont été assassinés à Kiev après la divulgation de leurs informations par le site en question. De nombreuses autres personnes ont également été victimes de menaces et de tentatives d'intimidation.

Reporters sans frontières et le Comité pour la protection des journalistes ont par le passé appelé le Président ukrainien Petro Porochenko à condamner publiquement cette campagne brutale, mais en vain.

Myrotvorets a en outre déjà demandé aux autorités ukrainiennes de considérer les déclarations de MM. Galperin et Swainston lors des procédures devant la CEDH comme des «actes conscients menés contre la sécurité nationale, la paix, la sécurité de l’humanité et l’ordre juridique international du pays, ainsi que d’autres violations du droit».

«Politique de la peur»

«Malheureusement, ceci n'est qu'un nouvel exemple de la politique de peur fasciste utilisée par certaines fractions au sein des autorités ukrainiennes au pouvoir», a déclaré Alan Bailey, commentateur politique et militant au Royaume-Uni. «Toute personne qui ose parler publiquement et de manière critique» des autorités ukrainiennes «risque de figurer dans la base de données et de voir ses informations personnelles exposées à un public parmi lequel il y aura très probablement des personnes qui lui souhaiteront du mal», a-t-il ajouté.

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Soulignant que «de nombreux pays européens et organismes internationaux avaient demandé à l'Ukraine de supprimer cette base de données», mais que les autorités refusaient de le faire, M.Bailey a estimé que ce refus s’inscrivait dans la politique actuellement menée par le pays.

«Il suffit d’évoquer de façon positive certains sujets, dire que les Criméens sont plus heureux en tant que membres de la Fédération de Russie, ce qu'ils sont manifestement… et vous risquez de devenir une cible évidente répertoriée par le site Web Myrotvorets», a conclu M.Bailey.

Selon l'analyste géopolitique Ollie Richardson, Myrotvorets doit son existence en grande partie au soutien du ministère de l'Intérieur de l'Ukraine.

«Le ministre de l'Intérieur, Arsen Avakov, qui a obtenu son poste grâce au coup d'État de 2014 et le tient depuis», a expliqué M.Richardson, «a besoin à la fois de Myrotvorets et de groupes "apprivoisés" comme le Corps national [parti ukrainien ultra-nationaliste, ndlr] qui restent à portée de main, prêts à être utilisés non seulement contre toute force interne qui manifesterait de la sympathie pour la Russie… mais aussi contre les soi-disant "ennemis de l’État" externes qui rappellent à l’Ukraine, par exemple, qu’elle achète toujours du gaz russe [à l’Europe, ndlr] mais à deux fois le coût», a-t-il poursuivi.

Tentative d'intimidation

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La liste du site Myrotvorets «vise clairement à intimider les gens et à les faire taire. L’inclusion d’un autre responsable russe de haut rang pour avoir défendu les intérêts de la Russie à Strasbourg aura pour effet de rappeler à tous ceux qui ne bénéficient pas de la protection de l'État qu’exprimer publiquement leurs points de vue pourrait avoir des conséquences», a déclaré Marcus Godwin, un analyste politique britannique.

«Cette affaire, ainsi que l'affaire judiciaire elle-même, est un exercice de propagande. Pour être efficace, la propagande doit être constamment répétée. Le silence est son plus grand ennemi. Ces affaires judiciaires permettent de diffuser dans le monde occidental encore et encore le mensonge selon lequel la Crimée est sous occupation russe. La même tactique est utilisée avec MH17 et l’affaire Skripal», a conclu l’observateur.

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